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lundi 31 décembre 2012

Belle nouvelle année 2013 ...


Notre peur la plus profonde n’est pas que nous ne soyons pas à la hauteur,
Notre peur la plus profonde est que nous sommes puissants au delà de toute limite,
C’est notre propre lumière et non pas notre obscurité qui nous effraie le plus.
Nous nous posons la question : “ Qui suis-je, moi, pour être brillant, talentueux et merveilleux ? ”
En fait, qui êtes-vous pour ne pas l’être ?
Vous êtes un enfant de la vie. Vous restreindre et vivre petit ne rends pas service au monde,
L’illumination n’est pas de vous rétrécir pour éviter d’insécuriser les autres,
Nous sommes nés pour rendre manifeste la vie qui est en nous,
Elle ne se trouve pas seulement chez quelques élus : elle est en chacun de nous, et au fur et à mesure que nous laissons briller notre propre lumière, nous donnons inconsciemment aux autres la permission de faire de même.
En nous libérant de notre propre peur, notre présence libère automatiquement les autres...


Extrait du discours prononcé par Nelson Mandela lors de son intronisation à la présidence de la République de l’Afrique du Sud, 1994 (écrit par une femme : Marianne Williamson). ...

Agriculteurs et hackers au service des territoires...

Technologies rurales

Quand hackers et agriculteurs s’allient pour l’autonomie énergétique

Ils désenclavent des territoires, frappés d’exclusion numérique. Ils développent des réseaux Internet autonomes en zone de montagne, installent des panneaux solaires organiques, ou permettent à des webradios locales d’émerger. Et peuvent même transformer des abreuvoirs abandonnés en jacuzzis écolos. Les « hackerspaces », espaces conviviaux de création d’outils technologiques, essaiment en milieu rural. Entretien avec Philippe Langlois, à l’origine du premier hackerspace français.

Pouvez-vous définir ce que sont les hackerspaces ?
Philippe Langlois : Un hackerspace est un lieu physique autonome qui rassemble des gens autour de projets qui ont trait à la technologie. On parle souvent dans les médias des « méchants pirates informatiques », mais les hackerspaces sont loin de tout ça : nous sommes simplement des personnes qui se réapproprient la technologie de façon conviviale, indépendante et créative. L’objectif est de créer soi-même des outils réappropriables et réplicables par tous, diffusés de façon libre et gratuite et que l’on peut modifier, améliorer.
Les hackerspaces sont nés en Allemagne dans les années 1990 mais se sont véritablement développés en 2005. On en compte désormais plus de 500 à travers le monde, ils regroupent environ 40 000 personnes. À l’origine, ce sont des individus issus des milieux de l’open source et du logiciel libre [1] qui ont transposé leurs façons de faire dans le monde physique tout en démocratisant des savoir-faire technologiques.
Quels sont les projets qui en émergent ? Comment interrogent-ils votre rapport à la technologie ?
Il y a des projets portés sur l’autonomie énergétique, la cartographie participative, l’art numérique, mais aussi le recyclage local de plastique ou encore la dépollution. Notre rapport à la technologie est centré autour de plusieurs notions dont, en premier, celle d’être dans le plaisir et dans la création positive. Ensuite, il y a le fait que ça ne doit pas bénéficier qu’à un groupe restreint de personnes mais bien à l’ensemble de la société. Enfin, il ne faut pas que l’on soit dans des projets trop conceptuels : on est avant tout dans le « faire ». Dans les hackerspaces, on trouve une éthique basée sur la pratique, le bidouillage, le droit à l’erreur, le tout sans dogmatisme.
Comment les hackerspaces sont-ils arrivés en milieu rural ?
D’abord parce que c’est difficile de tenir un lieu en ville : cela coûte cher, il faut des espaces à la fois grands et pérennes pour créer. Des événements ponctuels ont eu lieu autour des hackerspaces (voir ci-dessous), comme à Péone dans les Alpes-Maritimes en 2010 : le but était, entre autres, de savoir si on pouvait créer un lieu 100% autonome à partir de rien, en pleine nature. Plusieurs de ces rencontres éphémères rurales ont entraîné la création de lieux permanents, des « hackerlands ». Il y en a des dizaines en France, comme le projet Vallée à Conques (Cher) ou à ZAP1 dans l’Allier.
Artistes, ingénieurs, chercheurs, hackers et agriculteurs, nous nous sommes demandés comment les technologies numériques peuvent s’associer à la nature, au patrimoine, à l’agriculture. Nos hackerspaces urbains, avec leur philosophie et leur pratiques, peuvent tout à fait se transposer en milieu rural. On s’est rendu compte que beaucoup de personnes en campagne bidouillaient déjà de la technologie numérique ou étaient issues de cette culture.
Comment ces hackerlands s’intègrent-ils localement ? Que peuvent-ils apporter aux territoires ruraux ?
Les communes rurales sont souvent victimes d’abus de la part des bureaux d’études et de grandes entreprises, qui ont des intérêts financiers. Certains hackerlands se posent comme alternative à ces structures, en devenant un peu des consultants locaux à but non lucratif. Ils répondent à des besoins du milieu rural, notamment le désenclavement numérique, en créant des réseaux Internet indépendants qui fonctionnent dans des zones de montagne ou isolées, en mettant en place des serveurs de démocratie locale, des webradios territoriales, etc. Beaucoup de ces hackerlands travaillent autour des pratiques agricoles ou de l’énergie. Ce sont des espaces ouverts, où l’on est accueilli sans préjugé, dans une optique de « faire ensemble ». Certains créent des modules d’auto-construction reproductibles, des panneaux solaires organiques, des serres automatisées. Et même des jacuzzis à partir d’abreuvoirs abandonnés ! Il y a parfois des initiatives plus ponctuelles comme des expériences en agroforesterie, avec la création de capteurs pour analyser l’activité fongique autour des arbres. On pourrait en somme définir ces lieux comme des laboratoires de recherche ouverts et locaux.
Propos recueillis par Mickaël Correia, Transrural Initiatives)


« A Pado loup », un hackerspace éphémère au milieu des montagnes
« Nous cherchons à encourager les gens à passer à l’action, à faire des choses qui puissent les rendre plus autonomes… Le développement et la démocratisation de savoir-faire technologiques dans un cadre rural, c’était l’objectif principal d’A Pado loup », explique Ursula Gastfall, une des organisatrices de ce festival autogéré qui s’est déroulé pour la première fois du 12 au 22 août 2012 à Breuil (Alpes-Maritimes). À plus de 1500 mètres d’altitude, une centaine de personnes d’horizons variés (Espagne, Bretagne, Nord-Pas-de-Calais, Canada…) se sont rassemblées pour constituer cet hackerspace rural et éphémère, suite de l’appel à propositions diffusé par le hackerspace urbain « /tmp/lab/ », installé à Vitry-sur-Seine (94).
Dans le hameau de Pado, près du village de Beuil, la culture du « Do It Yourself » (« Fais le toi-même ») a animé les festivaliers. Ils ont échangé dans le cadre de discussions et d’ateliers d’électronique, d’écologie expérimentale et de performances artistiques. Au programme : fabrication d’éoliennes et de fours solaires, recherche en fermentation, réalisation d’imprimantes 3D, logiciels libres mais aussi concerts, laboratoire de photographie argentique et de lumière… en plein cœur des montagnes alpines.
« Si on regarde l’étymologie de "hacker", cela veut dire "couper du bois", commente Ursula Gastfall. L’autonomie, ça passe par la recherche de solutions pratiques pour répondre à nos besoins dans un contexte particulier ». À Pado, il n’y a ni eau, ni électricité. Les festivaliers ont mis au point un système de récupération d’eau de pluie filtrée avant consommation, ils ont placé des panneaux solaires reliés à des batteries pour alimenter l’appareillage électronique de l’évènement. « J’espère qu’A Pado loup fera des petits, souhaite Ursula Gastfall, que d’autres se motiveront à organiser des évènements sur différents terrains pour donner de la place à la curiosité et à l’inventivité de chacun. »
Mathilde Leriche (Civam de l’Hurepoix)

Notes
[1] L’open source désigne une pratique d’élaboration de logiciel où le code de base est accessible (mais pas forcément gratuitement) et donc transformable. Le mouvement du logiciel libre prône quant à lui des principes de libre accès à l’information, de mutualisation ou encore de gratuité.

dimanche 30 décembre 2012

Keny Arkana indomptable...

Indomptable Keny Arkana

Elle est en rogne, Keny Arkana. Elle n'a pas changé de bord depuis sa première "mix-tape" (compilation) produite en 1999, à 17 ans, avec le collectif marseillais Etat Major. Rappeuse radicale, allergique au vedettariat, aux photos, au monde marchand, c'est une petite meuf de la Plaine, zone populaire du centre de Marseille. Keny Arkana (son nom de quartier, l'originel est d'ordre "privé") est une indignée. "A la base, je suis pour l'autonomie", déclare cette voix féminine, habitée sur scène de diables briseurs et de démons turbulents et qui casse les stéréotypes machistes du hip-hop, comme Diam's en son temps. On la dit un peu folle, sans doute parce qu'elle voit tout. L'oeil tranche dans le gras du monde.

La rappeuse Keny Arkana.
La rappeuse Keny Arkana. | © KORIA

Sur un cours Julien en plein travaux de rénovation, on sirote un café allongé à la terrasse du Court jus (parce qu'il y a du soleil à Marseille, même en hiver, et qu'on le prend comme pain bénit). "Marseille, dit Keny Arkana, 29 ans, c'est la porte de l'Orient, une ville du tiers-monde qui vit avec de vieilles histoires occitanes." La Plaine, juste derrière le cours Julien, c'est chez elle, elle connaît ses "frangins", son grand marché, ses trafics, ses accointances et rivalités avec ceux de Noailles, du Panier, de Belsunce... La Plaine, dit-elle, c'était "le peuple au coeur de la ville". Mais la horde des bourgeois bohèmes s'y est répandue.
Keny Arkana est impossible à contenir, mais elle trace sa route, scandant : "Il pleut des émeutes sur le globe, oui, la jeunesse est dans la ville." Quand elle n'est pas tête brûlée, elle apprend à reconnaître ce qui lui importe : "J'adore l'huile d'olive", répète, tout sourire, l'auteure de Tout tourne autour du soleil, album radical de hip-hop, balancé et énergique, sorti le 3 décembre. Dans ce disque de dix-huit titres figure Le Syndrome de l'exclu, ou comment devenir parano dès qu'on sort de son quartier, comment s'auto-exclure parce que l'on a intégré le regard du vigile et de la bourgeoise.

Avec son sempiternel bandeau enserrant d'épais cheveux, son regard fixé vers des ailleurs, la jeune fille s'est extirpée très tôt du calcaire et des calanques en cul-de-sac. Marseille, c'est sec, "très sec". Pas de vert. "Enfant, je disais à ma mère : "Y a pas de forêt, quand est-ce qu'on part en forêt ?"" Méfiante, comme souvent, Keny Arkana dit de la cité phocéenne, ville adorée, dangereuse par ses indolences communautaires, qu'elle "siphonne, et aspire". "On peut y rester pour toujours, fumer des joints, boire des bières, ne pas bouger. On est bien." (avec une pointe d'accent).
Les rappeurs marseillais de la seconde génération - celle d'après IAM - ont affirmé une identité faite "de soleil et de larmes", selon le chanteur Soprano (d'origine comorienne, issu de la cité du Plan d'Aou, quartiers nord), une mélancolie festive, mélangée. Les règlements de compte en chaîne, l'assassinat d'un buraliste du quartier des Chutes-Lavie, poignardé pour un butin dérisoire à la mi-novembre, font basculer la ville vers un chaos inédit. "Marseille, c'était un grand quartier, où on a toujours vécu grâce aux réseaux", politiques, sportifs, mafieux, clientélistes. "Aujourd'hui, il y a trop de monde dans les réseaux, et ça coince. Alors, dans les quartiers nord, on résout le problème de surcharge avec des armes de guerre, trente balles à la fois, et Gaudin [Jean-Claude, maire UMP de Marseille] pense qu'ils n'ont qu'à s'entre-tuer. Ici, dans le centre, nous n'avons jamais eu la même forme de délinquance. On a toujours aimé aller au charbon, les coups d'éclat, tirer les cartes bleues des touristes allemands. Le meurtre du papetier, c'est abuser !"

Marseille sera Capitale européenne de la culture en 2013. Keny Arkana traduit : Capitale de la rupture, long texte au flot continu figurant sur son album, critique acerbe de la perte d'identité. "C'est le rappeur RPZ, avec qui je travaille, qui a trouvé le titre. On projette des gratte-ciel à l'Estaque, on veut castrer l'anarchie marseillaise. La Joliette, populaire, va devenir un quartier d'affaires ! On vire les Marseillais du centre-ville et les quartiers nord récoltent ce qu'ils peuvent."
Au Court jus, le soleil a tourné. Un drôle de gus en costume de clown tape de l'argent aux habitués ; un chanteur de blues au bord de l'usure, chapeau noir et pantalon pattes d'eph'très moulant, poursuit des chimères. Keny Arkana distribue des "Salut, mon frère" avec ce ton haussé qu'ont adopté les rappeurs, avec accents mélangés (celui des "renois", des "céfrans" à bonnets, des "rebeus"). Keny Arkana porte un tee-shirt estampillé "La rabia del pueblo", "la colère du peuple" en espagnol, parce qu'elle est un peu argentine. Son "géniteur" l'était. Sa mère et celui qui fut son père sont marseillais. Les hasards de la conception l'ont fait naître le 20 décembre 1982 à Boulogne-Billancourt.
La rappeuse Keny Arkana.
La rappeuse Keny Arkana. | © KORIA

Elle est allée en Argentine, "en 2002, juste après la crise, en famille, avec ma mère, mon frère". Ce retour identitaire lui a donné l'envie de parcourir l'Amérique latine "en mode sac à dos", d'aller au Forum social mondial de Porto Alegre au Brésil en 2003, puis de suivre la tribu altermondialiste en Inde, au Mali, et enfin de rencontrer le sous-commandant Marcos, ce "héros", qui dénonça les sigles comme FMI, OMC, Alena (l'accord commercial des Etats sud-américains) et la paupérisation qu'ils induisaient. Un parcours où elle croise Manu Chao, dont elle a assuré les premières parties de concerts en 2006. Mais Manu Chao n'est pas un engagé. Il flirte avec la vague altermondialiste, quand sa cadette marseillaise s'y jette à corps perdu. Diam's s'est convertie aux préceptes du "saint Coran". Booba voue un culte sans partage à l'argent et au paraître. "Moi, je vis simple, je ne suis pas dépensière."
C'est l'heure du déjeuner. Keny en est toujours au café. Une "sister" en dreadlocks, gros écouteurs enserrant le cou, terrienne de nulle part, passe et lui lance : "Tu m'as sauvé la vie", avec des titres insoumis comme ce Cinquième soleil, repris sur les blogs des jeunes insurgés tunisiens du "printemps arabe". La fille lui dit qu'elle n'y "croit pas " de la rencontrer - elle en tremble. Keny Arkana consent une photo commune, se rebiffe, au fond, mais elle a du coeur - (dans la chanson Vie d'artiste, elle dit : "Je suis l'artiste de personne, je suis la plume de mon âme/Qui était là quand petite fille domiciliait sur le macadam ?"). Elle ne donne pas son téléphone, "non, sister, c'est privé".

Protégée, à l'affût, Keny Arkana est impulsive. Son rap est astucieux. Il se barre sans arrêt, elle avec. En 2005, Courrier International écrit que Marcos a disparu. La gamine va vérifier in situ, au Chiapas, en stop - "quelle galère, le voyage de Mexico au Chiapas, jamais plus". Keny Arkana est tranchante. Gentille ado prête à claquer la porte. On voudrait qu'elle détaille. Mais elle esquive. Marcos parle vrai, il est vivant. Elle apprend l'espagnol "sur la route". Sept ans après, en novembre, elle donne un concert à Bogota, boule d'énergie en pelote, chantant ses "indignados" - ses "indignés" ultra en colère, introduits sur l'album par la voix de Stephane Hessel.
"A Bogota ou en Grèce, je résonne", constate, avec justesse, l'irraisonnable. Ici, dans la France de François Hollande, la révolte est en berne. La Rage, son premier disque (deux titres), est sorti trois mois après les émeutes de banlieue d'octobre 2005. "On rêvait d'un mouvement mondial, hors des cadres des partis, des syndicats, des associations subventionnées." Keny Arkana et ses camarades ont dissous en 2007 La Rage du peuple, collectif créé dans le quartier Noailles, en 2004, parce que "Sarko arrivait, que les associations étaient faciles à pirater, que les gourous guettent à la porte des assemblées populaires". Elle venait de publier son premier album, un brûlot, Entre ciment et belle étoile - selon l'historien du rap Olivier Cachin, l'un des cent disques de hip-hop à posséder absolument. Elle se fait un nom chez Because Music, la maison de disques de Catherine Ringer, Justice ou Manu Chao, Mais elle annule tout, rejoint ces réseaux militants qui ont "fait vivre ma musique", anarchistes et autonomes qui organisent des forums militants, parce qu'"un autre monde est possible et qu'on fait tous partie de la solution".

L'argent ? Keny Arkana le donne "à des assos, par exemple pour racheter de la terre et créer des espaces autonomes, écolos. Les squats sont trop éphémères". Elle cite Rat Luciano, qui avait offert "des vacances au ski à tout son quartier", le Panier, grâce au succès de son groupe, la Fonky Family. C'est une fugueuse précoce. "Je n'avais pas dix ans quand j'ai fait ma première fugue. Je disparaissais. J'ai été placée en foyer, j'adorais réussir à m'échapper, j'avais le goût de la liberté. Je ne me suis jamais rendue. J'avais une conscience aiguisée contre l'autoritaire, contre l'injuste. En foyer, j'ai été bourrée de neuroleptiques, de piqûres dans le derrière pour me rendre amorphe. Il y a une maltraitance physique et psychologique incroyable dans ces foyers. J'ai vu l'hypocrisie du système. Et quand j'étais dehors, il y avait le regard des gens, dur, la faim, le froid, enfin beaucoup de soucis. Et puis ces fugues finissaient par une cascade de conneries." Et une envolée de rap (Eh ! connard, J'me barre, etc.)
Suivre une vie normale ? "Même pas en rêve. Depuis le CP, j'ai dit non à l'humiliation scolaire." Ce qui a sauvé "Keny la folle", ce fut La friche la belle de mai, site culturel où le rappeur marseillais Namor, tagueur, graffeur, proche du groupe Assassin, organisait des ateliers d'écriture, parallèlement à ses classes au quartier des mineurs de la maison d'arrêt d'Aix-Luynes. Keny a quinze ans, elle dérive. "Le foyer m'a fait la guerre pour que je n'y aille pas, mais ma mère m'a soutenue, et cela m'a donné une discipline."
La rappeuse Keny Arkana.
La rappeuse Keny Arkana. | © KORIA

Le soleil est tombé derrière les platanes du cours Julien. On bouge vers le Vieux-Port. Keny roule en scoot. On la retrouve au coin de la Canebière, en peine avec la police. Sa coiffure volumineuse empêche la fermeture du casque. Les représentants de l'ordre veulent qu'elle descende de son scooter et reparte en le poussant. Elle dit "non". Ici, on la connaît. On sourit. Elle est sincère, elle ne triche ni ne transige.
"Monsieur l'agent, vous savez bien que je vais remonter dessus dans dix mètres.
- Allez, descendez.
- J'habite à la Plaine, dans dix mètres, je remonte, je vais pas pousser jusque-là, ça monte..."

La discussion dure. Marseille est un quartier.


Sur le Web : www.keny-arkana.com.
Pochette de l'album de Keny Arkana, "Tout tourne autour du soleil".
Pochette de l'album de Keny Arkana, "Tout tourne autour du soleil". | BECAUSE MUSIC

Véronique Mortaigne

Le PCF expulse même en hiver...

Paris XIVe : Le  PCF fait expulser des squatters rue du Château
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Quand le parti communiste expulse

L’édition du jour du Parisien nous apprend que le Parti communiste a demandé (et obtenu !) l’expulsion de squatteurs d’un immeuble au 149, rue du Château dans le 14e arrondissement [le 19 déc.].
Au-delà du changement de posture entre le parti qui prône la mise en commun des richesses dans le préambule de ses statuts et le parti propriétaire qui a visiblement beaucoup de mal à mettre en application ses principes, cette expulsion, sans décisions de justice et en plein hiver, pose de nombreuses questions juridiques.
En effet, les forces de l’ordre seraient intervenues en « flagrance », suite à une plainte du Parti communiste, et les squatteurs doivent être poursuivis prochainement pour « dégradations de biens privés en réunion. »
On espère pour lui que le Parti dispose de quelques preuves de ce qu’il avance, car les témoignages disponibles font plutôt état de personnes installées dans les lieux depuis plusieurs jours, donc bien au-delà du délai de flagrance. Les photos  des affaires embarquées dans un camion montrent d’ailleurs bien la réalité du domicile des occupants. On attendra également quelques preuves de dégradations lourdes susceptibles d’être considérées comme un délit.
Les explications du secrétaire de la fédération de Paris ressemblent à toutes celles des propriétaires pris la main dans la vacance : qu’on se le dise, pour le propriétaire, un squat est toujours dangereux, quand bien même il viendrait d’être inauguré ! Au vu du nombre de sociétés immobilières détenues par le Parti communiste (ma préférée étant la SCI Leninvest…), ils doivent savoir également que le péril fait l’objet de dispositions légales permettant une évacuation immédiate quelle que soit la période de l’année. Les architectes de sécurité de la préfecture de Police de Paris, seuls habilités à déterminer le péril, ont des astreintes régulières pour être en capacité de faire des constats à n’importe quelle heure du jour ou de la nuit en cas d’urgence. La procédure est purement administrative, le statut et la durée de l’occupation importent peu. Encore faut-il qu’il y ait péril !
Si les communistes ont choisi la voie pénale, c’est bien parce qu’ils savaient ne pas pouvoir obtenir une expulsion pour péril.
Dénoncer un squat politique mené par des militants est bien beau, mais même dans le cas où ce serait vrai (et on peut avoir quelques doutes en l’espèce, vu l’absence de revendication et la tentative de négociation préalable) ça n’autorise pas pour autant à expulser. Il convient de rappeler que la politique n’est pas exorbitante du droit commun.
Pourtant, Hélène Bidard, Présidente-Directrice-Générale de la Société Immobilière propriétaire de l’immeuble, donc celle qui porte la plainte a de fort beaux mots  au Conseil de Paris pour parler de la crise du logement, qu’elle connaît bien en tant que présidente d’un bailleur social (SEMIDEP) :
Par un vœu, notre groupe demande que la Ville mette à disposition tous les bâtiments vacants en sa possession, susceptibles d’être mis à disposition de l’hébergement d’urgence. Si nous parlons d’urgence, c’est que la situation ne peut pas attendre. Lorsque la vie de femmes et d’hommes est en jeu, il est de notre devoir d’agir avec conséquence, et de le faire vite.
Les enjeux du logement sont cruciaux, ils répondent à un besoin absolument prioritaire pour les Parisiennes et les Parisiens. A nous d’investir pour se montrer à la hauteur de leurs attentes, et faire de Paris une ville pour tous.
Visiblement, le Parti Communiste a plusieurs manière de comprendre le verbe « investir ». Et sans doute une vision du Droit au Logement élastique...



NB : Hélène Bidard, présidente de la SEMIDEP (Société d’économie mixte immobilière interdépartementale de la région parisienne),est également présidente de la société immobilière Rochechouart, propriétaire du 149 rue du Château, société écran du Parti Communiste Français. La SEMIDEP avait déjà expulsé les mal-logés acharnés du 141 rue de Charonne.
Son mari est Igor Zamichiei, secrétaire fédéral du PCF75.
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Tromper le peuple, toujours... et partout

Silence du droit, colère du peuple
«On dit qu’il n’y a point de péril parce qu’il n’y a pas d’émeute. Permettez-moi, Messieurs, de vous dire que vous vous trompez. Regardez ce qui se passe au sein des classes ouvrières qui, aujourd’hui, je le reconnais, sont tranquilles. N’entendez-vous pas qu’on y répète sans cesse que tout ce qui se trouve au-dessus d’elles est incapable et indigne de les gouverner ; que la division des biens faite jusqu’à présent dans le monde est injuste ? Et ne croyez-vous pas que, quand de telles opinions descendent profondément dans les masses, elles doivent amener, je ne sais quand, je ne sais comment, les révolutions les plus redoutables ?»
Qui parle ainsi ? Jean-Luc Mélenchon, pour justifier sa stratégie «révolutionnaire» ? Olivier Besancenot, pour justifier le maintien de son parti, vraiment de gauche, vraiment anticapitaliste, vraiment révolutionnaire ? Non, point ! Le très libéral Alexis de Tocqueville dans un discours à la Chambre des députés, le 29 janvier 1848, quelques jours seulement avant la… Révolution de février 1848.
Si le surgissement de la voix du peuple surprend toujours, c’est que le peuple, dans sa masse profonde, n’est pas extrémiste, n’est pas révolutionnaire, n’est pas insurrectionnel. Il est patient, écrit Sophie Wahnich dans son essai sur 1792 (1). Et même confiant. Il vote, pour accorder sa confiance à des représentants et, s’il en est déçu, il attend les prochaines élections pour donner sa confiance à d’autres élus. Il manifeste, pour exprimer son mécontentement, mais il demande audience à son député et au président de la République pour obtenir le maintien de la carte famille nombreuse ou de l’activité de Mittal en Lorraine. Il signe des pétitions, il saisit le juge pour faire sanctionner le contrat première embauche, interdire les OGM ou reconnaître le droit au logement. Bref, il fait confiance aux institutions «bourgeoises» et attend d’elles des réponses à ses problèmes. Et le peuple est capable d’attendre longtemps. D’attendre la politique qui fera baisser le chômage, augmenter le pouvoir d’achat, garantir les retraites, relancer l’ascenseur social…
Et puis un jour, le peuple se lasse. Il ne rentre pas encore en colère, il se lasse. Des promesses, des discours, des élections, des syndicats. Et même de l’espérance. Alors que la société valorise l’épanouissement individuel et la réalisation de soi, alors que les progrès techniques, culturels et sociaux créent les conditions de possibilité de ces projets, le peuple finit par ne plus croire dans une société qui ne l’entend plus, qui ne le respecte plus, qui se joue de sa patience.
A cette société du mépris, il oppose l’indifférence. Jusqu’à ce que, de guerre lasse, la colère surgisse. Parce qu’il est préoccupé par la hausse des prix alimentaires et du gaz, parce qu’il est choqué par la dégradation des mœurs publiques, parce qu’il est scandalisé par les avantages fiscaux accordés aux puissants et payés par la remise en cause des politiques sociales, parce qu’il est acculé, le peuple se lève. «La colère du peuple, proclame un élu du Var à la veille de l’insurrection du 10 août 1792, est la conséquence du silence des lois.» L’observation n’est pas fausse. Beaucoup de lois ont pu apaiser la colère du peuple, celles, par exemple, reconnaissant les congés payés, les sections syndicales dans les entreprises, l’avortement…
Mais, quand les élus ne transforment pas en lois les attentes et les demandes du peuple, le peuple, après avoir beaucoup attendu et espéré, se met debout et fait trembler le sol de la société.
Après son discours qu’il conclut par une mise en garde - «je crois que nous nous endormons à l’heure qu’il est sur un volcan» -, Tocqueville fut félicité par ses collègues non pour la lucidité de son analyse mais… pour ses talents d’orateur. Et la Chambre des députés passa à autre chose ! Toute ressemblance avec l’actualité de 2012 serait pur hasard.
DOMINIQUE ROUSSEAU Professeur à l'école de droit de la Sorbonne Paris-I
(1) «La Longue Patience du peuple», Payot, 536 pp., 28 €.

 

samedi 29 décembre 2012

Les femmes en lutte partout....

L'Inde rend hommage à l'étudiante morte après un viol collectif
Une enfant rend hommage à l'étudiante indienne morte après un viol collectif.
La jeune indienne victime d'un viol collectif à New Delhi est décédée dans la nuit de vendredi à samedi 29 décembre, a annoncé l'hôpital de Singapour, où la jeune femme luttait contre la mort depuis deux jours. Les actes de barbarie subis par cette étudiante de 23 ans avaient choqué l'Inde, et provoqué des grandes manifestations qui ont coûté la vie à un policier.
L'annonce de ce décès, emblématique des violences faites aux femmes en Inde en toute impunité, a horrifié le pays où les autorités, craignant de nouvelles manifestations, ont mis en place de forces anti-émeutes dans les rues et ont bouclé plusieurs quartiers du centre-ville, dont les alentours du monument de l'India Gate. Suite à la vague d'indignation qui a secoué le pays après le viol commis le 16 décembre, la police de New Delhi a également appelé la population au calme et au recueillement, dans un communiqué publié par le chef de la police, Neeraj Kumar. Il a aussi annoncé le bouclage de la zone autour du monument de l'India Gate, épicentre de la colère des protestataires, et de dix stations de métro.
Samedi matin, la population a commencé à sortir dans les rues en Inde pour pleurer la mort de l'étudiante. La police a indiqué qu'elle tolérerait des manifestations pacifiques uniquement dans certains quartiers et des centaines de policiers ont été déployés pour prévenir tout débordement dans les rues.

Des Indiens se recueillent pour rendre hommage à l'étudiante morte après un viol collectif. | AFP/NARINDER NANU

MANMOHAN SINGH "PROFONDÉMENT ATTRISTÉ"
Le premier ministre, Manmohan Singh, a été le premier à rendre hommage à la jeune femme, dont on ignore le nom, et qui a été surnommée "la fille de l'Inde" ("India's Daughter"), affirmant comprendre la vague de protestations. Son corps devait être rapatrié en Inde samedi, accompagné par ses parents qui se trouvaient à son chevet lorsqu'elle a été déclarée morte.
La jeune femme était une étudiante en kinésithérapie d'origine modeste, venant d'une région rurale de l'Uttar Pradesh, le plus grand Etat de l'Inde situé près de New Dehli. Ses parents, venus la rejoindre à Singapour après son évacuation par vol sanitaire jeudi soir, avaient vendu leur petit lopin de terre pour financer ses études, selon la télévision NDTV. Ces gens décrits comme des "paysans simples" devaient souvent se contenter de très peu pour se nourrir, selon la même chaîne.
L'HORREUR
Le 16 décembre, après avoir vu au cinéma "L'odyssée de Pi", la jeune Indienne et son ami étaient montés dans un bus aux vitres teintées pour rentrer chez eux. Mais là les attendait un cauchemar : une explosion de violences et des viols barbares commis par six hommes ivres. Avant son transfert à l'hôpital de Singapour, la jeune femme avait pu renseigner la police indienne sur ce qui s'était passé : les six hommes ivres s'étaient disputés avec son ami, puis avaient emmené la jeune femme au fond du bus et l'avaient violée tandis que le bus circulait pendant 45 minutes dans New Delhi. Ils l'avaient aussi agressée sexuellement avec une barre de fer rouillée, lui causant de graves blessures aux intestins, avant de la jeter pour morte hors du bus.
Le bus avait rencontré de nombreux points de contrôle de police pendant cette équipée, mais à aucun moment les policiers ne s'étaient inquiétés de ce qui se passait à l'intérieur du véhicule.

Une manifestation pour prendre des mesures de sécurité contre le viol, à New Delhi le 23 octobre. | AFP/Andrew Caballero-Reynolds

TRANSFERT À SINGAPOUR POLÉMIQUE
La décision de transférer la jeune femme à Singapour avait été prise lors d'une réunion mercredi du gouvernement Singh, qui avait promis de prendre en charge tous les frais médicaux. Certains médias ont toutefois allégué que ce transfert était destiné à apaiser l'opinion publique et éviter la réédition des violentes manifestations qui ont ébranlé New Delhi et entraîné la mort d'un policier.
"C'est une décision politique", qui n'a aucun sens, s'est ému Samiran Nundy, chef du service de transplantation d'organes et de chirurgie digestive de l'hôpital Sir Ganga Ram de New Delhi. "Je ne comprends pas comment on peut transférer un patient dans un état critique qui souffre de septicémie avec une forte fièvre et qui est placé sous respiration artificielle", a-t-il dit.
LES VIOLENCES FAITES AUX FEMMES SONT "UN PROBLÈME"
Le premier ministre a reconnu que les violences contre les femmes étaient "un problème" significatif en Inde où près de 90 % des 256 329 crimes violents enregistrés en 2011 ont une ou des femmes pour victime(s), selon les chiffres officiels. Manmohan Singh s'est engagé à mieux protéger les femmes contre les crimes sexuels et a souhaité des peines plus sévères pour leurs auteurs. Il a également ordonné la création d'une commission d'enquête spécialement chargée de cette affaire.

Depuis une semaine, des milliers de personnes protestent en Inde contre le viol collectif d'une étudiante il y a une semaine. | AFP/TENGKU BAHAR
Les photos, noms et adresses des violeurs condamnés seront désormais publiés sur des sites internet de l'administration fédérale. La mesure concernera d'abord New Delhi. Par ailleurs, davantage de femmes officiers seront recrutées par la police de Delhi.
Les viols collectifs sont quotidiens en Inde et beaucoup d'entre eux ne font pas l'objet d'une plainte de la part des victimes, qui ne font pas confiance au système judiciaire poussif et sont découragées par les réactions des policiers hommes.
MCD-APL

vendredi 28 décembre 2012

Grand écart gouvernemental...


Lettre à Jean-Marc Ayrault, membre du collectif Roosevelt

Peu d’associations civiles peuvent s’honorer d’avoir dans leurs pétitionnaires un Premier ministre. Si surprenant que cela puisse paraître, Monsieur le Premier ministre, vous êtes cet homme, et nous, collectif Roosevelt, nous sommes cette heureuse association. Un bonheur n’arrivant jamais seul, Monsieur Arnaud Montebourg, ministre du Redressement productif de la France, vous a également emboîté le pas en rejoignant Roosevelt.

Le propos de cette lettre ouverte est simple : avez-vous seulement lu ce que vous avez signé ? Et si oui, pourquoi ne vous en inspirez-vous pas pour conduire votre politique ?

Le collectif Roosevelt compte plus de 87 000 signataires et son diagnostic de la crise que nous traversons depuis 2008 stipule que celle-ci n’est pas une crise de l’Etat-providence et de la dépense publique, mais une crise du capitalisme dérégulé et de l’effondrement organisé des ressources publiques depuis les années Reagan. En trente ans, ce sont des sommes considérables qui sont parties vers les marchés financiers, au lieu d’aller aux salariés, donc aussi à l’Etat via la TVA. L’Europe risque d’éclater en nouveaux Balkans depuis des mois, précisément parce qu’elle s’épuise à trouver quelques centaines de milliards d’euros pour sauver la Grèce, alors que la fortune cumulée des 0,2 % les plus riches de la planète est estimée à 39 000 milliards d’euros. Inutile de modifier les traités européens pour cela, la Banque centrale européenne (BCE) peut prêter sans limites aux organismes publics de crédit (article 21.3 du statut du système européen des Banques centrales) et aux organisations internationales (article 23 du même statut). Elle peut donc prêter à 0,01 % à la Banque européenne d’investissement (BEI), à la Caisse des dépôts ou à telle ou telle banque publique nationale, qui, elles, peuvent prêter à 0,02 % aux Etats, qui s’endettent pour rembourser leurs vieilles dettes.

Faut-il le rappeler encore, la Réserve fédérale américaine (Fed) a prêté aux banques en difficulté la somme de 1 200 milliards de dollars au taux de 0,01 %, alors qu’au même moment, les mêmes banques prêtaient aux Etats en difficulté à des taux de 6 %, 7 % ou 11 %. «Etre gouverné par l’argent organisé est aussi dangereux que par le crime organisé», affirmait Roosevelt. Lorsqu’il arrive au pouvoir, il y a 14 millions de chômeurs, une production industrielle qui a diminué de 45 %, un désarroi immense de l’Amérique. Il va alors séparer les banques de dépôt et celles d’affaires, créer un impôt fédéral sur les bénéfices, augmenter le taux d’impôt applicable aux citoyens les plus riches en le faisant passer de 25 % à 63 % puis à 79 %, et faire voter quinze réformes structurelles. Autre temps, autres solutions, penserez-vous. Et pourtant, dans un contexte où la dette des Etats-Unis dépasse désormais les 350 % du PIB, où la bulle immobilière de la Chine est inéluctable, où les banques chinoises titrisent leurs mauvaises dettes, où l’investissement militaire chinois a augmenté de 189 % en dix ans, tout est en place pour que les leçons de l’Histoire redeviennent amères.

En France, le gouvernement vient de présenter en Conseil des ministres un projet de loi a minima de séparation des activités bancaires, qui sera à l’agenda parlementaire en février 2013. A l’occasion de sa réforme bancaire en 1936, Franklin Roosevelt déclarait sur Madison Square : «Nous avons dû lutter contre les vieux ennemis de la paix, le monopole industriel et financier, la spéculation, la banque véreuse […]. Ils sont unanimes dans leur haine contre moi. Et leur haine me réjouit.» A l’inverse, Pierre Moscovici, le ministre de l’Economie, soutenait : «Partout je privilégierai le consensus. Mon rôle n’est pas de déstabiliser le secteur dont j’ai la charge.» Privilégier le consensus bancaire sauvera-t-il seulement le compromis social et démocratique ?

L’Alter Summit à Florence, célébrant les 10 ans du premier forum social européen (2002), n’a eu de cesse de rappeler qu’en Allemagne, le recul social imposé aux salariés a été sans précédent depuis dix ans : le premier décile ne gagne que 259 euros par mois, tandis que le second décile ne dépasse pas les 620 euros. Il ne s’agit donc pas, pour nous, d’obtempérer à l’illusoire compétitivité qui s’appuie sur la baisse du coût du travail. On relance le débat sur les 35 heures, mais faut-il rappeler que la réforme «Hartz IV» a conduit à une telle multiplication des petits boulots que la durée moyenne du travail est tombée à moins de 31 heures. Pour la première fois, les Européens sont descendus dans la rue, en France, en Italie, en Espagne, en Grèce, au Portugal, en Allemagne et au Danemark, à l’appel de la Confédération européenne des syndicats pour dénoncer l’austérité et lui opposer des solutions non délétères pour l’Etat de droit social. En France, le bilan social de fin 2012, est terrible : 5 millions d’individus inscrits au chômage, et près de 10 millions de pauvres.

L’Union européenne n’a pas été nobélisée pour avoir créé un espace social hyperconcurrentiel, mais à l’inverse pour avoir inventé une conscience éthique commune par-delà les territorialités qui la composent. A ce sujet, le collectif Roosevelt rappelle la nécessité de créer un impôt européen sur les dividendes pour mettre fin au dumping fiscal européen, boycotter les entreprises ayant des filiales dans les paradis fiscaux, séparer les activités bancaires, mettre en place une taxe Tobin en affrontant une crise clarificatrice avec les pays européens qui refuseraient de le faire, s’inspirer du modèle de démocratie européenne pensé par Joschka Fischer, etc. La bataille intellectuelle doit enfin avoir lieu. Elle augurera l’avènement d’un nouveau destin politique pour la France. L’émergence ne peut être le monopole des seuls pays au modèle social discriminé.

Monsieur le Premier ministre, sachez que nous vous libérons sans souci de la tyrannie de devoir nous faire plaisir en ayant signé. Peut-être faut-il vous offrir, comme tout citoyen consommateur indécis, la possibilité de vous rétracter ou à l’inverse, de signer en pleine compréhension et connaissance de cause ? Vous nous trouverez à vos côtés si la seconde hypothèse est choisie.

CYNTHIA FLEURY Membre fondateur du collectif Roosevelt

 

jeudi 27 décembre 2012

Luttes pour la souveraineté....

En Inde, les multinationales se cramponnent à la vie

BREVETS: Médicaments et semences font l’objet de luttes intenses dans le sous-continent. Avocate et militante du Forum contre les traités de libre-échange, Shalini Bhutani raconte.
Alors qu’une décision cruciale pour l’avenir des médicaments génériques est attendue ces jours en Inde, au sujet d’une plainte en justice de Novartis contre l’Etat, une avocate indienne est venue alerter le public suisse. Shalini Bhutani, militante du Forum contre les traités de libre-échange, a rappelé que la multinationale helvétique s’obstine à exiger la reconnaissance en Inde de son brevet sur le Glivec, un anti-cancéreux. Ceci alors que les autorités indiennes et américaines ont considéré que ce médicament ne représente pas une innovation thérapeutique, mais seulement une modification mineure de la molécule existante. Autrement dit, elle ne peut pas être brevetée. «La loi indienne sur les brevets est assez forte pour préserver les intérêts du pays, mais les juges vont-ils en faire une interprétation honnête?» s’interroge Shalini Bhutani.
Des millions de personnes menacées
L’enjeu de cette affaire est colossal. Car si la Cour suprême indienne donne raison à Novartis, cette jurisprudence mettrait en danger des dizaines de médicaments génériques, notamment des antirétroviraux contre le HIV, qui sont actuellement distribués dans des dizaines de pays. L’Inde est devenue la pharmacie des pays pauvres. Ainsi, plus de 50% des médicaments utilisés pour traiter le sida dans les pays du Sud proviennent d’Inde. C’est donc la vie de millions de personnes qui est en jeu. Ce qui explique l’âpreté de la bataille entre les ONG et les producteurs de génériques d’une part et la firme pharmaceutique d’autre part. Le verdict est attendu début janvier.
Semences privatisées
Novartis n’est pas la seule multinationale suisse sous les feux de la critique. Le géant des biotechnologies Syngenta et des firmes comme Monsanto et Dupont sont régulièrement mis en cause par les organisations paysannes indiennes et leurs relais associatifs. Avec l’aide des autorités indiennes, ces entreprises inondent le marché de semences génétiquement modifiées, souvent stériles, à grand renfort de publicité. Argument choc: elles promettent un rendement très supérieur aux semences classiques.
«Souvent le gouvernement octroie des crédits pour que les paysans puissent acquérir ces produits, qui doivent être rachetés chaque année. Pire, il conditionne l’octroi de prêts aux paysans à l’achat de ces graines!» raconte Shalini Bhutani. Résultat: l’agriculteur se lance dans la monoculture, s’endette et devient dépendant des céréales biotech. Lorsqu’un accident climatique survient, c’est la catastrophe. Car non seulement les espèces achetées résistent moins bien que les traditionnelles, mais la monoculture met les paysans à la merci d’une mauvaise récolte. Seule solution: s’endetter davantage. Jusqu’au jour où la charge financière devient insoutenable. «Obligés de quitter leurs terres, des dizaines de milliers de paysans préfèrent se suicider, parfois en avalant les pesticides fabriqués par ces mêmes agro-industriels», rappelle l’avocate.
Dépendance mortelle
Comble de l’absurde, ces semences sont complètement inutiles selon la militante: «Les paysans s’échangent leurs semences traditionnelles, d’une infinie diversité, depuis des millénaires. Elles procèdent d’une connaissance intime de leurs bienfaits. Malheureusement, depuis la ‘révolution verte’ des années 1960 et 1970 qui a généralisé les monocultures, ces graines et les savoirs qui y sont associés se sont souvent perdus localement.» D’où la dépendance de nombreux fermiers aux marchands de biotechnologie. Alors que les semences traditionnelles sont bien plus favorables pour les paysans: «Elles permettent par exemple de préserver la fertilité des sols et de produire des aliments pour le bétail.» Sans pour autant poser problème en matière de rendement: «L’Inde produit largement assez de nourriture. Le problème n’est pas sa production, c’est sa distribution.»
Savoir traditionnel usurpé
En réalité, la connaissance des graines traditionnelles n’est pas perdue pour tout le monde. Elles sont préservées par des institutions publiques en Inde qui créent de véritables banques de ressources génétiques. Mais elles ne sont pas facilement mises à disposition des petits producteurs. En revanche, les multinationales en bénéficient, assure l’avocate: «Des institutions ce de type, telles que le Centre de recherche agricole international, collaborent avec les firmes de l’agroalimentaire, lesquelles utilisent les données traditionnelles pour créer des semences génétiquement modifiées qu’elles vendront aux paysans.»
Les agriculteurs ne se laissent pas faire. Marches, manifestations, sit-in, pétitions sont organisés chaque semaine en Inde. Mais pour l’instant, semenciers et autorités s’obstinent. «En Suisse, vous avez un moratoire sur les OGM, Pourquoi pas en Inde?» conclut Shalini Bhutani.
Christophe Koessler
Du business alimentaire à la souveraineté
Alors qu’une personne sur huit souffre de malnutrition dans le monde, le système alimentaire se concentre chaque jour un peu plus en mains de firmes transnationales obnubilées par le profit. Aucune fatalité à cela! Deux ouvrages publiés tout récemment par le Centre Europe-Tiers Monde (CETIM) à Genève permettent de nourrir l’espoir d’un changement.
Le premier est la traduction d’un livre de référence publié par la fondation d’origine espagnole GRAIN, Hold-up sur l’alimentation, qui fait le point sur le rôle des multinationales dans la production d’aliments. Didactique, l’ouvrage collectif s’adresse à tous les publics. Semences, agro-industrie, accaparement des terres, de nombreux domaines sont passés successivement en revue à travers des exemples concrets. Objectif de GRAIN: «Restituer le système alimentaire à ceux à qui il appartient: les paysans et les populations.»
C’est également le but poursuivi par le mouvement paysan Via Campesina, auquel le second livre du CETIM, Terre et liberté, consacre son premier chapitre. Au centre de l’argumentation: la souveraineté alimentaire, définie comme «le droit des peuples, des pays ou des groupes de pays à définir leurs politiques agricoles et alimentaires». Une interview pointue de Paul Nicholson, membre éminent de Via Campesina, intéressera ceux qui s’interrogent sur les stratégies à suivre par les ONG et les mouvements sociaux pour parvenir à réaliser cet idéal. Un autre chapitre aborde de manière originale un sujet peu exploré. Celui de l’insertion du commerce équitable dans la transformation globale du système de production. L’auteur, Xavier Montagut, du réseau de consommation solidaire de Barcelone, considère qu’il est illusoire de penser que les pratiques alternatives de commerce équitable vont occuper toujours plus d’espace jusqu’à devenir dominantes. Il les inclut en revanche dans une stratégie citoyenne et politique plus large... A lire.
Commandes: contact@cetim.ch 022 731 59 63

mercredi 26 décembre 2012

Toutes et tous fliquéEs....

Libertés publiques

2013 : comment l’Europe se prépare à espionner ses citoyens

 
Biométrie, vidéosurveillance, drones, détection des comportements anormaux, modèles mathématiques pour identifier des suspects... L’Union européenne finance plus de 190 programmes de recherche sur la sécurité et la surveillance. Au grand bénéfice des industriels, qui recyclent les technologies militaires pour surveiller les populations. Alors qu’un nouveau programme de recherche est en cours de discussion à Bruxelles, l’Europe continuera-t-elle à céder aux lobbys industriels et à investir des milliards dans le marché de la sécurité ?

Ils portent des noms étranges : Tiramisu, Pandora, Lotus, Emphasis, Fidelity, Virtuoso… En apparence, ce sont d’inoffensifs acronymes. En réalité, ils cachent 195 projets européens de recherche dans le domaine de la sécurité et de la surveillance. Des projets relativement inquiétants pour nos libertés. Et financés par l’Europe dans le cadre de partenariats public-privé.
Exemple le plus emblématique : le projet Indect (« Système d’information intelligent soutenant l’observation, la recherche et la détection pour la sécurité des citoyens en milieu urbain »), lancé il y a quatre ans, dénoncé fin octobre par des manifestations dans toute l’Europe. Indect vise à permettre une « détection automatique » des menaces et des situations dangereuses – comme les cambriolages – ou « l’usage d’objets dangereux » – couteaux ou armes à feu. Tout est bon pour combattre « le terrorisme et d’autres activités criminelles comme le trafic d’êtres humains ou la pornographie pédophile ». Et assurer la sécurité des citoyens... Sauf qu’il s’agit aussi avec Indect de détecter « automatiquement » (sic) les comportements suspects, à partir d’images de vidéosurveillance, de données audio ou échangées sur le net. Bienvenue dans Minority Report !
Détecter les comportements « anormaux »
Concrètement, Indect est un système de surveillance, qui, à partir d’images et de sons captés dans l’espace public et d’informations glanées sur Internet, alerterait les services de police en cas de situation jugée dangereuse : des personnes immobiles dans une rue passante, un mouvement de foule, des véhicules qui roulent au ralenti, un appel louche sur un réseau social. Ces critères « d’anormalité » seront définis par les forces de sécurité... Le tout alimentera un moteur de recherche. En plus d’espionner l’espace public, Indect assurera « la surveillance automatique et en continu de ressources publiques, comme les sites web, forums de discussion, réseaux P2P ou systèmes informatiques individuels ». Mais rassurez-vous : des outils pour masquer certaines données privées, comme les visages ou les plaques d’immatriculation sur les images vidéos, sont prévus. Les informations doivent être cryptées avant leur transmission aux services autorisés. Ouf !
Parmi les instituts de recherche qui participent au projet, aux côtés de plusieurs polices et entreprises [1], celui de l’université de Wuppertal en Allemagne est spécialisé en sécurité des transports et en protection civile contre les catastrophes. L’université vante les effets positifs que pourraient avoir ces techniques pour prévenir une situation comme celle de la Love Parade de Duisbourg, en 2010, où 21 personnes sont mortes dans un mouvement de foule.
Dans le cadre d’Indect, il développe des modèles mathématiques pour évaluer, à partir d’images de vidéosurveillance, la vitesse des objets, ou « pour détecter le mouvement dans un domaine dangereux, comme les voies dans une gare », explique le porte-parole de l’université, Johannes Bunsch – le seul officiellement autorisé à parler du projet. Courir pour attraper un train, réagir avec un geste brusque, et vous voilà dans le moteur de recherche auquel se connectent les services de police. « Le système peut très bien détecter une personne nouant ses lacets dans un magasin ou prenant des photos dans un hall d’aéroport, et considérer cela comme un comportement “anormal”. En réalité, le système ne sait pas s’il s’agit d’un comportement indésirable. Il détecte simplement un comportement qui s’écarte des comportements normaux que nous lui avons appris », illustre le professeur Dariu Gavrila (cité par le site Owni) qui, au sein de l’université d’Amsterdam, travaille sur des algorithmes pour détecter les comportements agressifs.
Car le but affirmé d’Indect est bien de lutter contre la criminalité et le terrorisme, non pas d’éviter les carambolages sur les autoroutes ou les mouvements de panique tragiques. Et ce, grâce à l’Union européenne qui finance 75% du projet (15 millions d’euros au total). « Nous ne développons que des procédés techniques, se défend prudemment le porte-parole. La compétence de décider comment utiliser la technologie revient aux politiques ». C’est bien là le problème : qui contrôle ces programmes de recherche et à qui bénéficieront-ils ?
Police et entreprises dans le comité d’éthique
Pour répondre aux critiques, Indect s’est doté d’un comité d’éthique. Sa composition laisse songeur : parmi les neuf membres, on retrouve deux chefs des services de police impliqués et un industriel d’une des entreprises participantes... Son principe semble pour le moins ambigu : « La maxime "si vous n’avez rien fait de mal, alors vous n’avez rien à craindre" n’est valable que si tous les aspects de la justice criminelle fonctionnent parfaitement, dans toutes les occasions. » [2] Faut-il comprendre qu’un citoyen qui tombe par erreur dans les mailles sécuritaires d’Indect n’aura que peu de chance de s’en sortir !? « Les comités d’éthique qui accompagnent les projets comme celui d’Indect sont plutôt des alibis, estime l’eurodéputé allemand Jan Phillip Albrecht (Vert), qui a fait partie du comité d’éthique du projet Addpriv, qui vise à créer des outils pour limiter le stockage de données jugées inutiles et rendre les systèmes de vidéosurveillance « plus compatibles » avec le droit à la vie privée des citoyens.
Indect est loin d’être le seul programme espion généreusement financé par l’UE. Arena [3] vise à créer un système mobile de surveillance, et est subventionné à hauteur de 3 millions d’euros. Subito repère les propriétaires de bagages non identifiés. Samurai signifie « surveillance des comportements suspects et anormaux à l’aide d’un réseau de caméras et de capteurs pour une meilleure connaissance des situations » [4], dans les aéroports et les espaces publics. Il s’agit d’un système de vidéosurveillance avec caméras fixes et mobiles – sur des agents de police en patrouille par exemple –, équipées de capteurs permettant de suivre une personne, de retrouver le propriétaire d’un bagage abandonné ou celui d’un véhicule garé dans un lieu public. Des essais se sont déroulés en 2009 dans l’aéroport londonien d’Heathrow. Bruxelles lui a accordé 2,5 millions d’euros.

L’enveloppe européenne pour ces dispositifs s’élève à 1,4 milliards d’euros sur cinq ans [5]. Cette future surveillance généralisée se décline dans les transports ferroviaires, les aéroports, et sur les mers, avec des projets notamment conçus pour refouler les migrants. Ce programme soulève de nombreuses questions, d’autant qu’il échappe à tout contrôle démocratique et toute objection de la société civile. « Les représentants de la société civile, les parlementaires, tout comme les organisations en charge des libertés civiles et des libertés fondamentales, dont les autorités de protection des données, ont largement été mis de côté », alerte un rapport commandé par le Parlement européen en 2010 [6]. Vive l’Europe des citoyens !
Une politique de surveillance façonnée par les industriels
Pas d’élus ni d’organisations non gouvernementales, mais une omniprésence des grandes entreprises du secteur de la sécurité et de la défense ! En particulier les Français : le groupe aéronautique franco-allemand EADS, et ses filiales Cassidian et Astrium, participent à près de 20 projets différents. Thales France en suit 22 projets et en coordonne cinq. Sagem et Morpho, deux filiales du groupe français Safran, participent à 17 projets, qui incluent la mise au point de drones de surveillance, ou la conception de passeports et de fichiers biométriques. Chacun avec des millions d’euros de subventions. Des recherches qui assureront sans nul doute de nombreux débouchés pour ces technologies sécuritaires, en Europe et au-delà.
Pourquoi une telle présence ? « Ce sont en majorité de grandes sociétés de défense, les mêmes qui ont participé à la définition du Programme de recherche européen en matière de sécurité, qui sont les principaux bénéficiaires des fonds », pointe l’étude du Parlement européen. Plusieurs multinationales – dont, côté français EADS, Thales, ou Sagem [7] – ont étroitement participé à la définition du programme de recherche lui-même. Depuis 2003, leurs représentants et PDG conseillent la Commission européenne sur le sujet, via différents groupes de travail et comités, qui ont pour mission d’établir les priorités de la politique européenne de recherche en sécurité [8]. A se demander qui, des multinationales ou des institutions élues, définit la politique de sécurité européenne ! « Ce qui intéresse les entreprises du secteur, ce n’est pas tant de surveiller les populations que de faire de l’argent », analyse Jean-Claude Vitran, de la Ligue des droits de l’homme.
Recycler les technologies militaires
C’est que le marché européen de la sécurité vaut de l’or. Entre 26 et 36 milliards d’euros. Et 180 000 emplois, selon la Commission européenne, qui estime qu’au cours des dix dernières années, la taille du marché mondial de la sécurité « a quasiment décuplé, passant de quelque 10 milliards d’euros à environ 100 milliards d’euros en 2011. » [9] Mais Bruxelles craint pour la compétitivité des firmes européennes. La solution ? Développer « un véritable marché intérieur des technologies de la sécurité », explique Antonio Tajani, vice-président de la Commission en charge des entreprises. Un marché essentiel pour consolider la position des entreprises du secteur. Pour y parvenir, Bruxelles veut exploiter les synergies « entre la recherche en matière de sécurité (civile) et la recherche dans le domaine de la défense ». Une stratégie duale : les technologies développées à des fins militaires peuvent aussi se vendre sur le marché intérieur de la sécurité civile, pour la surveillance des migrants, des citoyens, des transports et des espaces publics.
« Les industriels de la défense sont conscients que le marché militaire peut s’appliquer à la sécurité civile. Et qu’ils peuvent en faire leurs choux gras », ajoute Jean-Claude Vitran. Les entreprises du secteur profitent des fonds de soutien à la recherche, à tous les niveaux. En plus du volet sécurité du programme de recherche européen, au moins sept pays européens ont lancé depuis des programmes nationaux, dont la France, avec le programme « Concepts, systèmes et outils pour la sécurité globale » de l’Agence nationale de la recherche. Le secteur n’est visiblement pas soumis à l’austérité.
Vers un contrôle plus grand du Parlement ?
Et ce n’est pas terminé ! Ce septième programme-cadre européen prendra fin en 2013. Mais l’industrie de la sécurité n’a pas de souci à se faire. Le budget du prochain programme, Horizon 2020, valable pour la période 2014-2020, devrait augmenter. La commission de la recherche et de l’industrie du Parlement européen a adopté le 28 novembre une première proposition [10]. Le montant global alloué à la recherche dépendra des discussions entre chefs de gouvernement des pays membres. Une chose est sûre : un volet entier sera de nouveau dédié à la sécurité civile, qui devrait recevoir 2,1% du montant global du programme-cadre. Soit 1,6 milliard d’euros. L’industrie de la sécurité dispose d’un allié au cœur du processus législatif européen. L’un des rapporteurs du texte Horizon 2020, le député conservateur allemand Christian Ehler, est président du conseil d’administration de la German european security association (GESA), une organisation lobbyiste qui regroupe des représentants de l’industrie allemande de la sécurité, de la recherche et des politiques.

« 2 % du paquet recherche, c’est beaucoup trop. Si ça n’avait tenu qu’à nous, il n’y aurait pas eu de chapitre « sécurité » dans ce programme, souligne Philippe Lamberts, eurodéputé belge (Vert), autre rapporteur du projet Horizon 2020. Le budget européen de recherche n’est pas énorme. Il faut choisir ses priorités. Il y a d’autres domaines de recherche qui sont plus brûlants pour la sécurité européenne, comme l’indépendance en énergie ou en ressources. »
Les élus verts du Parlement européen ont réussi à introduire des critères d’impact social dans le programme. Tous les appels à projets dans le domaine de la sécurité devront être soumis à une évaluation préalable de leurs conséquences, sur les droits fondamentaux par exemple. « Auparavant, le facteur principal pour choisir les projets, c’était la croissance potentielle de la branche, rappelle le député vert Jan Philipp Albrecht. Il faut des lignes directrices, liées au respect des libertés. Nous avons des restrictions éthiques similaires dans le domaine de la recherche sur les cellules souches. Il faut que soit clairement établi dans quel cadre on a le droit de chercher pour recevoir les fonds européens, et dans quelle limite. » Et surtout permettre aux citoyens de garder le contrôle sur un ensemble de projets qui peuvent remettre sérieusement en cause les libertés publiques. A moins que la « compétitivité » des grands groupes du secteur de la sécurité ne prenne, une fois de plus, le dessus.
Rachel Knaebel
Photo : CC Solo (Une) / CC L’N’Y (caméra) / CC makerbot (Lego) / CC Fotomovimiento

Notes

[1] Douze instituts de recherche, dont l’école d’ingénieur INP de Grenoble – qui n’a pas répondu à notre demande d’informations –, quatre entreprises allemandes et autrichiennes et la police de Pologne et d’Irlande du Nord.
[2] Lire ici.
[3] Architecture for the Recognition of threats to mobile assets using Networks of multiple Affordable sensors, Arena.
[4] Suspicious and abnormal behaviour monitoring using a network of cameras and sensors for situation awareness enhancement
[5] Le programme cadre européen dispose d’un budget de 51 milliards d’euros attribués à la recherche pour la période 2007-2013, dont 1,4 milliards pour le volet « Sécurité ».
[6] A télécharger ici.
[7] Mais aussi BAE Systems, Ericsson, Saab, Siemens…
[8] Le « Groupe de personnalités » (GoP) en 2003, puis le Comité de conseil de la recherche européenne en sécurité (European Security Research Advisory Board, Esrab) en 2005. En 2007, un troisième comité est créé pour accompagner cette fois le 7ème programme cadre de recherche – le Forum européen pour la recherche et l’innovation en sécurité (Esrif).
[9] Lire leur communiqué.
[10] Sur la base d’un premier projet de la Commission. Le texte sera voté en plénière au Parlement européen dans le courant de l’année 2013.

dimanche 23 décembre 2012

Saint Julien en Quint : AG de Coop'aire de Jeux...



Assemblée générale de la Coop'aire de jeux
Bonjour à tous,
le CAC (entendez Conseil d'Administration Collégial) de la Coop'aire de jeux vous invite à son ...
Assemblée générale qui aura lieu
le lundi 14 janvier 2013à 20H30
à Saint-Etienne-en-Quint
(siège social)
Au programme des réjouissances :
- présentation et vote des rapports moral et financier
- élection du CAC (Conseil d'Administration Collégial)
Un apéritif sera offert ensuite.
Et pour ceux qui le souhaitent, la soirée se poursuivra avec un repas partagé avec ce que chacun amène ...
et bien sûr du JEU !!!
Joyeuses fêtes de fin d'année et n'oubliez pas de jouer !
Le CAC de Coop'aire de jeux
coopaire@gmail.com

Alice Daguze se bat pour de nobles causes...

LVDP Alice Daguze Greenpeace - Vidéo Dailymotion
 Vidéo Dailymotion
« La voie du peuple »

Pourquoi je me suis introduite dans une centrale nucléaire

Par Rédaction (31 octobre 2012)
Ils sont neuf militants écologistes à avoir osé s’infiltrer dans le périmètre de la centrale nucléaire de Nogent-sur-Seine en décembre dernier pour démontrer les lacunes dans la sécurité. La justice vient de les condamner à 6 mois de prison avec sursis. Malgré cette décision, leur motivation ne faiblit pas. Infirmière et membre de Greenpeace, Alice Daguzé explique pourquoi elle a voulu participer à cette action coup de poing.
Alice Daguzé est infirmière et militante de Greenpeace. Elle fait partie des neuf militants de l’association qui se sont introduits dans la centrale nucléaire de Nogent-sur-Seine (Aube) le 5 décembre dernier. Elle raconte les raisons de son engagement dans le cadre du webdocumentaire « La Voie du peuple », qui propose « un coup de projecteur sur des citoyens qui agissent ».

Le 11 octobre, la cour d’appel de Reims condamne ces neuf militants à 6 mois de prison avec sursis. Et à 800 € d’amende pour les quatre militants ayant refusé le prélèvement ADN.
Les réactions d’Alice pendant ce procès en appel :

Retrouvez les autres témoignages sur le site de La voie du peuple.

Cadeau...

http://www.facebook.com/video/video.php?v=3458985572202


samedi 22 décembre 2012

Recoubeau : Véro et Freddy Desveronnières vendent leur maison...



VENTE MAISON VéRO et FREDDY
Bonjour à tous !
Dans les séries "y'a d'la vie, y'a d'la joie, y'a du mouvement", ça y'est c'est parti pour nous pour une envolée, qui va rester dioise dans un espace plus petit !
 Notre maison est donc en vente, les amis sont les premiers avertis, dans une semaine nous lancerons les informations de façon plus large sur le bon coin.fr...
VENTE MAISON à RECOUBEAU
A 12 km de Die, à Recoubeau-Jansac, au quartier de la gare,
belle maison de village, très agréable à vivre,
au calme avec un terrain (constructible) de 2 400 m².
Maison de 140 m², parfaitement habitable sans travaux.
Deux niveaux :
Rez de chaussée : cuisine + salle à manger + salon + salle de bain
(Douche et WC)
1er Etage : 4 chambres (dont une avec un bureau) + salle de bain
(Baignoire et WC)
Très grand garage offrant des possibilités d’aménagement
(Une 5ème chambre déjà réalisée).
Chauffage poêle à bois + chaudière au fuel.
Bonne isolation générale ; Toutes les fenêtres en double vitrage.
Grande terrasse abritée côté jardin (Est).
Exposition soleil sur façade Est le matin puis sur façade Ouest l’aprèsmidi.
Prix : 205 000 euros (pas de frais d’agence)
Contact : Freddy DESVERONNIERES 06 89 35 63 56
Toutes les infos sont dans la PJ.
Merci à vous de faire circuler si vous avez des "pôttt-entiellement" intéressés !
Allez La Biz...
Véro et Freddy
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