Information Participative

Médias Citoyens Diois continu !

Retrouvez-nous sur notre nouveau site :

http://mediascitoyens-diois.info

mercredi 9 décembre 2009

Crise de la presse papier

«L’imprimé aura toujours son rôle à jouer, mais il sera déclinant»
Interview
Jonathan Wells, directeur de la publication du «Christian Science Monitor», qui est passé au tout Internet :
Pour le petit monde des faiseurs de journaux, cela reste l’une des sensations de l’année : depuis avril, le Christian Science Monitor (CSM) a abandonné son édition quotidienne imprimée pour se consacrer à l’information en ligne gratuite, ainsi qu’au lancement d’un hebdomadaire papier payant. Le grand quotidien de Boston, lancé en 1908 par la fondatrice de l’Eglise de la science du Christ, n’a rien à voir avec la religion, il est au contraire réputé pour sa couverture de l’actualité internationale. Mais il était en train de mourir : de 200 000 dans les années 70, son tirage était tombé à 52 000 en 2008, et seul le soutien de l’Eglise assurait encore sa survie. Six mois plus tard, le CSM reste le seul quotidien national américain à avoir risqué le grand plongeon dans Internet. Mais ses dirigeants se disent plutôt confortés par l’expérience, qui a entraîné une réduction des effectifs d’un total de 130 salariés à une centaine aujourd’hui. Jonathan Wells, directeur de la publication du Christian Science Monitor, s’en explique.
Quels sont les résultats de votre nouvelle stratégie ? Vous en étiez à 19 millions de dollars [13 millions d’euros] de pertes en 2008, qu’en sera-t-il en 2009 ?
Cette année, nous réduirons nos pertes d’environ 1 million de dollars. Nous avons bien sûr réduit nos coûts d’impression et de distribution, mais nous avons aussi perdu des recettes. L’abonnement à notre hebdomadaire papier ne coûte que 89 dollars, contre 210 dollars pour le quotidien. La bonne nouvelle est que nous avons réussi à garder la plupart de nos abonnés : près de 90% nous ont suivis vers la formule hebdomadaire.
Un million d’économies, ce n’est pas époustouflant… Le passage à Internet serait-il plus laborieux que prévu ?
Ce n’est que le début de la partie. Notre stratégie est conçue sur quatre ou cinq ans. Actuellement, l’essentiel de nos revenus provient encore des abonnements à l’édition imprimée (4 millions de dollars cette année, contre 1 million pour le Web). Mais cette proportion devrait s’inverser dans les années à venir. Les revenus de l’imprimé n’augmentent que lentement, tandis que nous nous préparons à une forte croissance du Web. D’ici quatre ans, l’imprimé devrait rapporter 5 millions de dollars et le Web 6 millions.
Pour vous, Internet est donc bien l’avenir de la presse écrite ?
L’imprimé aura toujours son rôle à jouer, mais il sera déclinant. Il sera difficile de conquérir de nouveaux lecteurs avec l’imprimé et d’y gagner beaucoup d’argent. Selon nous, le potentiel est sur le Web. C’est pour s’y préparer que nous y avons consacré nos ressources rédactionnelles. Nous avons conservé huit bureaux de correspondants aux Etats-Unis et huit à l’étranger. C’est d’autant plus important que beaucoup d’autres journaux ont réduit leurs bureaux de correspondants, qui coûtent cher.
Quelle est votre progression sur le Web ?
Le lectorat a progressé de près de 35% ces six derniers mois, avec près de 8 millions de pages vues par mois. Le seul point où nous sommes en retard sur nos prévisions, ce sont les rentrées publicitaires en ligne. Nous avions prévu de développer trois nouvelles thématiques : argent, environnement et innovation, pensant attirer les annonceurs, mais les pubs ne rentrent pas aussi vite que prévu.
Pour attirer plus de visiteurs en ligne, la tentation n’est-elle pas forte de choisir des sujets accrocheurs, au risque d’écorner votre réputation ?
C’est un débat quotidien. Nous passons beaucoup de temps à étudier ce que les gens recherchent en ligne. Nous tâchons aussi de rédiger nos titres de sorte qu’ils soient facilement trouvés par les moteurs de recherche. Mais nous devons être prudents pour maintenir la qualité de notre site, afin que les lecteurs y reviennent et visitent plus de rubriques. Nous devons faire du journalisme en ligne qui soit rapide, intéressant, mais sans sacrifier nos standards et valeurs. Cela demande une vigilance de chaque instant.
Pourquoi n’avez-vous pas voulu rendre votre site internet payant ?
Nous pensons qu’il faut être très spécialisé pour le faire. Les lecteurs sont prêts à payer pour des informations financières ou économiques. Le type d’informations que nous produisons est unique, mais pas suffisamment pour que les lecteurs soient prêts à les payer directement. Notre stratégie est d’étendre notre public, et de ne surtout pas mettre de barrières pour y parvenir.
Vous proposez un abonnement à un service d’information par mail, ça marche bien ?
Oui, nous proposons une sélection quotidienne de quatre sujets clés, avec une analyse expliquant en quoi ils sont importants. C’est une façon rapide de s’informer et d’avoir une perspective sur l’actualité. Pour nous, c’est aussi une façon de découvrir quelles sortes de services en ligne les lecteurs seraient prêts à payer.
Avez-vous fait des émules ?
Beaucoup de journaux d’Europe, d’Asie ou d’Amérique sont venus nous consulter. Ils sont confrontés au même problème : les coûts de production d’information de qualité dépassent les revenus. Certains ont tout simplement fermé. D’autres hésitent à passer en ligne, car ils ont un plus grand nombre d’abonnés qu’ils ne veulent pas perdre. Il est parfois plus difficile pour une grosse structure de changer. Mais je pense que de plus en plus de journaux vont se restructurer autour de leur site internet.
LORRAINE MILLOT (en photo), correspondante de Libération
http://www.liberation.fr/medias/0101601282-l-imprime-aura-toujours-son-role-a-jouer-mais-il-sera-declinant

Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire