Information Participative

Médias Citoyens Diois continu !

Retrouvez-nous sur notre nouveau site :

http://mediascitoyens-diois.info

dimanche 12 mai 2013

L' occasion de réoxigèner la Démocratie...



Un normal pour un bien
On dit de la démocratie qu’elle est un régime politique des peuples adultes, parce que ce sont eux, et non pas des autorités de droit divin ou des despotes invoquant des vérités politiques indiscutables, qui se donnent leurs propres lois. Mais à l’origine de l’idée démocratique, il y a un idéal encore plus ambitieux, jadis formulé par Rousseau. Chaque individu, en obéissant aux lois, ne fait rien d’autre qu’obéir à lui-même.
La puissance de la démocratie est précisément cet idéal inatteignable d’un consensus absolu. Tant qu’il y a aura des individus insatisfaits, la démocratie ne sera pas achevée. Tout en étant impossible, cet idéal fonctionne comme moteur des transformations incessantes : cet idéal modifie les formes d’exercice du pouvoir, depuis le vote universel, l’apparition des cours constitutionnelles qui surveillent le législateur lui-même, jusqu’à la crise actuelle de la démocratie représentative au profit d’une autre, dite réelle.
Ce modèle explique aussi que le gouvernement démocratique, qui est l’exécuteur de la volonté du peuple, ne puisse agir qu’en faisant des compromis et en cherchant les plus larges consensus. L’espérance, l’utopie, les changements spectaculaires ne sauraient venir du gouvernement mais de la société qui le désigne. C’est à elle qu’incombe la tâche de produire des idées et des orientations politiques nouvelles. A elle aussi de se donner des moyens pour créer des rapports de force susceptibles de les mettre en marche. Attendre l’homme providentiel qui viendra changer la réalité politique est un espoir des peuples immatures. Et il n’y a rien de plus dangereux qu’un peuple d’enfants qui espère qu’un gouvernement, tel un papa, agisse en super-héros. Cela a produit les pires crimes et continue de hanter les populismes actuels, de Marine Le Pen à Jean-Luc Mélenchon sans oublier l’affreux Nicolas Sarkozy.
Le mécontentement que suscite Hollande tient au fait qu’il démystifie le pouvoir présidentiel. Ce qui enrage, c’est qu’il soit le président le plus démocratique de la Ve République. On interprète sa passivité, son impassibilité, comme si cet homme manquait de quelque chose pour gouverner. Et si c’était le contraire ? Peut-être ses attitudes à la Kung Fu Panda sont-elles chez lui une passion, comme l’hystérie autoritaire et paternaliste l’était pour Sarkozy. En agissant de la sorte, Hollande désigne au peuple ce dont celui-ci est capable. Il lui montre sa propre mollesse, son absence d’imagination et de courage, son indifférence et son obéissance au regard d’un ordre politique injuste pour le plus grand nombre. Comme si sa prétendue absence de charisme nous tendait un miroir horrifiant. Comme s’il disait aux Français : «Voyez ce que vous êtes, voyez ce que vous voulez.»
La colère qu’il suscite vient précisément de cela.
Car le peuple refuse de voir à quel point il est passif, obéissant, conservateur. Les critiques adressées à Hollande sont une manière de refuser cette image qu’il nous renvoie de nous-mêmes. On aimerait qu’il crie, qu’il s’énerve, qu’il gesticule, qu’il insulte, qu’il menace. On aimerait que Hollande nous trompe pour qu’il nous libère de la charge de penser, d’agir, d’inventer, de nous révolter. On aimerait que le Président nous fasse peur et qu’il nous fasse jouir pour nous distraire, pour que nous oubliions tout ce que nous devrions faire pour vivre dans une société moins injuste et plus joyeuse.
C’est pourquoi, au lieu de nous agacer contre lui, il faudrait que nous profitions de ce quinquennat comme d’un moment de la plus haute spiritualité démocratique. Il faudrait le considérer comme ce temps sublime où le peuple a pu, grâce à son président, contempler sa propre petitesse, sa passivité et son endormissement.
Après tant de décennies de culte à l’autorité, de toutes les autorités - familiales, scolaires, policières, gouvernementales -, Hollande incarne une véritable rupture qui n’a rien d’accidentel ni de banal.
Peut-être les Français utiliseront-ils cette période pour se rebeller, pour opérer le passage tant espéré d’une démocratie représentative à une autre, réelle, comme le souhaitent aujourd’hui les peuples opprimés de la terre. Peut-être cette nouvelle pratique de l’autorité présidentielle les aidera-t-elle non seulement à agir au lieu d’espérer, mais aussi à mettre en question toutes les autorités ridicules et antidémocratiques qu’on les a habitués à chérir depuis trois décennies. Cette mise en cause semble indispensable pour qu’apparaisse en France un nouvel esprit de révolte des masses. Pour que de jeunes pensées jaillissent et qu’elles se substituent à la mélancolie des paradis infernaux du passé.
Car à quoi ce culte de l’autorité a-t-il servi, sinon à créer un peuple obéissant qui met son intelligence et son imagination de côté pour s’asservir à un ordre de plus en plus injuste pour les majorités ? Peut-être François Hollande sera-t-il l’homme providentiel dont la fonction dans l’histoire de la France sera de la débarrasser une fois pour toutes de l’idée de providence.
Marcela Iacub (photo)

Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire