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mercredi 23 novembre 2011

L' eau est un bien public partagé...et un droit fondamental...

Danielle Mitterrand, itinéraire d'une femme engagée

«Ce n’est pas aux entreprises de définir la politique de l’eau»
Danielle Mitterrand salue le texte de l’ONU pour un accès à un élément vital :
Après quinze ans de débats, 122 Etats de l’ONU ont voté en faveur d’une résolution de la Bolivie qui reconnaît l’accès à l’eau potable comme un droit humain. Une étape importante, pour Danielle Mitterrand, 85 ans, présidente de la fondation France Libertés, qui a fait de l’eau un axe majeur de son action.
Que représente cette résolution de l’ONU ?
C’est un premier pas politique important. Cela devrait permettre de faire avancer l’application de ce droit. Cette victoire est à mettre au crédit de la Bolivie qui a porté ce sujet aux Nations unies, mais qui l’a surtout inscrit dans sa propre Constitution. A deux ans du prochain Forum mondial de l’eau à Marseille en 2012, nous allons œuvrer pour que cette résolution ne reste pas lettre morte.
Vous êtes pourtant souvent critique avec le Forum mondial de l’eau…
Le problème, c’est que c’est un club de business - ce qui n’est pas illégitime en soi -, qui se présente comme une autorité de la gestion de l’eau dans le monde qui travaillerait dans le sens de l’intérêt général. C’est tromper l’opinion. Ces réunions sont une foire, c’est un marché. Le Conseil mondial de l’eau est présidé par le PDG de la société des eaux de Marseille, une filiale de Veolia. Nous, quand on dit «l’eau pour tous»,c’est bien pour tous. Eux, c’est l’eau pour tous ceux qui peuvent payer. Quand ils parlent d’humanité, ils parlent de consommateurs. Quand ils parlent d’individus, ils parlent d’usagers.
En juin, Nicolas Sarkozy a annoncé que la France se battrait pour un droit universel à l’eau. Une bonne chose ?
Mais qu’est-ce que ça veut dire ? Si c’est pour privatiser la gestion de l’eau… Entre ce qui est dit et ce qui est fait, on est à des années-lumière. On me dit souvent que je suis contre les entreprises, mais pas du tout. Elles sont nécessaires, mais il faut qu’elles se cantonnent à leurs missions : être des plombiers. Qu’ils fassent bien leur travail de maintenance, de raccordement, qu’on les paie pour leurs prestations, un point, c’est tout. Ce n’est pas à ces entreprises de définir la politique de l’eau dans les Etats.
Qu’est ce que le droit universel à l’eau ?
D’abord, c’est reconnaître que l’eau n’est pas une marchandise, que c’est un bien constitutif de la vie. Qu’elle doit être rendue à la nature dans un état suffisant pour que les générations à venir puissent en user sans risque. Elle doit pouvoir être gérée par les pouvoirs publics qui ont le sens de l’intérêt général, avec une grande vigilance démocratique. Il faut que les Etats inscrivent dans leur Constitution que l’accès à l’eau est un droit de l’homme contraignant et qu’ils sont tenus de le respecter.
Pourquoi ce droit ne progresse pas ?
Par manque de volonté politique. Il faut aller au-delà des intentions. En 1992, au sommet de Rio, on avait déclaré que l’eau serait accessible à tous en l’an 2000. Cela ne s’est pas fait, faute de volonté politique, des nations et de la communauté des nations.
Il faudrait une autorité supranationale ?
C’est ce qu’on propose depuis deux ans. Une haute autorité mondiale. L’eau, pour la Terre, c’est l’équivalent du système sanguin pour l’homme. Vous arrêtez une artère, le membre meurt. En construisant un barrage, en conditionnant l’accès à l’eau, les grandes entreprises disposent des vies de millions de personnes entre leurs mains. Pourquoi la Chine ne quittera-t-elle jamais le Tibet ? Parce que la province recèle les sources des fleuves qui alimentent l’Inde et la Chine. On ne peut pas résoudre le problème de l’eau derrière les frontières. Il faudrait imaginer pour l’élément vital de la planète un droit international différent, avec un traitement politique innovant. On réunirait des sages, la société civile, les entreprises et les politiques…
Les Etats seront-ils prêts à abandonner leur souveraineté sur l’eau ?
Justement pas, c’est notre combat de les convaincre. C’est le sens de notre campagne des porteurs d’eau : sensibiliser les citoyens pour que l’eau remonte du grand public.
C’est quoi une bonne gouvernance de l’eau ?
Si l’eau n’a pas de prix, le service, lui, a un coût. Une bonne gouvernance impose à ce service que la quantité d’eau nécessaire soit gratuite pour pouvoir vivre dignement. L’Organisation mondiale de la santé a fixé cette quantité à 40 litres par jour et par personne. Il faut que chacun, riche ou pauvre, puisse avoir cet accès universel.
En France, vous militez pour une remunicipalisation de la gestion de l’eau.
C’est un mouvement qui progresse. On a démarré avec une petite municipalité, dans le Var. L’important, c’est que l’opinion sache comment est gérée son eau. Aujourd’hui, on ouvre le robinet, on ne sait plus d’où vient l’eau et où elle va. On a perdu le lien.
Pensez-vous que l’eau deviendra un enjeu politique, lors des prochaines échéances électorales ?
Je l’espère, il le faut. Un jour, ça sera tellement évident que ceux qui nous dirigent ne pourront plus passer à côté. Tous les grands mouvements sont partis d’un petit groupe qui a convaincu le plus grand nombre. Le pouvoir, c’est le citoyen qui l’a, mais on ne l’utilise pas.
(Photo : Richard Dumas)
LAURE NOUALHAT ( 2 AOUT 2010)
Nota : 884 millions de personnes dans le monde n’ont pas accès à une eau potable de qualité et plus de 2,6 milliards ne disposent pas d’installations sanitaires de base.

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