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samedi 6 juillet 2013

Bétonnage et goudronnage sont les deux mamelles de la France...



La remise en cause d'un pouvoir centralisé et du bétonnage des terres agricoles
Vraie bombe pour les nombreuses collectivités territoriales qui attendent de voir se réaliser leurs projets d'infrastructures de transports, le rapport remis par Philippe Duron au gouvernement, jeudi 27 juin, est une aubaine pour ceux qui s'opposent au bétonnage du territoire. Le député socialiste du Calvados préconise la fin du "tout-TGV" et du "tout-autoroutes", et propose notamment le report (l'abandon ?) de nombreux projets de lignes à grande vitesse, comme Bordeaux-Hendaye, ou de tronçons d'autoroutes, tel l'A51 entre Gap et Grenoble, contestés localement.
L'étau se resserre autour des finances des collectivités locales
Cette proposition de révision des schémas de transports, dont le premier ministre Jean-Marc Ayrault a dit qu'il partageait "le diagnostic précis", suffira-t-elle à calmer la contestation des collectifs locaux formés contre ces projets qu'ils jugent inutiles, voire néfastes ? Pour quelques-uns d'entre eux peut-être, mais la fronde ne concerne pas uniquement les grandes infrastructures de transports.
Centres commerciaux, équipements sportifs, centrales à gaz, projets d'exploitation de gaz de schiste, déchetteries géantes : les batailles se mènent contre les projets les plus "modestes", comme le golf gardois de Saint-Hilaire-de-Brethmas, jusqu'aux plus ambitieux, tel l'aéroport de Notre-Dame-des-Landes (Loire-Atlantique). Parfois avec pour seule préoccupation de s'opposer à la dégradation de son environnement personnel – à l'image du mouvement Nimby ( Not in my Backyard – "Pas dans mon arrière-cour" !) présent dans d'autres pays –, mais le plus souvent pour défendre une autre idée de l'intérêt collectif, du développement économique et de l'utilisation des fonds publics.
Quand des dizaines de milliers de personnes se rassemblent dans le bocage nantais pour dire non à Notre-Dame-des-Landes (NDDL), le message va au-delà de l'opposition à ce seul projet. La création de ZAD – zones d'aménagement différé, rebaptisée "zones à défendre" par les occupants de NDDL – est devenue le signe commun de ces révoltes. Militants écologistes, altermondialistes, libertaires, syndicalistes paysans ou enseignants, novices de la contestation ou vétérans du Larzac des années 1970 : ils défendent le maintien d'espaces agricoles et contestent les modes de décision d'un pouvoir jugé trop centralisé.
ZÈLE DES ÉLUS
Soixante mille hectares de terres agricoles disparaissent chaque année. Soit, au bout de sept ans, l'équivalent de la superficie moyenne d'un département. Cette réalité forme le terreau des contestations attisées par le zèle d'élus qui, mis en concurrence par la multiplication des niveaux de gouvernance, rivalisent de projets "marqueurs de leur territoire".
Comment garder la maîtrise de son environnement ? Les occupations pour empêcher une quatre-voies ou l'extraction de gaz de schiste sont devenues une façon de se faire entendre et ouvrent la perspective d'une possible victoire contre les pouvoirs publics. "Beaucoup se retrouvent impuissants face à la perte de leur emploi décidée ailleurs, alors que dans ces luttes, ils savent pouvoir gagner, car ils sont là, ils occupent le terrain", estime José Bové, député européen Europe Ecologie-Les Verts et figure des luttes du Larzac.
Nota : Les 8 hectares gelés pour accueillir des entreprises dans le Diois (Zone de Cocause gérée par la Communauté des Communes du Diois) ne rentre pas dans ce cadre. Cette zone co-construite depuis des années avec la plus grande concertation n'a pas provoqué de mobilisation locale, hormis quelques jeunes désinformés par une association extérieure: la CEN de Cornas (07). 
Les limites décriées des enquêtes publiques
La multiplication des mouvements de protestation à travers la France contre les projets d'aménagement est le signe d'un malaise croissant à l'égard des mécanismes de décision collective. Le principal d'entre eux est l'enquête d'utilité publique. Son principe, introduit en 1834 pour consulter les propriétaires visés par une procédure d'expulsion, a été profondément réformé en 1983 par Huguette Bouchardeau, alors ministre de l'environnement.
Mais, observe Jean-Michel Fourniau, chercheur à l'Institut français des sciences et des technologies des transports, de l'aménagement et des réseaux (IFSTTAR), "le problème est que l'enquête intervient en fin de processus, quand la décision est prise". De surcroît, souligne Françoise Verchère, conseillère générale (Parti de gauche) de Loire-Atlantique, "l'administration organise souvent un "saucissonnage" des enquêtes publiques, afin d'empêcher une vision globale du projet". Il arrive aussi que les données communiquées lors de l'enquête se révèlent a posteriori fallacieuses, ce qui signifie que le public a été trompé.
"DÉFIANCE"
Les limites de l'enquête d'utilité publique ont été perçues depuis près de vingt ans. Cela a conduit à la mise en place de la procédure de débat public par la loi Barnier de 1995, qui créait une commission nationale du débat public (CNDP) sur des grandes infrastructures. Elle a organisé environ 70 débats, selon trois grands principes : la transparence de l'information, la nécessité d'un débat argumenté, la représentation équitable des différents acteurs. Cela a pu faire annuler des projets (comme l'autoroute A 32 entre Metz et Nancy) ou les modifier (enterrement de lignes à très haute tension). "L'intérêt du débat public est qu'en principe on discute de l'intérêt du projet tôt dans le processus de décision, dit Loïc Blondiaux, chercheur en science politique à l'université Paris-I. Mais, en pratique, cela ne se fait pas, le projet est souvent décidé en amont, surtout pour le nucléaire."
Ainsi, un débat public avait eu lieu en 2006 sur les déchets nucléaires, concluant à la nécessité de stocker les déchets en surface ou proche de la surface. Le choix avait été balayé par les parlementaires dans la loi de juin 2006, imposant celui de l'enfouissement en profondeur. "On avait été bafoués, dit Michel Marie, du Collectif contre l'enfouissement des déchets radioactifs (Cedra), comment croire ensuite au débat ?" C'est que, observe Christian Leyrit, président de la CNDP, "l'articulation entre démocratie participative et démocratie représentative reste compliquée".
Au-delà des procédures, dit M. Leyrit, "il s'est développé une défiance des citoyens envers les institutions et l'Etat". "La confiance dans l'utilité alléguée des projets est devenue très mesurée", observe Loïc Blondiaux. Pour Françoise Verchère, "les citoyens découvrent assez vite que nombre de projets ne sont pas réellement d'utilité publique, alors que, par exemple, la création d'écoles est toujours bien acceptée, parce que l'utilité ne fait pas de doute."
Et puis, plus largement, des divergences de fond existent souvent entre les promoteurs des projets et leurs contradicteurs : "Le changement climatique est un bon exemple, dit Jean-Michel Fourniau, soit on tire la conséquence du fait que la crise climatique est d'origine anthropique, soit on le conteste. A un moment, on ne peut plus discuter. Le projet local n'est plus le coeur du sujet. Faire un aéroport à Notre-Dame-des-Landes, c'est favoriser un mode de développement."
Y a-t-il des remèdes à cette crise de la décision ? Sans doute : les méthodes de conférence de citoyens ou d'assemblée citoyenne ont fait leurs preuves. Mais il y faut un ingrédient indispensable : le désir des responsables d'entendre les citoyens.
Hervé Kempf

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