«Aung San Suu Kyi est le symbole du courage»
Un fauteuil vide en Afrique du Sud, des «flashmobs» en Grande-Bretagne, des bougies à Bangkok: des militants ont tenu à marquer à travers le monde le 65e anniversaire de l'opposante birmane Aung San Suu Kyi. La prix Nobel de la paix est en résidence surveillée à Rangoun.
La dissidente la plus célèbre du globe est au cœur de petites manifestations un peu partout. Ses proches organiseront une petite fête en son honneur aujourd'hui, jour de ses 65 ans. Mais la «Dame» de Rangoun, détenue pendant 15 des 21 dernières années, ne pourra pas quitter sa demeure familiale délabrée. Vingt mille arbres devaient aussi être plantés dans le pays pour honorer le combat de cette femme fine à la voix douce. Jeudi à Bangkok, des opposants en exil soufflaient des bougies en son honneur. Hier, des militants ont manifesté à Hong Kong devant le consulat général de Birmanie, ainsi qu'à Manille.
Hier, des rassemblements seront organisés à Washington et à Londres. Ailleurs en Grande-Bretagne, les militants promettent des «flashmobs» (rassemblement-éclairs) avec des masques de la dissidente. «Tant qu'elle est en Birmanie et en vie, elle restera une menace pour le pouvoir militaire», estime David Mathieson, de l'organisation américaine Human Rights Watch.
«Aung San Suu Kyi est le symbole mondial du courage face à la répression», a estimé Jimmy Carter dans un communiqué du groupe de sages des «Elders» (les Anciens), fondé par l'ex-opposant puis chef d'Etat sud-africain Nelson Mandela. Une chaise drapée de soie est restée vide lors d'une réunion du groupe jeudi, symbolisant l'absence de la dissidente.
Mais le parti de l'ennemie intime du généralissime Than Shwe, homme fort du régime militaire, est aujourd'hui moribond. La Ligue nationale pour la démocratie (LND), vainqueur des législatives de 1990 mais écartée du pouvoir, a été dissoute par la junte en mai. La LND avait décidé de boycotter le prochain scrutin, prévu d'ici la fin de l'année.
En mai 2009, Aung San Suu Kyi attendait sa libération lorsqu'un illuminé américain s'est introduit à la nage à son domicile, situé sur les rives d'un lac. En août, elle écopait de 18 mois supplémentaires de résidence surveillée, ne devenant libérable qu'en fin d'année. «Ils peuvent constamment trouver des raisons de prolonger sa résidence surveillée», redoute pourtant David Mathieson. «Ils ne la libéreront que quand ils sauront qu'ils peuvent la contenir.»
Apis
Se libérer de la peur
" Ce n'est pas le pouvoir qui corrompt, mais la peur : la peur de perdre le pouvoir pour ceux qui l'exercent, et la peur des matraques pour ceux que le pouvoir opprime... Dans sa forme la plus insidieuse, la peur prend le masque du bon sens, voire de la sagesse, en condamnant comme insensés, imprudents, inefficaces ou inutiles les petits gestes quotidiens de courage qui aident à préserver respect de soi et dignité humaine. Un peuple assujetti à une loi de fer et conditionné par la crainte a bien du mal à se libérer des souillures débilitantes de la peur. Mais aucune machinerie d’État, fût-elle la plus écrasante, ne peut empêcher le courage de resurgir encore et toujours, car la peur n'est pas l'état naturel de l'homme civilisé. "
A.S.S.K
Depuis 1988, en Birmanie, Aung San Suu Kyi affronte avec le plus grand courage et par une lutte non-violente, l'une des pires dictatures de la planète. Assignée à résidence en juillet 1989, elle fut condamnée à un silence et à un isolement complets, malgré l'écrasante victoire aux élections de Mai 1990 du Parti démocratique qu'elle a fondé.
Née en 1945, diplômée d'Oxford en philosophie, sciences politiques et sciences économiques, elle a reçu en 1990 le Prix Thorolf Rafto pour la défense des Droits de l'homme décerné par la Norvège et le Prix Sakharov pour la liberté de pensée décerné par le Parlement européen.
En 1991, le Prix Nobel de la Paix a fait connaître son combat au monde entier.
Se libérer de la peur rassemble les textes et discours politiques d'Aung San Suu Kyi durant la période où elle a pris la tête du mouvement démocratique birman, entre Août 1988 et Juillet 1989.
Quatre essais, plus anciens, les précèdent : une biographie de son père, Aung San, héros de l'Indépendance birmane, une présentation historique de son pays, et deux études sur l'histoire intellectuelle de la Birmanie.
La dernière partie est consacrée à la vie d'Aung San Suu Kyi. Deux de ses amies, Ma Than E et Ann Paternak Slater, témoignent de son précoce éveil politique. Deux spécialistes de la Birmanie, Joseph Silverstein et Philip Kreager, expliquent son immense contribution à la lutte non-violente de son peuple.
Michael Aris, mari d'Aung San Suu Kyi, a réuni et présenté les textes qui composent ce recueil. Professeur permanent au St Antony’s College d'Oxford, et professeur associé au département des Etudes tibétaines et himalayennes de l'Université de Harvard (USA). Il est mort en 1999.
La publication en France de Se libérer de la peur est un geste de solidarité qui vise à intensifier la mobilisation internationale pour obtenir la libération de Aung San Suu Kyi.
Aung San Suu Kyi
Prix Nobel de la Paix 1991
Préfaces de François Mitterrand et Vaclav Havel
Traduit de l’anglais par et Thérèse Réveillé
220 p. - 14,50 €
1991 - réédition 2004
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