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mercredi 5 janvier 2011

L' humanisme est il écologique ?


L’humanisme est il écologiste ?

Certaines méchantes langues traitent certains écologistes d’anti-humanistes. L’analyse ci-dessous montrent que c’est plutôt un humanisme étroit qui empêche d’être vraiment écologiste. L’humanisme qui consiste à tout ramener à l’homme - surtout occidental – instaure un anthropocentrisme aussi dévastateur pour le reste de la création qu’il est hégémonique. Quelques témoignages :

Claude Lévi-Strauss en 1955 : Tout abus commis aux dépens d’une espèce se traduit nécessairement, dans la philosophie indigène, par une diminution de l’espérance de vie des hommes eux-mêmes. Ce sont là des témoignages peut-être naïfs, mais combien efficaces d’un humanisme sagement conçu qui ne commence pas par soi-même mais fait à l’homme une place raisonnable dans la nature au lieu qu’il s’en institue le maître et la saccage sans même avoir égard aux besoins et aux intérêts les plus évidents de ceux qui viendront après lui (…) Un humanisme bien ordonné ne commence pas par soi-même, mais place le monde avant la vie, la vie avant l’homme, le respect des autres avant l’amour-propre (Tristes tropiques)

Jean Baudrillard en 1973 : Pourquoi faut-il que la vocation de l’homme soit toujours de se distinguer de l’animal ? L’humanisme est une idée fixe qui nous vient, elle aussi, de l’économie politique - enfin, laissons cela -. (Le miroir de la production)

Sale Kirkpatrick en 1995 : L’un des traits de l’industrialisme et de faire un usage intensif des trésors concentrés dans la nature et de ses organismes vivants, dénommés « ressources », sans égards pour la stabilité du monde qui les fournit. C’est un processus ratifié par des idéologies industrielles tels que l’humanisme, qui en donne le droit, le matérialisme, qui en donne l’explication, et le rationalisme, qui en donne la méthode. Ce que Carlyle voyait au XIXe siècle comme une économie « en guerre contre la nature » est devenu une guerre encore plus violente au XXe. (La révolte luddite, briseurs de machine à l’ère de l’industrialisation)

Catherine et Raphaël Larrère en 1997 : Une des caractéristiques du cadre conceptuel de la modernité fut de poser l’extériorité de l’homme à la nature. De ce grand partage, on a décliné les dimensions ontologiques (sujet # objet), scientifiques (sciences de la nature # sciences humaines) et morales (humanisme antinaturaliste) Or, c’est cette partition que les développements contemporains de la science remettent en question. La parenté de l’humanité avec toutes les autres espèces, que le darwinisme avance, permet de surmonter la scission entre le sujet et l’objet. La modernité n’est pas anthropocentrique (…) Remontant à la politique nazie de protection de la nature (la Naturschutz, antérieure à la venue des nazis au pouvoir, mais conservée par ceux-ci), Ferry assimilait dans un même antihumanisme lourd de menaces fascistes la deep ecology, l’environnementalisme américain, Michel Serres et les thèses de Hans Jonas. Nous avons quelques raisons de penser que les écologistes ne représentent pas le véritable danger, alors que les menaces qu’ils dénoncent sont souvent réelles. La dénonciation de la deep ecology ou de l’écocentrisme demeure un rituel obligé qui ne nous paraît pas justifié. (Du bon usage de la nature, pour une philosophie de l’environnement)

Philippe Descola en 2005 : La subordination des non-humains aux décrets d’une humanité impériale est de plus en plus contestée par des théoriciens de la morale et du droit qui travaillent à l’avènement d’une éthique de l’environnement débarrassée des préjugés de l’humanisme kantien. Aux Etats-Unis, en Australie en Allemagne et dans les pays scandinaves a surgi une approche morale des devoirs de l’homme vis-à-vis de la collectivité du vivant et des droits que celle-ci pourrait posséder de façon intrinsèque (…) L’anthropologie est donc confrontée à un défi formidable : soit disparaître avec une forme épuisée d’humanisme, soit se métamorphoser en repensant son domaine de manière à inclure dans son objet bien plus que l’anthropos, toute cette collectivité d’existants liée à lui et reléguée dans une fonction d’entourage. (Par-delà nature et culture)

Robert Barbault en 2006 : Ce dont il s’agit n’est rien de moins que l’avènement d’un humanisme planétaire, lequel suppose une sorte de réconciliation entre l’homme et la nature. Oui, nous sommes entrés dans une nouvelle ère et l’appeler anthropocène doit nous inviter à prendre conscience des responsabilités que cela nous donne vis-à-vis des générations futures et des autres habitants de la Terre. (Un éléphant dans un jeu de quilles)

Baptiste Lanaspeze en 2007 : Le fait d’accorder une valeur en soi au monde naturel ou, en d’autres termes, de quitter l’ancien point de vue anthropocentrique pour adopter un point de vue « écocentrique », c’est ce qui caractérise pour le philosophe norvégien Arne Naess le passage à l’écologie profonde. Que l’on n’ait cessé de dénoncer une « rupture avec l’humanisme » là où il s’agit d’approfondissement des valeurs, voilà qui peut sembler étrange. Car ce dont il s’agit précisément pour Naess, c’est de réformer l’éthique et la métaphysique, pour permettre à l’homme de vivre une vie meilleure au sein de ce qui l’entoure (…) Assumer ce label de deep ecology, c’est rappeler à l’humanisme étroit qu’il a raison de ne pas aimer la deep ecology, car la deep ecology ne l’aime pas non plus. (L’écologie profonde n’est pas un « totalitarisme vert »)

Alain De Benoist en 2007 : Il ne serait cependant pas honnête de passer sous silence les impasses dans lesquelles l’écologie pourrait s’engager. Le biocentrisme égalitaire, où la vie d’un homme ne vaudrait finalement rien de plus que celle d’une vache ou d’un puceron reviendrait à passer d’un excès à l’autre. Il s’agit de rejeter d’un même mouvement l’humanisme héritier des Lumières, qui croit qu’on ne peut reconnaître à l’homme sa dignité qu’en l’arrachant au monde naturel, et l’idéologie de ceux qui oublient ce qui fonde en propre le phénomène humain. Reconnaître la spécificité humaine ne légitime pas plus la domination et la destruction de la Terre que la défense et la préservation de la nature n’impliquent la négation de ce qu’il y a d’unique dans l’espèce humaine. La conscience du rapport de co-appartenance interdit tout aussi bien de faire de la nature un objet intégralement dominé par l’homme que de faire de l’homme un objet intégralement agi par la biosphère. (Demain, la décroissance ! penser l’écologie jusqu’au bout)

Jacques Grinevald en 2007 : Eduqué dans mon enfance d’une manière très catholique, je me suis éloigné d’un certain humanisme soi-disant universel que je trouve à présent terriblement eurocentrique, et même excessivement anthropocentrique. Je me suis révolté intérieurement contre le fossé des deux cultures, l’humaniste et religieuse qu’on m’avait inculquée, et celle plus écologique et scientifique. Dans les années 1970, l’écologie (scientifique et politique) devenait une nouvelle perspective, aussi subversive que passionnante (…) L’arrogance de l’humanisme fait partie des racines culturelles et historiques de notre crise écologique. (La Biosphère de l’Anthropocène, repères transdisciplinaires)

Roger Ribotto en 2007 : L’anthropocentriste distingue si fort la nature de la culture que pour lui la spécificité de l’homme est d’être anti-nature. Anthropocentrisme égale humanisme….dans la mesure où humanisme égale anthropocentrisme. Tant que la nature n’aura pour nous d’autres raisons d’exister que son exploitation par l’homme, la crise durera, s’amplifiera. Il faut donc rejeter l’anthropocentrisme pour une pensée plus moderne, mieux adaptée à notre temps : mettre l’homme à sa bonne place dans la nature. (L’écologie profonde)

Serge Latouche en 2007 : La décroissance, entendue comme philosophie fondatrice d’un projet de société autonomie, implique une rupture avec l’occidentalocentrisme. Ce n’est pas un hasard si la plupart des inspirateurs de la décroissance (Illich, Ellul, Claude Lévi-Strauss et bien d’autres), ont dénoncé l’humanisme occidental : toute tentative de formuler des postulats issus du code moral d’une seule culture réduit la possibilité d’appliquer à l’humanité dans son ensemble quelque déclaration des droits de l’homme que ce soit (…) C’est pourquoi le projet de la décroissance n’est pas un modèle clef-en-main, mais une source de diversité. Cela dit, ne nous méprenons pas. Cette conception n’est en aucun cas un antihumanisme. Peut-être pourrait-on parler d’un a-humanisme comme je parle d’a-croissance. (petit traité de la décroissance sereine)

Harald Welzer en 2009 : Les cultures occidentales tiennent très fort à l’Humanisme, à la Raison et au Droit, bien que ces trois régulations de l’action humaine aient historiquement succombé à chaque attaque, dès qu’elle fut un peu rude. De fait la culture n’a de sens qu’en elle-même, en tant que technique pour accroître les chances de survie des groupes sociaux. La variante occidentale ne dure que depuis 250 ans seulement, et au cours de cette minuscule période il s’est trouvé plus de ressources détruites que pendant les 39 750 années précédentes. Or ces ressources ne sont pas perdues que pour le présent, mais aussi pour l’avenir. L’histoire de l’Occident libre, démocratique et éclairé écrit aussi sa contre-histoire, faite de non-liberté, d’oppression et du contraire des Lumières. De cette dialectique, l’avenir des conséquences du climat montre que le rationalisme des Lumières ne pourra s’exempter. Il y connaîtra son échec. (Les guerres du climat)

Alain Papaux en 2010 : L’homme peut tout vouloir, les indisponibilités auxquelles il est confronté n’étant dues qu’à une limite passagère, à une connaissance-maîtrise momentanément insuffisante de la science. Le transhumanisme qui porte ce projet est bien un humanisme, un héritier de la vision moderne de l’homme et de la science. La nature humaine est devenue indistincte puisque commensurable aux artefacts, rendue disponible par la convergence NBIC (sciences dites nano-bio-informativo-cognitives). Même l’intériorité s’est technicisée. Toutefois la liberté des Modernes, libérée par disparition des limites, loin de nous accomplir, se prépare à nous engloutir. (l’illimité à l’indisponible in Crise écologique, crise des valeurs sous la direction de Dominique Bourg et Philippe Roch)

Anne Dalsuet en 2010 : Pour Arne Naess, une acception de l’humanisme, fort insuffisante, valorise l’homme en faisant de lui le seul sujet de droit. Selon le schéma kantien, il n’y a de valeur utilitaire, esthétique ou morale qu’en vertu de l’attribution d’un sujet, c’est pourquoi « sans les hommes, la création tout entière ne serait qu’un simple désert inutile et sans but final ». Seuls les hommes sont pour Kant sujets et dignes d’être considérés comme des valeurs ou des fins en soi.

Nous devons nous délivrer de cette conception dominatrice de l’homme ; les hommes ne construisent pas tout seuls leur monde. Il faut déconstruire l’idéologie parasite par laquelle les hommes légitiment leur comportement destructeur à l’encontre de la Terre. Rolston et Taylor ne limitent pas la sphère de la moralité à la stricte humanité. Dans la nature, il existe de nombreuses stratégies adaptatives : tous les êtres vivants animaux et végétaux, s’emploient à préserver leur existence et à se reproduire, en ayant recours à des stratagèmes qui sont autant de moyens mis au service de fins. (Philosophie et écologie).

biosphere.blog

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