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samedi 30 avril 2011

Année mondiale de la Biodiversité....

Lyon : foyer de biodiversité historique ( photo : Anne Tesson.)
Synthèse de plusieurs années de recherche, l’ouvrage « Fleurs, fruits, légumes : l’épopée lyonnaise » révèle les richesses insoupçonnées du patrimoine végétal lyonnais. Pionnière dans la culture des roses, des chrysanthèmes ou des dahlias, Lyon a également donné naissance à de nombreuses variétés de fruits et légumes, et à toute une lignée de fameux botanistes, pépiniéristes ou horticulteurs, comme Pierre Poivre ou l’abbé Rozier, avec qui Jean-Jacques Rousseau herborisait. Dirigé par Stéphane Crozat, ethnobotaniste et historien de l’art des jardins, le Centre de ressources de botanique appliquée de Lyon, réveille cette formidable biodiversité historique et la met à portée de clic.
Fuchsia 'Jean Sisley", variété dédiée à l'horticulteur lyonnais Jean-François Sisley, 1878 ©DR
« Par quel étrange phénomène d’amnésie collective un patrimoine d’une telle richesse fut-il oublié ? ». La question, posée en toute fin de cet ouvrage détaillant les heures glorieuses et proprement épiques des cultures légumières, fruitières et florales lyonnaises, laisse songeur. Comment se fait-il en effet que Lyon, si prompte d’ordinaire à s’autoproclamer capitale de tout et n’importe quoi – de la quenelle au genou… - ne l’ait pas fait pour les fleurs, fruits et légumes à la conception desquels les Lyonnais ont un temps excellé ?
Pire, les connaissances et compétences locales dans le domaine des cultures et de la création de jardins sont aujourd’hui presque complètement ignorées. « Devant ce constat, nous nous sommes penchés sur ce passé horticole prestigieux en recherchant tous les éléments permettant de le reconstituer, d’en comprendre la dynamique, d’en identifier les acteurs » expliquent les scientifiques Stéphane Crozat, Philippe Marcenay et Laurence Bérard. Tous trois ont développé, au sein du laboratoire du CRNS « Ressources des terroirs  - cultures, usages, sociétés » un programme qu’on peut qualifier de « biodiversité historique » portant sur les « fleurs, fruits et légumes du bassin lyonnais »  
Pendant plus de cinq ans, Stéphane Crozat a épluché un ensemble de ressources de première main, souvent éparpillées et insoupçonnées, dans les archives publiques et privées, auprès des sociétés savantes et des familles de botanistes, pour identifier ce patrimoine biologique. « C’est aussi une question de patrimoine gastronomique et alimentaire » poursuit Philippe Marchenay qui cite en exemple « la qualité du cardon en Rhône-Alpes qui confine à l’excellence ».
Dans cette abondante documentation, Stéphane Crozat a identifié les raisons qui font de Lyon une région pionnière en Europe dans l’étude des plantes : « des conditions naturelles propices – réunissant à la fois les flores du nord et du sud de la France – mais aussi une alliance bénéfique et très productive, dès le 16e siècle, entre la botanique, l’imprimerie et la médecine ». On pourrait ajouter aussi la soierie (pour les motifs de fleurs), la chimie (pour les teintures) ou encore la pharmacopée, l’ébénisterie et la gastronomie. « Sait-on encore aujourd’hui que la table si appréciée de quelques unes des célèbres « mères » lyonnaises était ravitaillée par leurs maraîchers de maris ? » soulignent les auteurs. Enfin, les ouvrages de botanique fondateurs les plus célèbres ont été imprimés à Lyon, grand centre d’imprimerie dans l’Europe de la Renaissance.
Lyon a ainsi donné naissance à des lignées de pépiniéristes (les Rivoire occupaient 4 ha à Monplaisir), d’horticulteurs, d’agronomes et de botanistes célèbres comme Pierre Poivre, les Jussieu ou l’abbé Rozier. L’âge d’or des cultures fuitières et florales lyonnaises court de la moitié du 19e siècle à 1914. Elles se développent notamment au parc de la Tête d’or, qui accueille le jardin des plantes et les grandes serres. De jeunes sociétés d’horticulture et d’agriculture rivalisent par l’abondance de leur activité ; elles s’intéressent aux techniques, aux greffes, à l’acclimatation des espèces exotiques et aux premières hybridations. Il règne une vive émulation qui débouche sur la tenue d’impressionnantes expositions visitées par l’Europe entière. Des milliers de variétés de fleurs et de plantes sont présentées à plus de… 300 000 visiteurs en quelques jours.
Parmi les fleurs et plantes créées à Lyon, l’ouvrage recense : 5 000 espèces de roses – dont les premiers rosiers multi fleurs. « Tout est complètement oublié à part les roses, déplore Stéphane Crozat. Or, avant 1914, le savoir faire lyonnais va de la pomme de terre à l’orchidée ». Les premières pommes de terre ont été introduites à Lyon en 1762, soit bien avant Parmentier.
Au rayon floral, Lyon fut pionnière pour les chrysanthèmes, les dahlias (sur 25 formes, 3 ont été inventées à Lyon), les œillets niçois qui n’ont de niçois que le nom, ou encore une clématite très commune qu’on trouve aujourd’hui en supermarché.
Au rayon fruits et légumes, les poires arrivent en tête du palmarès avec 80 variétés créées dans la région, suivies des cerises – notamment la Reverchon - des pommes ou des prunes Reine-Claude. On recense également 5 à 6 variétés de haricots verts et une Tomate PLM (pour Paris – Lyon – Marseille) censée être résistante au transport.
Le Centre de ressources de botanique  appliquée (CRBA) de Lyon, basé au Domaine de Lacroix-Laval, gère également un conservatoire de fruits et légumes régionaux. Une fois recensées, ces cultures sont conservées, surtout si elles menacent de disparaître. Ainsi, « comme le poireau bleu de Solaize, commence à dégénérer, on travaille sur un programme de resélection » précise Stéphane Crozat. Une vingtaine d’espèces de légumes ont déjà été protégées par le CRBA ; à terme  une quarantaine pourraient être concernées. « Pour les fruitiers, 220 ont été recensés et une cinquantaine retrouvés » poursuit l’ethnobotaniste.
La plupart de ces fleurs sont recensées sur le site horti-lyon.fr créé par le CRBA, ainsi que, depuis la semaine dernière, les fruits et légumes inventés ou améliorés à Lyon. « Ce qui nous intéresse, c’est la dimension culturelle de ces productions locales » explique l’ethnobiologiste Philippe Marchenay qui rappelle que «la biodiversité n’est pas l’apanage des espèces sauvages ; elle aussi créée par la culture humaine ».
Anne-Caroline JAMBAUD
Fleurs, fruits, légumes, l’épopée lyonnaise, par Stéphane Crozat, Philippe Marchenay et Laurence Bérard, avec le concours de Patrick Eberhard, aux Editions Lyonnaises d’Art et d’Histoire.
CRBA – Domaine de Lacroix-Laval, route de Sain-Bel à Marcy-l’Etoile.

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