Ioulia Timochenko reste incarcérée
Au premier jour de son procès, l’opposante et ex-Premier ministre ukrainienne s'est vue refuser sa remise en liberté.
L’opposante et ex-Premier ministre ukrainienne Ioulia Timochenko s’est montrée combative lundi lors de la première audience de son procès depuis son incarcération, accusant le juge de faire partie de la «mafia» au pouvoir qui a orchestré les poursuites contre elle.
«Je ne me lèverai pas devant vous, car cela reviendrait à se mettre à genoux devant la mafia. Vous ne me brisez pas, vous brisez la jeune démocratie ukrainienne», a-t-elle lancé au président du tribunal, Rodion Kireev.
Ce dernier lui a adressé un avertissement en raison de ses déclarations «inacceptables», alors que l’avocat de la prévenue, Iouri Soukhov, demandait au tribunal de revenir sur sa décision de vendredi d’incarcérer Mme Timochenko.
Mais le juge a rejeté la requête de remise en liberté présentée par la défense.
La salle du tribunal, pleine de journalistes et de partisans de l’ex-Premier ministre, a applaudi les déclarations de la prévenue, et avait accueilli le juge en criant «Gloire à nos héros».
Mme Timochenko, parfaitement maquillée et coiffée, ne semblait pas marquée par son week-end en détention. Elle n’était pas menottée lundi matin.
«La prison c’est la prison, je ne veux pas me plaindre. C’est une épreuve, mais c’est aussi le sens de ma vie, agir pour que l’Ukraine devienne un véritable Etat européen», a-t-elle déclaré à des journalistes, quelques minutes avant l’ouverture de l’audience à 07H00 GMT.
Aux abords du tribunal, plusieurs centaines de ses partisans étaient rassemblés et scandaient des slogans contre le pouvoir, sous forte surveillance policière. «Pas touche à Timochenko!», «président, destitution», criaient-ils notamment.
Les manifestants rassemblaient aussi des signatures pour des pétitions demandant la dissolution du Parlement et la destitution du président Viktor Ianoukovitch.
Une vingtaine de tentes où des manifestants passent la nuit depuis samedi, malgré une interdiction prononcée par la justice ukrainienne, étaient toujours dressées lundi matin sur la principale avenue de Kiev, Khrechtchatik, où se trouve le tribunal.
Abus de pouvoir
Ioulia Timochenko a été placée vendredi en détention provisoire par le tribunal où elle est jugée depuis fin juin pour abus de pouvoir.
Le juge a décidé de l’incarcérer arguant qu’elle ne respectait pas les injonctions l’appelant à faire preuve de retenue durant les audiences. L’opposante venait d’accuser de «corruption» le chef du gouvernement, Mykola Azarov, qui témoignait contre elle.
Son incarcération a suscité une vague d’indignation dans le monde. Les Etats-Unis ont notamment dénoncé un procès aux «apparences de persécutions avec des motivations politiques».
La Russie a aussi soutenu Mme Timochenko, pourtant égérie de la révolution pro-occidentale ukrainienne de 2004, en jugeant parfaitement légaux les contrats gaziers avec Moscou pour lesquels elle est poursuivie.
Mme Timochenko est jugée pour avoir outrepassé ses pouvoirs de Premier ministre en 2009 en autorisant, sans l’approbation du gouvernement, la signature de contrats sur l’importation de gaz russe à un prix jugé désavantageux pour Kiev.
Ces accords avaient permis la fin d’un conflit gazier russo-ukrainien qui avait gravement perturbé les approvisionnements de l’Europe occidentale en gaz russe.
Le gouvernement ukrainien cherche désormais à renégocier ces contrats.
Comme les dirigeants européens veulent du gaz cet hiver, comme ils ne veulent pas voir les tarifs s'envoler, ils vont se taire. Avec le courage qui les caractérise. Et Timochenko finira ses jours en prison à la grande joie de Poutine et de Gazprom.
APL
Libérez Ioulia Timochenko
Suite à la mise en détention en Ukraine, de Ioulia Timochenko, égérie de la révolution orange de 2004, un collectif emmené par le philosophe et écrivain Daniel Salvatore Schiffer appelle à sa libération.
Un spectre hante, aujourd’hui, l’Ukraine: celui du stalinisme. Car, que le Président de ce pays, Viktor Ianoukovitch, dont on connaît l’indéfectible allégeance à Vladimir Poutine, éprouvât une certaine nostalgie pour ce type de despotisme, c’est ce dont, à voir l’actuel fonctionnement de son appareil d’Etat, on se doutait. Mais qu’il pût en adopter les pires méthodes policières et judiciaires, voilà qui, à l’heure où notre Union Européenne tente de propager ses valeurs de liberté et de tolérance partout dans le monde, ne peut que heurter la conscience de tout authentique démocrate.
Car c’est bien une parodie de justice, digne des vieux et expéditifs procès de Moscou sous l’ère Vychinski, naguère spécialiste inégalé en matière de purges politiques, qui vient d’avoir lieu, avec l’arbitraire mise en détention, ordonnée ce 5 août par un tribunal de Kiev, de Ioulia Timochenko, égérie, pro-occidentale, de la défunte révolution orange de 2004.
Le motif de cette arrestation s’avère, du reste, pour le moins paradoxal, sinon incongru : abus de pouvoir ! La formule, certes, ferait rire, à voir le comportement des “ apparatchiks “ de la nouvelle “ nomenklatura “ ukrainienne, si ses implications juridiques n’étaient, elles, aussi tragiques sur le plan humain.
Ainsi est-ce un appel solennel à la libération immédiate et inconditionnelle de Ioulia Timochenko que nous lançons ici, au nom des droits de l’homme et de la femme, du respect de leur liberté de parole et de pensée, au gouvernement ukrainien.
Que celui-ci, par ailleurs, le sache ! S’il ne devait pas répondre positivement à notre requête, nous brandirions alors un autre argument, bien plus redoutable, celui-là, pour les affaires médiatico-économiques de l’Ukraine : l’appel au boycott, sur ses terres, de la prochaine “ Coupe d’Europe des Nations “, compétition sportive (football) devant se tenir, entre la Pologne et l’Ukraine précisément, du 8 juin au 1er juillet 2012.
C’est, du reste, cette même menace que nos politiciens se devraient, soutenus en cela par la FIFA elle-même, de mettre en avant, face aux autorités ukrainiennes, afin d’obtenir, au plus vite, la libération de Ioulia Timochenko.
Premiers signataires :
- Jacques De Decker, écrivain, Secrétaire perpétuel de l’Académie royale de Langue et de Littérature françaises de Belgique.
- Alexandre Jardin, écrivain.
- Daniel Salvatore Schiffer, philosophe, écrivain.
- Jacques Sojcher, philosophe (Université Libre de Bruxelles).
- Annie Sugier, présidente de la Ligue du Droit International des Femmes, association créée par Simone de Beauvoir.
- Michel Wieviorka, sociologue, Ecole des Hautes Etudes en Sciences Sociales (Paris).
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