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mercredi 1 juin 2011

Une gauche ...de gauche

Et si tout ça était plutôt bon pour la (vraie) gauche?
Et si, bien plus qu’une catastrophe pour le pays ou une tragédie pour le PS, cet accident de Strauss-Kahn constituait une occasion de repenser une opposition ? Innocent ou coupable, relaxé ou condamné par l’opinion ou par un juge américain sur lequel le calendrier électoral français n’a pas prise, Dominique Strauss-Kahn est désormais hors-jeu. Qu’on le déplore ou s’en félicite, le fait est là, qui seul importe. Qu’elle vise à rétablir son honneur bafoué, sa liberté perdue ou son ambition contrariée, ce que sera la défense de l’homme blanc et riche contre la femme pauvre et noire est désormais secondaire et presque anecdotique, au regard des enjeux d’une crise qui demeure et sur laquelle «l’affaire DSK» ne pèsera qu’à la marge : elle ne bouleversera pas le quotidien des peuples ni des banquiers que le Fonds monétaire international continuera d’étrangler, pour les premiers, et d’engraisser pour les seconds. Elle ne bouleversera pas non plus la condition des femmes.
Au terme imminent de leur «travail de deuil», il n’est pourtant pas certain que les socialistes français comprennent que le champion que les sondages leur avaient donné est politiquement mort et, avec lui, quelque chose qui prétendrait dissocier le socialisme d'une morale. Pas une morale sexuelle, évidemment, mais une morale sociale. Quelque chose qui puisse s’énoncer dans un programme. La sortie du champ de l’ex-patron du FMI va-t-elle enfin décider le PS à mettre dans son lait toujours strauss-kahnien une ambition qui ne soit pas exclusivement comptable et libérale-compatible? Quelque chose qui puisse se réfléchir radicalement comme un autre modèle? Rien n’est moins sûr, et c’est peu de le dire…
A l’heure où Martine Aubry apporte son soutien à la candidature de Christine Lagarde à la direction du FMI (et sans même attendre que la procédure engagée à l’encontre de celle-ci, à l’initiative des députés PS, ne soit examinée), le pronostic n’est pas optimiste. Quoi qu’elle en dise, on doute un peu que Lagarde y aille autant «en tant que femme» qu’en tant que riche…
Des vieux caciques de la rue de Solferino autant que de ses ambitieuses et de ses petits marquis, le ciel est paraît-il tombé sur la tête, mais les unes et les autres semblent appelés à s’en remettre très vite. Il n’est que de voir la reprise des combinazione recuites dans l’affichage obscène des alliances à refaire et d’entendre crier le bruyant affûtage des dagues mal rengainées. C’est à l’évidence, chez les socialistes, une occupation à plein temps, qui les enferme et les aveugle. Lorsqu’éclata «l’affaire», elle les empêcha d’envisager ne fût-ce que l’hypothèse d’une femme de chambre à tout le moins, comment dire ?, violentée (disons violentée) dans un hôtel de Manhattan. Chez ces gens-là, on ne doute pas ; dix jours après, on se contente de ne pouvoir imaginer que cette violence ne fût consentie. La «sidération», ce peut être aussi utile à un «éléphant» qu’un tas de sable à une autruche.
S’inscrit pourtant dans le paysage quelque chose qui pourrait les dessiller, les socialistes, et les amener à mettre pour un temps de côté leurs petites querelles d’appareil. Je songe à ce mouvement d’une jeunesse sans travail et sans toit que sa précarité indigne, qui, depuis la mi-mai, occupe à Madrid la Puerta del Sol et en Espagne cent autres places, et qui, à défaut de la prendre, s’invite, timidement encore, tous les soirs à 19 heures place de la Bastille à Paris et place du Capitole à Toulouse (voir Libération du 24 mai et les sites dévoués à cette actualité.)
Il y a toujours, à voir se mettre en place cette protestation empirique et désordonnée, quelque chose d’infiniment émouvant. Des jeunes prolétaires «indigné(e)s»de la globalisation, les banderoles se déchirent au vent mauvais, les haut-parleurs crachent d’antiques effets Larsen, mais les slogans vont droit au but.
Au vieux monde, ces jeunes gens, qui portent leur maison dans des sacs à dos ou à roulettes dans l’espoir d’un campement désiré, clament poliment : «On n’est pas antisystème. C’est ce système qui est antinous.» Au Parti socialiste, qu’ils perçoivent comme partie prenante du vieux monde autant que du système, ils ne disent rien, sinon : «Vous ne nous représentez pas.» Ils l’ignorent. Pas une seule allusion à ses déboires, ni, a fortiori, à ses primaires. Et de même sont-ils par lui ignorés.
De cette double ignorance de deux mondes, même pas antagonistes, sortira demain le meilleur ou le pire, comme de la place Tahrir du Caire, franchissant la Méditerranée pour inspirer los indignados, et se faire indignement, impitoyablement refouler. A moins qu’il n’en sorte rien, sinon un peu plus de désaffection pour les urnes et un peu plus de colère contre cette Europe-là. Jusqu’à la prochaine fois.
PIERRE MARCELLE

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