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Pédagogie de la complexité plutôt que démagogie de la simplicité
Les sciences du climat subissent une instrumentalisation politique constante. Le débat public est biaisé par une confusion entre chercheurs, écologistes et politiques.
De multiples défis scientifiques sont liés à l'observation, la compréhension et l'anticipation du comportement du système climatique. Les activités humaines modifient profondément la composition de l'atmosphère et les échanges radiatifs. Le climat se réchauffe, c'est un fait. La répartition spatiale du réchauffement récent, les changements de cycle hydrologique sont cohérents avec les calculs théoriques de l'impact d'un surplus de gaz à effet de serre sur le climat.
Quand nous expliquons posément les faits scientifiques, les données à court et long termes, les théories, les calculs basés sur la physique du climat, et leurs incertitudes, nos interlocuteurs répondent que "si c'est vrai, alors c'est un problème majeur dont il faut tenir compte". Cela conduit à des défis politiques, technologiques, économiques, diplomatiques, pour l'adaptation ou l'atténuation de l'impact des activités humaines sur le bilan radiatif de la Terre et le climat.
A cause de ces multiples défis, les résultats scientifiques ont souvent été utilisés sans discernement et avec exagération par certains écologistes et surtout par ceux qui sont appelés les climato-sceptiques. Dans les médias, cela a conduit à jeter le discrédit sur la science du climat et ses chercheurs.
Etonnamment, le débat médiatique est davantage centré sur les défis scientifiques ("Est-ce bien vrai ?") que sur les défis politiques. Il faut d'abord rappeler que le doute fait intrinsèquement partie de la (notre) démarche scientifique. Les débats sont permanents chez les climatologues qui, comme tous les chercheurs, sont des sceptiques professionnels !
Notre communauté fonctionne avec la même rigueur et les mêmes critères que les autres domaines scientifiques, tels que la physique, la chimie, la biologie, l'astronomie ou la géologie : publication détaillée des résultats, évaluation des travaux par les pairs, reproduction des mesures et des calculs par des groupes indépendants, débats lors de colloques internationaux ouverts à tous les scientifiques qui peuvent alors exposer leurs accords et désaccords.
Le grand public ne sait pas toujours que les avancées scientifiques et les débats techniques font l'objet de publications dans des journaux internationaux destinés aux scientifiques professionnels, mais souvent illisibles pour tous les autres. La publication d'une étude constitue le stade ultime concrétisant des années de travail et permettant de diffuser au monde scientifique les résultats d'une recherche.
Avant publication, un article doit d'abord être évalué par les pairs de façon anonyme sous le contrôle d'un scientifique reconnu qui assure le rôle d'éditeur, se portant garant de l'éthique du processus et mettant publiquement en jeu sa crédibilité personnelle. Ce système de "peer-review" est le pilier de l'assurance-qualité de la science dans tous les domaines scientifiques, y compris la climatologie.
Ce système n'est pas parfait, mais, comme la démocratie, c'est le pire à l'exception de tous les autres. Il fournit un critère de qualité nécessaire, mais pas suffisant. La littérature scientifique est donc encombrée de publications médiocres ou erronées, mais qui ne sont pas ou plus jamais utilisées (et citées) par les autres chercheurs.
Une étude vraiment fausse peut même faire l'objet de critiques formelles dans des articles postérieurs écrits par d'autres spécialistes que les premiers auteurs. Cela arrive inévitablement si les conclusions de la première étude paraissent très importantes.
Il faut souligner que c'est souvent le cas pour les articles scientifiques cités dans le dernier livre de Claude Allègre, notamment ceux sur l'impact du Soleil sur le climat qui ont fait l'objet de multiples réfutations dans des revues internationales. L'Imposture climatique (Plon, 300 p., 19,90 euros), ouvrage grand public, ne fait évidemment pas partie de la littérature technique expertisée par les pairs, mais la qualité et les titres de l'auteur laissent bien sûr supposer que son livre respecte l'éthique scientifique standard. Le pamphlet de Claude Allègre bat tous les records d'erreurs et d'approximations dans la présentation des sciences du climat, tout en dénigrant notre discipline, nos travaux, nos instances, notre éthique.
Dans une lettre ouverte aux instances de la recherche scientifique française (et pas aux politiques comme certains voudraient le faire croire), nous avons contribué, avec d'autres climatologues français, à établir une liste de ces multiples erreurs (60 pages de commentaires disponibles sur Internet à l'adresse http://sites.google.com/site/appelclimat), ainsi que des insultes et dénigrements sans fondement.
Cet effort singulier nous a semblé indispensable justement, car ce livre grand public ne fait pas partie de la littérature académique et que nous ne pouvions laisser nos concitoyens sans possibilité d'accéder rapidement à des informations correctes et factuelles.
Les médias jouent un rôle important dans la transmission des savoirs, vitale pour le débat démocratique, mais ajoutant à la confusion, le débat scientifique y est souvent caricaturé en opposant des visions simplistes, comme "seuls les gaz à effet de serre affectent le climat" ou "tout sauf les gaz à effet de serre joue sur le climat (au choix : le soleil, l'océan, les volcans, les rayons cosmiques...)".
Même si chacun a son avis sur la pluie et le beau temps, comprendre le système climatique requiert des connaissances scientifiques spécialisées et il est donc extrêmement difficile aux témoins de ces joutes médiatiques de jouer le rôle d'arbitres.
De façon similaire, personne ne demande aux citoyens d'arbitrer sur l'efficacité de tel ou tel soin thérapeutique. Le vaste espace médiatique accordé au discours de Claude Allègre, mélangeant des thèses politiques personnelles à une mise en cause (non étayée scientifiquement) de faits scientifiques établis rigoureusement par notre communauté, rend nécessaire et urgent un effort de communication vers le grand public afin de démêler le vrai du faux, le possible de l'improbable, en ne cédant pas à la démagogie de la simplicité, au détriment de la pédagogie de la complexité.
Edouard Bard, professeur au Collège de France et Valérie Masson-Delmotte, directrice de recherche au Commissariat à l'énergie atomique
La pasionaria du climat
Une scientifique contre le climato-scepticisme
Moi, Valérie Masson-Delmotte, 39 ans, chercheuse au laboratoire des sciences du climat de l’environnement (CNRS, CEA, Université de Versailles). Mon cursus ? Classe préparatoire scientifique, réussite au concours d’entrée de l’Ecole centrale de Paris en physique des fluides et transferts, ingénieur diplômée en 1993. Ma thèse de doctorat portait sur la « Simulation du climat de l’Holocène moyen à l’aide de modèles de circulation générale de l’atmosphère ; impacts des paramétrisations ». Ma spécialité est donc la paléoclimatologie. Le fait que l’on puisse quantifier, comprendre et modéliser la longue évolution passée du climat grâce à l’étude des glaces de l’Antarctique (qui permettent de remonter le temps de 800 000 ans) est essentiel pour la confiance que l’on peut accorder aux modèles de climat. A ce jour, j’observe que ces modèles représentent correctement les grands traits des changements passés, avec une tendance à sous-estimer à la fois l’amplitude et la vitesse de ces changements.
Je pensais avec d’autres qu’il fallait faire quelque chose contre les dénigrements systématiques et les manquements à l’éthique de Claude Allègre et Vincent Courtillot. J’ai donc été initiatrice d’un « appel des 600 », signé par des climatologues, pour l’organisation d’un véritable débat scientifique sur la question du climat. Moi non plus, je n’aime pas la vision fataliste de l’avenir qui est parfois associée au réchauffement. C’est ma formation d’ingénieur : la science et la technologie seront cruciales pour relever le défi. Mais faut-il mettre plutôt l’accent sur la réduction des gaz à effet de serre ou plutôt sur des mesures d’adaptation ? Cette question n’a quasiment pas été publiquement débattue. C’est peut-être ce qui a peut-être conduit à la campagne climato-sceptique que nous avons connue. Les débats scientifiques n’ont rien à voir avec ce que les médias choisissent de mettre en avant.
Je suis sélectionnée pour participer au prochain rapport du Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat (GIEC). Mais je me reconnais aussi dans l’idée de la sobriété heureuse.
Valérie Masson-Delmotte
Valérie Masson-Delmotte est climatologue, chercheur au Laboratoire des Sciences du Climat et de l'Environnement, rattaché au CEA, CNRS, Université de Versailles / Saint-Quentin en Yvelines et à l’Institut Pierre Simon Laplace.
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