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vendredi 21 mai 2010

Le Tchernobyl pétrolier annonce-il la fin de l' irresponsabilité des Firmes

Marée noire : « Le Tchernobyl de l'industrie pétrolière »

Selon Steiner, biologiste marin, les dispersants utilisés par BP au large de la Louisiane se contentent de « couler » le pétrole.

Pendant sept ans, Rick Steiner a étudié les effets de l'Exxon Valdez (Alaska, 1989), la marée noire la plus chère et la plus catastrophique de l'Histoire.

C'est un scientifique de renommée internationale, grand spécialiste des catastrophes maritimes. De nombreux gouvernements (dont la Libye, le Pakistan ou la Russie) l'ont appelé au secours. Steiner est l'auteur du manuel des Nations unies sur les marées noires.

Samedi dernier, j'étais en Louisiane, à Venice, au bout de cette filandreuse langue de terre qui s'enfonce dans le golfe du Mexique entre marais, bayous, joncs foisonnants, carcasses d'arbres décimés par Katrina, bateaux défoncés, échoués sur les rives, et voitures à moitié immergées dans les eaux calmes. Les signes du terrible ouragan de 2005 sont encore bien visibles dans l'estuaire du Mississippi.

Au bout de la marina Cypress Cove, il y avait un pupitre et des caméras de télévision. Les journalistes attendaient le retour de Bobby Jindal, le gouverneur de la Louisiane, de Mitch Landrieu, le maire de la Nouvelle-Orléans et de Billy Nungesser, le président de Plaquemines Parish (littéralement « paroisse », ce qui, en Louisiane, signifie comté ou département).

Les trois hommes s'étaient envolés une heure plus tôt en hélicoptère Black Hawk pour effectuer une reconnaissance de la marée noire, à 50 kilomètres environ au large. Ils devaient ensuite se réunir avec des garde-côtes et des gardes nationaux dans le restaurant de la marina pour un briefing, puis donner une conférence de presse (la réunion a duré environ vingt minutes).

BP décide des autorisations de circulation

Parmi les journalistes, les pêcheurs et les écologistes présents, il y avait un homme de haute taille, mince, les cheveux blancs, la peau couverte de tâches de rousseur et de soleil, les yeux bleus très clair. Il s'agissait de Rick Steiner.

Il était venu comme bénévole, pour offrir son expertise. Mais bien que les huiles présentes aient eu connaissance de sa présence, il n'avait pas été convié à la réunion. Lui, l'expert, allait donc rester dehors pendant qu'un triumvirat ignorant des marées noires feindrait d'élaborer des solutions.

Permettez-moi d'ouvrir une parenthèse. Je dis « feindrait » parce qu'au bout de quatre jours de déambulations en Louisiane et sur la côte du Mississippi, un fait est devenu évident : c'est BP qui semble tirer les ficelles.

Exemple : arrêtés à un barrage installé sur une route départementale, vers Hopedale (rive Est du Mississippi), des gardes nationaux nous ont conseillé d'appeler le représentant de BP pour obtenir l'autorisation de passer. Idem le lendemain.

Deux jours plus tard, devant un centre où les pêcheurs étaient venus remplir les formulaires pour obtenir leurs compensations, deux journalistes américains tentant d'interviewer les pêcheurs sur le parking ont été virés sur le champ par les hommes de BP.

Mais revenons à Steiner, auquel j'ai posé quelques questions.

« On a entendu des dauphins tousser »

Quelle est l'ampleur réelle de cette marée noire ?

Rick Steiner : c'est une catastrophe sans précédent, un événement historique, beaucoup plus grave que ce que ne laissent entendre le gouvernement et BP. C'est la première explosion d'une plate-forme pétrolière en mer et la première fois aussi qu'une fuite de pétrole brut se produit à 1 500 mètres de profondeur.

Les conséquences de cette tragédie sont totalement différentes de celles provoquées par l'accident d'un pétrolier, car dans ce cas, le pétrole reste à la surface, où vous pouvez le suivre.

L'impact le plus important de cette marée noire se fera sentir au fond du golfe, dans ce que nous appelons l'écosystème pélagique. Nous semblons uniquement concernés par les marées noires qui envahissent les plages et le rivage, alors qu'au large, il y a des centaines d'espèces d'oiseaux, de dauphins, de baleines, de poissons, etc en danger.

Justement, quels sont ces dangers ?

On a observé un banc de 70 ou 80 dauphins se déplaçant en rangs serrés au large de l'Ile du Gosier. C'est un signe de stress et d'effroi. On les a aussi entendus tousser. Ils ont dû ingérer ou aspirer du pétrole. On a également vu une grande quantité de plancton mort.

Sur Breton Island, il y a des milliers d'oiseaux. Ils sont en pleine saison de nidification. La moitié des oisillons sont déjà sortis de leurs coquilles. Ils vont être contaminés. En Alaska, 30 espèces ont été compromises. Les harengs du Pacifique ont été complètement décimés. 21 ans plus tard, les pêcheurs et la faune aquatique continuent de payer les conséquences d'Exxon Valdez.

A votre avis, les mesures prises par BP sont-elles efficaces ?

Malheureusement non. Il n'y a absolument aucun moyen de collecter le pétrole une fois qu'il est dans l'eau. Dans toute l'histoire des marées noires, on n'y est jamais parvenu. Les centaines de kilomètres de barrages flottants déployés ne peuvent être efficaces que si le brut flotte à la surface, et encore… Or, dans le cas présent, il est surtout dans le fond.

BP a annoncé qu'elle avait récupéré sept millions de litres d'une mixture eau/pétrole. Je parie que 90% de cette mixture était de l'eau. L'ironie est que les bateaux qui installent les barrages injectent plus de pétrole dans l'eau qu'ils n'en collectent. C'est absurde. Pendant ce temps, 800 000 litres de brut jaillissent chaque jour de la fuite pour se répandre dans le golfe.

Quel est l'impact écologique du dispersant utilisé par BP ?

La méthode a été utilisée en Alaska, sans succès. BP a injecté environ 1,6 million de litres (1 800 m3) de dispersant. C'est inquiétant. Le brut est toxique. Le dispersant est toxique et la combinaison des deux est encore plus toxique.

Le dispersant est un produit chimique composé d'un ingrédient actif appelé Corexist, que les biologistes marins ont rebaptisé « Hidesit » (le cache), et d'un autre appelé 2-Butoxyethanol. Sur l'étiquette de ce produit, on est avisé de consulter immédiatement un médecin en cas de contact avec la peau. Tirez-en vos propres conclusions.

Les compagnies pétrolières utilisent les dispersants parce qu'ils permettent de « couler » le pétrole loin des regards. Toute la faune aquatique va être exposée à leur toxicité. De plus, pour que le pétrole se disperse, il faut des vents de 10 à 25 nœuds. Moins de vent, c'est inefficace ; plus de vent, le dispersant devient inutile.

Quel est donc votre pronostic ?

Il est difficile de faire des prédictions. Tout dépendra des vents, de la température de l'air et de l'eau, du type de brut et de la densité de bactéries. Plus l'eau est chaude, plus il y a de bactéries. Elles contribuent à nettoyer les hydrocarbures toxiques de la marée noire.

Cette catastrophe est le Tchernobyl de l'industrie pétrolière. J'espère qu'elle nous apprendra au moins une leçon : il faut arrêter l'exploitation pétrolière en mer. Nous en connaissons maintenant les risques. Il faut à tous prix éviter le forage dans l'océan Arctique. Il serait absolument impossible de contrôler une explosion et une fuite de brut dans la banquise.

Armelle Vincent

Je vis à Redondo Beach, comté de Los Angeles, depuis dix-huit ans maintenant, avec mes trois enfants franco-mexicano-américains. Je collabore à plusieurs publications françaises. Je signe (ou ai signé) dans Le Figaro, XXI et son blog, GEO, L'Amateur de cigare, Le Point, Marianne, Rolling Stone, ELLE… J'ai passé beaucoup de temps au Mexique, en Basse Californie particulièrement. Un coup de volant et je suis au Far West, à Tijuana, où la guerre des cartels bat son plein et les fusillades sont quasi quotidiennes. Ces séjours m'ont conduite à m'intéresser de très près au narcotrafic. Avec ses personnages fascinants, ses ramifications économiques, ses codes qui ont envahi le monde culturel mexicain, ses croisés courageux qui, chaque jour, risquent leur vie pour le dénoncer ou le combattre. Le narcotrafic mexicain est un sujet multidimensionnel que j'aimerais aussi raconter dans ce blog.

La facture estimée à 8 à 9 milliards de dollars pour BP

«Que les choses soient bien claires : BP est responsable de cette fuite. BP paiera», avait lancé Barack Obama peu après l'accident. De son côté, Beyond Petroleum (ex-British Petroleum) assume «toute la responsabilité de la marée noire» et a confirmé lundi qu'il paiera tous les coûts nécessaires et appropriés de nettoyage de la marée noire.

Pour le moment, la facture dont devra s'acquitter BP est difficilement quantifiable, mais Fitch a tablé sur une fourchette de 2 à 3 milliards d'euros pour le seul nettoyage et les analystes de Sanford Bernstein & Co et qui estime la facture totale (perte de la plate-forme, pétrole disséminé, les gros moyens pour enrayer les fuites, le nettoyage, les indemnités et les amendes) à 8 milliards de dollars.

«Un tel montant ne remettrait pas en cause la santé financière de BP», commente Irene Himona, analyste chez Exane BNP Paribas. En effet, le groupe a dégagé, rien que sur le premier trimestre 2010, un bénéfice net de 6,08 milliards de dollars... En clair, verser 8 milliards de dollars pour BP reviendrait à renoncer à seulement quatre mois de profits. La quantité de pétrole rejetée dans la mer n'est pas la seule à augmenter au fil des jours. La facture de la marée noire ne cesse de grimper pour BP. Estimé au départ à plus de 6 millions de dollars par jour, celle-ci s'élevait mi-mai à 350 millions de dollars (270 millions d'euros). Du coup, après les riverains de la plate-forme et les écologistes, les investisseurs commencent à leur tour à voir rouge. Et l'explosion, qui, en moins d'un mois, a déjà fait perde quelque 30 milliards de dollars de capitalisation boursière au pétrolier, ébranle maintenant sérieusement Tony Hayward, le patron du pétrolier pourtant depuis trois ans très prisé des actionnaires pour avoir remis le pétrolier à flot. Quant aux réassureurs de BP, ils commencent eux aussi à grincer des dents.

Marée noire : genèse d'un désastre

Le 20 avril, explosait la plate-forme pétrolière Deepwater Horizon, formant une immense marée noire dans le golfe du Mexique. Chronologie des événements et conséquences.

LA MAREE NOIRE AU JOUR LE JOUR

Révélations sur l'explosion à l'origine de la marée noire : Vouloir économiser 500 000 dolards.

Que s'est-il passé le 20 avril sur la plateforme DeepWater Horizon ? Un témoignage accablant sur les pressions exercées par BP pour accélérer la production de pétrole a été diffusé par l'émission "60 minutes", sur la chaîne CBS, qui a apporté pour la première fois des précisions sur les circonstances qui ont précédé l'explosion qui a fait onze morts. Mike Williams était le technicien en charge de l'électronique, sur la plateforme. Employé de Transocean, propriétaire de la plateforme, il a été un des derniers employés à avoir été sauvé, après un plongeon de 30 mètres pour échapper à l'explosion. Il a expliqué à CBS que des responsables de BP étaient présents sur la plateforme ce jour-là et qu'un différend les avait opposés aux responsables de Transocean au sujet de travaux en cours. Depuis des semaines, BP était pressé d'en finir alors que différents contretemps avaient freiné les travaux.

Selon CBS, chaque journée de retard coûtait un million de dollars (820 000 euros) à la compagnie. Les responsables de BP ont demandé une accélération des travaux, mais le puits s'est ouvert, "avalant" les équipements. Cet accident aurait provoqué, selon le technicien, "une pression pour accélérer la production et l'allure". Résultat : quand une partie du dispositif de sécurité antiexplosion a été détruite, à la suite d'une erreur de manipulation, un cadre a jugé le fait sans importance particulière.

Ce témoignage a été évoqué, mardi 18 mai, au Sénat, où le ministre de l'intérieur, Ken Salazar, était entendu pour la première fois depuis le début de la marée noire. Il a refusé de commenter les faits rapportés, mais a annoncé la prochaine nomination, par Barack Obama, d'une commission d'enquête indépendante sur l'explosion. Cette instance sera constituée sur le modèle des commissions qui avaient enquêté sur l'accident de la centrale nucléaire de Three Mile Island, en 1979, et l'explosion en vol de la navette spatiale Challenger, en 1986. Un rapport intermédiaire sur la sécurité de l'exploitation offshore devrait être remis fin mai, a indiqué le ministre. D'ici là, les forages vont observer une "pause", selon lui.

Le 20 avril restera sans doute à jamais un jour noir dans la mémoire des américains. L'explosion de la plate-forme pétrolière Deepwater Horizon à ce jour, la plus profonde jamais enregistrée dans l'histoire des forages aux Etats-Unis a formé une immense marée noire dans le golfe du Mexique...Depuis, BP tente de juguler la marée noire provoquée par l'explosion de la plate-forme. En vain, quelque 800.000 litres de pétrole continuent à souiller les eaux du Golfe du Mexique.

Chronologie des événements.

20 avril 2010 - Une explosion, suivie d'un incendie, se déclare sur Deepwater Horizon, plate-forme de forage semi-submersible (elle est maintenue en place grâce à des hélices), propriété de Transocean louée par BP jusqu'en septembre 2013 . L'accident intervient à la suite d'une tentative de déplacement de la plateforme visant à un nouveau forage alors que la valve de sécurité qui régule la pression du puits d'origine dysfonctionne.

22 avril 2010 - La plateforme située à environ 70 km au large de la Nouvelle-Orléans coule -elle repose aujourd'hui par 1 500 m de fond. Onze personnes sur les 126 présentes sur la plateforme sont déclarées officiellement décédées. Les familles de deux travailleurs disparus portent plainte devant les tribunaux fédéraux et de Louisiane contre BP et Transocean ; elles s'appuient sur la négligence et le non-respect des règlements fédéraux.

26 avril 2010 -La fuite de pétrole détectée est évaluée à 1 000 barils par jour par BP. Elle sera rapidement revue à 5 000 barils par jour. L'accident ravive le débat sur les forages aux Etats-Unis.

28 avril 2010 - Deux entreprises de pêche de crevettes dépose une class action contre Transocean, BP, Halliburton Energy Services Inc. et Cameron International Corporation. Elles réclament 5 millions de dollars de dommages et intérêts.

29 avril 2010 - Le gouverneur de Louisiane Bobby Jindal déclare l'état d'urgence. Plus de 1 000 membres de la Garde nationale sont dépêchés dans l'Etat de la Louisiane par Barack Obama qui déclare la marée noire « catastrophe nationale ».

30 avril 2010 - Le 30 avril 2010, les premières boulettes de pétrole brut sont repérées sur les plages de Louisiane.

4 mai 2010 - Les premières estimations des réassureurs font état d'un coût pour le secteur de 1 à 1,5 milliard de dollars.

6 mai 2010 - Les sénateurs démocrates déposent une proposition de loi qui porterait de 75 millions à 10 milliards de dollars le seuil des remboursements des dommages que doit payer un pétrolier en cas de marée noire, hors coûts de nettoyage. Annonce de la future mise en place d'un couvercle sur la fuite.

8-9 mai 2010 - Mise en place d'un « couvercle » sur la fuite de pétrole, puis retrait du couvercle.

12 mai 2010 - La commission de l'Energie de la Chambre des représentants auditionne le directeur général de Transocean, le président de BP aux Etats-Unis, et le PDG de Halliburton qui a fourni toute une série de prestations.

17 mai 2010 -Première victime politique de la marée noire : Chris Oynes, directeur du Mineral Management Service (MMS), organisme fédéral responsable de la délivrance des permis de forage en haute mer, annonce son départ à la retraite, deux jours après les critiques de Barack Obama à l'organisme. Le président américain annonce la création d'une commission présidentielle pour enquêter sur la marée noire dans le golfe du Mexique.

LES CONSEQUENCES ECOLOGIQUES

L'accident est arrivé à portée d'une flore et d'une faune rares. Oiseaux, poissons et mammifères marins sont menacés, à l'instar du pélican brun, du grand dauphin, du lamatin, ou encore du crabe, des écrevisses et des crevettes, dont la Louisiane s'est fait la spécialiste sur les tables nord-américaines. La fuite rejette plus de 10 millions de litres de pétrole par jour au fond du golfe du Mexique, selon certains océanographes.

APIS

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