Ce matin, Xavier Argenton (Nouveau Centre), maire de Parthenay a eu les honneurs de la presse.
Pour quelle raison ? Tout simplement parce qu’il a refusé qu’une élève du collège de la Couldre (Deux-Sèvres), lise une lettre écrite par Ida Grinspan, ancienne déportée dans le cadre de la journée nationale du souvenir des victimes et héros de la déportation.
Pourquoi un tel refus ? Parce que ce témoignage a heurté un adjoint, Michel Birault, ancien gendarme. Ida Grinspan y évoque son arrestation par trois gendarmes alors qu'elle avait 14 ans. Cet adjoint a présenté le texte au maire qui a refusé sa lecture. " Pour ne pas stigmatiser une catégorie professionnelle qui, dans ces temps troubles, avait obéi aux ordres de l'autorité légitime", Ce texte "n'est pas de nature à apaiser les ressentiments à une époque où le repentir est malheureusement mis en exergue".
Mme Lanzi, professeur d’histoire du collège et également conseillère régionale socialiste, a indiqué au Courrier de l’Ouest "Mes élèves ne participeront plus au devoir de mémoire et aux cérémonies commémoratives. Je renonce à souscrire à ce que j'appelle une forme de censure. Mon objectif n'était pas de blesser, mais de dire l'histoire. Je suis attachée au devoir de mémoire et au souci de vérité",
Pour Ida Grinspan, "C'est terrible, cette mentalité-là". "Il faut savoir regarder la vérité en face. Ce que je dis dans ce texte, je le dis chaque fois que j'interviens dans une école. Je dis simplement ce qui a été".
Voici le texte interdit, spécialement écrit par cette ancienne déportée pour le 25 avril 2010.
- "J’ai été, par précaution, envoyée dans les Deux Sèvres alors que j’avais 10 ans, par mes parents inquiets et soucieux que je grandisse loin de la capitale.
- Je suis donc arrivée dans une famille, chez ma nourrice Alice et son mari Paul et auprès de Madame Picard, ma maîtresse d’école à qui je dois ce que je sais ; je pars non pas pour me cacher mais me réfugier ! J’ai été très bien accueillie et je suis allée à l’école communale, j’ai passé mon certificat d’étude : j’étais heureuse, même si je m’inquiétais pour mes parents restés à Paris ; maman malheureusement a fait partie de la rafle du Vel' D’Hiv en juillet 42 ; je vivais sans racisme, sans anti sémitisme de la part des voisins, de mes amies de classe et des habitants du village ! - - J’étais la petite juive, voilà tout.
Une armée victorieuse, mais en passe d’être vaincue, et qui ne trouve rien de plus urgent que d’intimer l’ordre à se vaincus d’aller dénicher une petite juive des Deux Sèvres pour l’expédier dans l’enfer D’Auschwitz ! La patrie des Arts menant une guerre à mort contre une enfant parmi des milliers d’autres pour le seul crime d’être née !...
- J’ai été arrêtée le 31 janvier 1944 par 3 gendarmes, l’inhumanité même, de ces 3 hommes, le chiffre 3 , chiffre impair qui montre bien la détermination d'être solidaires de ne pas se laisser influencer face à la jeunesse, face aux suppliques de ma nourrice, des demandes insistantes du maire de la commune pour ne pas m’emmener moi, si jeune, si innocente, qui avait la malchance d’être née juive! Alors que les armées alliées sont en train de délivrer l’Europe des allemands, 3 gendarmes français, ont obéi aux ordres de m’emmener à Niort pour connaître le pire : d’abord le camp de Drancy, puis l’enfer d’un voyage de 3 jours dans un wagon à bestiaux, plombé, avec des hommes, des femmes et des enfants pour arriver aux camps de la mort : c’était ça La Déportation. C’était un voyage terrible, où l’on devait apprendre à vivre ensembles, à faire ses besoins dans une tinette qui a débordée au bout de quelques jours, de vivre dans la saleté, le manque d’air !
- On se disait que le pire était derrière nous mais il était devant nous : quand le wagon s’est ouvert un comité d’accueil allemand avec chiens et hurlements nous attendaient pour la sélection. Je me souviendrai toute ma vie de ces hommes et femmes, enfants, vieillards qui sont partis dans des camions, pour les chambres à gaz ; moi, j’ai eu la chance si l’on peut dire, d’entrer dans le camp pour y travailler avec tout ce que l’on sait de la vie quotidienne dans les camps : nous étions des numéros, et non des êtres humains ; la déportation c’est aussi un programme de déshumanisation organisée par le régime nazi.
- La barbarie s'était glissée, cette nuit d’hiver, dans un hameau que tout destinait au sommeil heureux des lieux oubliés par l’Histoire ; Oui j’ai donc connu jusqu’à mes 14 ans une vie loin des fracas de la guerre, des privations de nourriture, des rafles, de l’ostracisme du gouvernement de Vichy et derrière tout cela le totalitarisme nazi organisait l’éradication du peuple juif."
Vous pouvez mieux connaître cet épisode de la vie d’Ida Grisnpan en lisant le livre "J’ai pas pleuré" écrit avec Bertrand Poirot-Delpech ou en écoutant son témoignage recueilli en 2004 par le mémorial de la Shoah et la mairie de Paris.
Ligue des Droits de l’Homme du Diois.
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