Quoi de plus dangereux que des peureux qui s’organisent pour la délation et la sécurité comme au bon temps du régime de Vichy.
Retour de la Milice (1) ?
Ligue des droits de l’Homme
Section de Tours et d'Indre & Loire
10, Place Neuve - 37000 Tours
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courriel : ldh.37@laposte.net
site : http://ldh.tours.free.fr/
LETTRE OUVERTE à M. PAUMIER et M. BRIAND
Maires de Saint-Avertin et Saint-Cyr-sur-Loire
Tours le 30 avril 2011,
Messieurs les maires,
Nous venons d'être informés par certains de vos concitoyens de la mise en place du dispositif des « voisins vigilants » dans votre commune sur le modèle anglais « Neighbourhood Watch Trust ».
Des voisins zélés s’inscrivant auprès de la gendarmerie pour devenir « référents » et noter ce qui leur semble anormal. Des « voisins vigilants », structurés en réseau de façon hiérarchisée, ayant pour mission de rapporter chaque détail « anormal » aux services de police.
En clair, nous assistons à la mise en place progressive et sournoise d’un réseau de délation généralisé où tout le monde surveille tout le monde, où le soupçon l’emporte d’emblée sur la bienveillance.
Ne risque-t-on pas de voir les « voisins vigilants » évoluer vers des « milices de quartiers » ?
Difficile de ne pas le redouter depuis la récente Loi d’Orientation et de Programmation pour la Performance de la Sécurité Intérieure, dite Loppsi 2, qui prévoit le renforcement des réserves de la
police et de la gendarmerie par l’ouverture de la réserve civile de la police à des volontaires âgés de 18 à 65 ans pour différentes « missions de soutien aux forces de sécurité ».
Au-delà d’une institutionnalisation de la délation, nous voyons dans la mise en place d’un réseau communal de « référents », une atteinte aux libertés individuelles et à la vie privée. Mais le danger réside également dans l’accoutumance (comme pour la vidéo-surveillance, on habitue la population à être surveillée) et dans l’acceptation de ces pratiques par les citoyens. S'agissant d'un réseau communal, cette décision a-t-elle fait l'objet de débats au sein du Conseil Municipal, et la population en a-t-elle été informée officiellement ?
Sachez que ce type d’action n’a prouvé son efficacité ni en France, ni à l’étranger. Le directeur de recherches au CNRS, Philippe Robert, sociologue et auteur de L’insécurité en France, émet des doutes sur l’impact réel des « voisins vigilants ». Selon lui, la délinquance ne diminue pas en tant que telle, voire elle se déplace vers d’autres zones.
Enfin, ce n'est pas à la société civile de se substituer aux services de police. Ce système instaure une psychose de l'insécurité risquant de provoquer des dérives et des conflits de voisinage.
C'est pourquoi, vous l'aurez compris, nous nous indignons et nous vous informons de notre très forte opposition à de telles pratiques.
Veuillez agréer, Messieurs les Maires, l’expression de nos sentiments dévoués aux principes de Liberté, d’Egalité et de Fraternité qui fondent notre République.
Pour la section de Tours et d'Indre et Loire, le Président
Sébastien Boche
(1) La Milice française, souvent appelée simplement Milice, fut une organisation politique et paramilitaire française créée le 30 janvier 1943 par le gouvernement de Vichy pour lutter contre le « terrorisme » (c'est-à-dire contre la Résistance). Supplétifs de la Gestapo et des autres forces allemandes, les miliciens participèrent aussi à la traque des Juifs, des réfractaires au STO et de tous les déviants dénoncés par le régime et la population. C'était aussi la police politique et une force de maintien de l'ordre du régime de Vichy.
Le chef officiel de la Milice était Pierre Laval, Chef du gouvernement, mais le véritable responsable de ses opérations était son secrétaire général, Joseph Darnand, fondateur du Service d'ordre légionnaire (SOL), précurseur de la Milice française.
Organisation de type fasciste, elle se voulait, à la fois « anti » : antirépublicain, antisémite, anticommuniste, anticapitaliste, et « pour » : pour le nationalisme et l'autoritarisme. Elle sembla avoir ambitionné de devenir l'équivalent d'un parti unique de l’État français. Sa montée en puissance marqua en tout cas, selon Robert Paxton et Stanley Hoffmann, la fascisation finale du Régime de Vichy.
Comme les nazis, les miliciens usaient couramment de la délation, de la torture, des rafles, des exécutions sommaires et arbitraires, voire de massacres. Leur pratique systématique de la violence et leurs nombreuses exactions, tout comme leur collaborationisme jusqu'au-boutiste, contribuèrent à les faire rester très minoritaires au sein d'une population. La Milice n'eut jamais plus de 35 000 membres (29 000 adhérents en automne 1943 selon Francis Bout de l'An, sur lesquels, d'après le chef du service des effectifs, l'enseigne de vaisseau Carus, seulement 10 000 étaient actifs).
Lors la Libération, la Milice fut déclarée dissoute par le Gouvernement provisoire de la République française, par l'ordonnance du 9 août 1944 relative au rétablissement de la légalité républicaine sur le territoire continental (Article 10).
Dans le courant du mois d'août - le 15 selon Jacques Delperrié de Bayac -, Joseph Darnand ordonna le repli général des miliciens. Des membres de la Milice participèrent cependant après cette date à certains combats sur le sol français au côté des Allemands, lors de la libération de Paris ou de la libération de Nice.
Environ 2500 miliciens et leurs familles prirent le chemin de l’Allemagne où 1800 furent versés dans la 33e Division SS Charlemagne avec les survivants de la LVF, de la Sturmbrigade SS dite ensuite Frankreich et d'autres unités auxiliaires. Mais Joseph Darnand dut en abandonner le commandement à un officier général allemand et partit en Italie du Nord avec 500 francs-gardes faire la chasse aux partisans. Cet épisode peu glorieux des la délation (et assassinat comme Camille Buffardel de Die) de voisinage a laissé de nombreux souvenirs dans le Diois et le Vercors…Que jamais ne se réinstallent de pareils comportements.
APIS
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