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mardi 31 mai 2011

Vers une réelle démocratie ...


Les Espagnols veulent une démocratie éthique
 La société espagnole semblait gagnée par la léthargie, comme anesthésiée par la cure drastique assénée par le gouvernement socialiste face à la dure crise économique qui touche l'Espagne de plein fouet depuis 2008. Une partie de cette société se réveille subitement et tient à le faire savoir, à l'instar de ses consœurs grecque et portugaise (300 000 manifestants à Lisbonne et Porto le 12 mars dernier).
Depuis quelques jours, un mouvement social agite les principales villes d'outre-Pyrénées, les acteurs de ce mouvement protéiforme mais pacifique étaient quelque 70 000 samedi 21 mai sur les places des grandes villes espagnoles, la Puerta del Sol madrilène en étant l'épicentre. A Alicante, ville de taille moyenne, samedi, les forums citoyens gagnaient les places et les rues du centre. On discutait beaucoup, l'agora s'animait.
Le mouvement compte beaucoup de jeunes mais pas seulement. Il est plutôt intergénérationnel. Avant tout, il s'agit d'une mobilisation citoyenne, voire civique car à l'heure actuelle elle n'est ni récupérée ni pilotée par les partis politiques. Les milliers de personnes réunies sous forme de campements spontanés expriment un ras-le-bol, un écœurement sincère face à une société en déroute avec environ 5 millions de chômeurs sur une population de 46 millions, plus de 21% de la population active se retrouve aujourd'hui sans emploi. Le taux de chômage des jeunes est colossal (45,3 % chez les 16-25 ans, 34 % chez les moins de 30 ans), ce qui les contraint à vivre comme autant de Tanguy involontaires et prive la moitié d'entre eux de toute possibilité d'indépendance. Les précaires sont légion, qu'il s'agisse de ces mileuristas qui ne s'en sortent pas face au coût de la vie ou de ces dizaines de milliers de retraités qui ont moins de 600 euros mensuels pour vivre.
En outre, une conjonction d'éléments peut être à même d'expliquer ce mouvement : les différents scandales politiques à droite comme à gauche (l'affaire Gürtel en est la plus retentissante) jettent le discrédit sur la classe politique (63% de taux de participation aux élections locales et autonomes du 22 mai), l'austérité comme réponse à la crise économique de la part d'un gouvernement donnant le primat aux directives sévères de l'UE ainsi qu'aux marchés financiers, la privatisation de pans entiers de l'économie nationale, des prestations sociales parmi les plus basses de l'UE. Tout cela ne pouvait laisser plus longtemps indifférente une société espagnole dorénavant en panne.
Jusqu'en 2008, on ne tarissait pas d'éloge sur "le miracle espagnol", l'Espagne était devenue l'une des 10 premières puissances économiques au monde, la presse française n'était d'ailleurs pas en reste dans ce concert de louanges. Il est vrai que l'évolution avait été remarquable depuis le retour de la démocratie mais c'était oublier que le modèle de développement choisi par le PSOE ou le Parti Populaire qui se sont succédé au pouvoir n'était pas viable. Pour preuve, le secteur de la construction s'est écroulé et avec lui une bonne partie de la maison Espagne. Ce secteur d'activité employait un grand nombre de jeunes sans qualification, le mirage du béton faisait miroiter de bons salaires mais tout s'est fissuré.
Le mouvement citoyen du 15 mai ne fait pas qu'exprimer le fort mécontentement des exclus, des victimes les plus exposées de la crise, il est aussi le lieu d'un vaste débat d'idées, l'expression libre et pacifique d'une société démocratique réveillée et qui ne s'en laisse plus conter. Les exigences d'une société plus éthique reviennent dans tous les rassemblements mais la traduction concrète de ces aspirations légitimes est évidemment plus abstruse. Mais peut-on demander à un mouvement naissant d'être porteur d'un programme déjà ficelé ? Les réseaux sociaux sont des vecteurs qui facilitent cette mobilisation sociale spontanée tout comme cela fut le cas en Tunisie ou en Egypte lors du "Printemps arabe". Mobilisation et réflexion vont ici de pair.
Quoi qu'il en soit, cette poussée citoyenne ne peut laisser les élites politiques et économiques indifférentes. Faire la sourde oreille face aux protestations et aux idées qui s'expriment maintenant serait la marque d'un régime démocratique qui en usurperait en partie le nom.
Stéphane Pelletier, professeur d'espagnol à l'Université Paris-Est-Créteil
Stéphane Pelletier est aussi l'auteur de L'Espagne d'aujourd'hui, Armand Colin, 2008.

Attente
La démocratie est née sur des places publiques. C’est-à-dire des espaces où, dans les cités antiques et les villes, les citoyens pouvaient se tenir assemblés pour débattre de questions qui dépassaient les individus et concernaient la communauté dans son ensemble. Les «Indignés» de la Puerta del Sol rejouent à Madrid cette scène fondatrice. Dans un geste d’une puissance symbolique et politique intacte, ils manifestent pacifiquement, joyeusement, rageusement. Ils disent aux responsables politiques espagnols que la démocratie telle qu’elle est ne suffit plus. Qu’elle doit être élargie, approfondie. Rouverte. Et leur slogan principal, lancé au visage de la classe politique - Vous ne nous représentez pas !» -, donne une idée de la profondeur de la crise et de l’immensité d’une attente à laquelle une élection, aussi importante que les régionales et les municipales qui se déroulaient dimanche en Espagne, ne saurait répondre. Comme le souligne le reportage que publie aujourd’hui Libération, les «Indignés» de la Puerta del Sol ne se font aucune illusion quant à leur prochaine évacuation par la police. Les tentes des manifestants et leurs cuisines en plein air risquent en effet de disparaître. On fera place nette. Mais la cause de ce mouvement spontané, inédit, elle, restera intacte. Et pourrait rapidement se trouver traduite dans de nombreuses langues européennes si les gouvernements de l’Union, de droite comme de gauche, n’ont à offrir à leurs citoyens que la perspective infinie de la rigueur économique.
Nicolas Demorand


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