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vendredi 10 décembre 2010

Climat ...le pire est à venir


Cancun dans le processus des négociations climatiques

Après l'extraordinaire mobilisation politique et le bruit médiatique consacrés au sommet de Copenhague en décembre dernier, "l'échec" de la négociation aidant, la tenue de la Convention sur le changement climatique à Cancun ne suscite pas la même ferveur et alimente des commentaires souvent désabusés. Pourtant la dégradation climatique se poursuit silencieusement. Les émissions de gaz à effet de serre, qui devraient diminuer globalement de 50 % d'ici 2050, augmenteront à nouveau de 3 % en 2010 ; les financements prévus pour la lutte contre le changement climatique ne sont toujours pas opérationnels et l'avenir du protocole de Kyoto, dont la première phase prend fin en 2012, est suspendu.

Le passage à des économies "bas carbone", fondées sur les énergies renouvelables, est retardé alors que l'Agence internationale de l'énergie vient de publier une étude montrant pour la première fois que le pic pétrolier à partir duquel la production décroît a été atteint en 2006 pour le pétrole conventionnel. Il reste bien sûr des gisements non conventionnels et du gaz liquide, mais, sans compter les dégâts écologiques, les coûts d'extraction sont tels que l'augmentation du prix de l'énergie pourrait précipiter une très grave crise mondiale. Le passage à des sociétés post pétrole et la réduction globale et différenciée de la consommation d'énergie, sont d'autant plus urgents.

Pour la première fois à Kyoto en 1997, et malgré toutes les limites du protocole, le déréglement climatique a été conçu comme un sujet de politique internationale à part entière. C'est pourquoi, le sommet de Cancun, certainement moins "people" et moins dramatisé que celui de Copenhague, revêt une importance considérable : c'est bien le processus lui-même et la reconnaisance d'une "responsabilité commune mais différenciée" selon les termes onusiens qui s'y joue, à l'heure où la crise globale exacerbe la concurrence et favorise les retours à des stratégies nationales et où les directoires autoproclamés du G8 ou du G20 tentent de marginaliser les négociations multilatérales.

Un accord est impossible à Cancun, peut-on lire ou entendre. C'est une évidence. Mais a-t-on pris la mesure de ce qui se joue et peut-on croire qu'un accord international entre pays industriels, pays émergents, pays les plus pauvres pourrait surgir simplement autour d'une table commune ? Comment un texte consensuel pourrait-il surgir facilement après les ravages sociaux et écologiques des politiques néolibérales et des plans d'ajustement structurel, après la poursuite des politiques néo-coloniales qui détruisent la nature et permettent l'accaparement des biens communs par quelques firmes transnationales ? Comment prendre acte de la crise alimentaire et de l'échec de l'agriculture productiviste, du déni des droits des peuples indigènes ? Comment faire accepter aux pays industriels, désormais soumis à leur tour à l'ajustement structurel, leur responsabilité historique en matière de changement climatique ? Copenhague n'est pas un "échec" : cette conférence a mis sur la place publique les difficultés immenses et les urgences à trouver les voies pour sortir d'un système qui ne peut poursuivre son expansion qu'au prix d'inégalités croissantes, du saccage des ressources naturelles, du déni démocratique.

ENVISAGER DES FINANCEMENTS PUBLICS

Pour toutes ces raisons, le mouvement pour la justice climatique, qui s'est révélé à Copenhague, marque un tournant. Nourri de luttes locales pour la réappropriation des biens communs, de résistances à la marchandisation de la Terre, d'expériences visant à une transition vers d'autres systèmes de production et de consommation, d'engagements de collectivités territoriales ou d'Etats, il témoigne du contenu politique des négociations climatiques, jusqu'ici trop souvent conçues comme batailles d'experts et de lobbies ou théâtres pour le déploiement de techniques nouvelles censées suffire à elles seules à inverser les courbes du réchauffement. La présence de ces mouvements dans l'enceinte des négociations et à l'extérieur est essentielle.

Plusieurs sujets occuperont l'écran des discussions. Il s'agit d'abord de la déforestation. Si la nécessité d'un accord en ce domaine fait l'unanimité, les modalités de financement font apparaître des divergences fortes : les mécanismes en discussion s'appuient essentiellement sur la fixation d'un prix des forêts calculé en fonction de leur capacité à séquestrer le carbone et sur l'émission de crédits, échangeables sur le marché du carbone, pour les entreprises qui "sauveraient" cette capacité.

L'entrée des forêts dans la finance carbone est contestée pour deux raisons majeures : son inefficacité écologique, car la forêt, habitée par des peuples qui l'entretiennent, contient des écosystèmes complexes non réductibles au prix du carbone ; sa soumission aux dérives de la finance, aux spéculations, à la volatilité des cours, aux fraudes. Ce sujet rejoint celui de la création d'un fonds de financement qui n'arrive pas à voir réellement le jour. Le dernier rapport des Nations unies continue à préconiser essentiellement des financements de marché. Pourtant, si nous voulons assurer la durabilité des sociétés et la justice écologique, alors ce sont des financements publics qui doivent être prioritairement envisagés, avec des contributions obligatoires et différenciées des Etats. En ce sens, une taxe sur les transactions financières, certes évoquée dans le rapport mais renvoyée à plus tard, permettrait à la fois de réduire une part de la spéculation financière et de trouver les centaines de milliards de dollars nécessaires pour financer l'adaptation au changement climatique pour tous ceux qui en subissent déjà les effets et la transition vers des sociétés sobres en énergie.

Geneviève Azam, économiste,

Intervenante 2008 des « Rencontres de l’ Ecologie » de Die

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