Le Parti communiste, nonagénaire sans avenir
Dans la nuit du 29 au 30 décembre 1920 naissait le Parti communiste français. Au terme de débats fiévreux, le vote décisif du congrès de Tours était sans appel : 3 208 délégués approuvaient l'adhésion à l'Internationale communiste, créée par Lénine, à Moscou, un an auparavant ; 1 022 délégués seulement préféraient, avec Léon Blum, garder la "vieille maison" socialiste. S'il mérite le respect dû aux nonagénaires, il faut bien dire que le PCF a connu des anniversaires plus glorieux. Et pour cause. Après avoir dominé la gauche française pendant près d'un demi-siècle, entre les années 1930 et 1970, après avoir constitué un pôle majeur de la vie politique nationale, le PCF décline inexorablement depuis. Comme le notait sans fard L'Humanité, en annonçant les deux journées discrètes de commémoration organisées les 11 et 12 décembre, "le Parti communiste français ne prétend plus depuis longtemps incarner une avant-garde autoproclamée du mouvement ouvrier".
Le contraire serait surprenant. Premier parti de France au lendemain de la guerre (28,6 % des voix aux élections de novembre 1946), encore soutenu par un électeur sur cinq jusque dans les années 1970, le PCF n'a connu, depuis, qu'une longue dégringolade électorale. Il a touché le fond lors de l'élection présidentielle de 2007 : Marie Georges Buffet, alors secrétaire générale, n'a recueilli que 700 000 voix, soit 1,9 % des suffrages, loin derrière le candidat trotskiste, Olivier Besancenot. En trente ans, le parti a également perdu les trois quarts de ses adhérents (officiellement 100 000 cartes, dont 60 000 à jour de cotisation) et la plupart de ses parlementaires (17 députés élus en 2007). Incapable de prendre la mesure des transformations profondes de la société française, le PCF est également en panne de base sociale et il a perdu l'essentiel des relais qui ont longtemps fait sa force. Le "parti de la classe ouvrière" ne l'est plus : 4 % seulement des ouvriers ont soutenu Mme Buffet en 2007. La CGT, ancienne "courroie de transmission" syndicale, a pris ses distances depuis dix ans. Quant aux villes et aux "banlieues rouges" du communisme municipal, elles ne sont guère qu'une survivance : le Parti communiste ne dirige plus que 28 villes de plus de 30 000 habitants (contre 72 il y a trente ans). Enfin, privé de modèle de référence depuis la disparition de l'Union soviétique au début des années 1990, le PCF est, à l'évidence, en panne de stratégie. Ses hésitations à l'approche de l'élection présidentielle de 2012 en témoignent : ou bien il se contente d'être une force d'appoint du Parti socialiste, en espérant sauver ainsi ses derniers bastions ; ou bien il accepte l'OPA que Jean Luc Melanchon entend faire sur ses dernières troupes, ce qui revient à remettre son sort entre les mains d'un tribun venu du PS. Dans les deux hypothèses, on voit mal le PCF capable de "relever le défi d'un nouveau siècle d'émancipation", comme l'y invitait récemment son nouveau secrétaire général, Pierre Laurentt. Sombre alternative. Pour ne pas dire impasse totale.
Eric Fottorino
Moribond le Parti Communiste Français !
Le PCF a traversé les époques en connaissant diverses fortunes. Il s’apprête aujourd’hui à se fondre dans un Front de Gauche pour les présidentielles. Après le faste de ses Trente Glorieuses, le PCF, débordé par sa gauche, ne séduit plus l’électorat qui a fait sa force au sortir de la deuxième guerre. Un long déclin ponctué d’erreurs stratégiques, parfois sourd aux mutations de la société. Etouffé par le programme commun, endormi par les socialistes et un peu long à prendre ses distances avec le grand frère soviétique, le parti communiste français n’a pas réussi sa mue. Et pourtant, dans la deuxième moitié du XX e siècle, le PCF a, un temps, été le premier parti de gauche. A la Libération, en 1946, le parti de Maurice Thorez et Jacques Duclos rassemble plus d’un quart des électeurs (28,6 %) et des centaines de milliers d’adhérents. Aux législatives, jusqu’en 1978, il se stabilise autour des 20 %. Guerres coloniales, Algérie... Il est de tous les grands combats. Puis, c’est le déclin, depuis les presque 16 % de l’emblématique Georges Marchais aux présidentielles de 1981. Le déclin, puis la chute. En 2007, Marie-Georges Buffet ne franchit pas la barre des 2 % alors que le jeune Besancenot enregistre le double. Depuis 1978, (565 000 militants), le PCF a vu le départ de plus de 400 000 adhérents. Pierre Laurent, secrétaire national depuis juin dernier, veut maintenant jouer la relance dans le cadre du Front de Gauche avec un Mélenchon en vraisemblable tête de pont. Impensable pour les orthodoxes que sont André Gerin, député du Rhône ou le bouillonnant Maxime Gremetz, député de la Somme. A 90 ans, le PCF semble aujourd’hui vraiment faire son âge.
Geoffrey Mercier
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