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jeudi 8 octobre 2009

Transformation Personnelle et Collective


Invitée à Die Laurence Baranski nous livrait sa réflexion.
Les femmes au cœur de la transformation personnelle et collective .
A l’initiative de Jacques Robin, Laurence Baranski a fondé, au sein du réseau Transversales Science Culture, l’association Interactions Transformation Personnelle - Transformation Sociale qui promeut l’idée que les sociétés ne peuvent se transformer en profondeur que si s’opère une transformation conjointe et cohérente des personnes et des collectivités. On ne peut avancer à titre individuel sans le soutien de la collectivité. Mais l’évolution du collectif repose sur la volonté, la sensibilité et l’intelligence de chacun, qui démultiplie les dynamiques collectives. Aucun acte n’est isolé. Chacun de nous est co-responsable de l’évolution du monde.
L’association « Interactions Transformations Personnelle Transformations Sociale » ne se situe ni sur le champ de la transformation personnelle (de nombreux espaces et différentes pratiques sont aujourd’hui largement proposées sur ce terrain de questionnement et d’introspection au service d’un mieux-être) ni à proprement parler sur celui de la transformation sociale (même s’il est clair que nous nous inscrivons dans les perspectives portées par les courants alternatifs tels que les enrichisse et les relaye Transversales Science Culture). Nous nous situons sur le lien dynamique entre ces deux champs.
Plus concrètement, l’objet de l’association est d’éclairer ce que la mise en place de processus de démocraties participatives au niveau de la société, ou encore d’intelligence collective - intellectuelle et émotionnelle - au niveau des collectifs, implique sur nos pratiques humaines. Même si nous nous ressemblons étonnamment, nous sommes tous différents. Nous devons prendre conscience de cette diversité, la respecter et nous former à la manière de la reconnaître et de l’intégrer dans nos relations, plus largement dans le tissu social. Chacun de nous est acteur du changement culturel et social auquel nous aspirons : plus de solidarité, d’humanité. Chacun de nous est "un levier" au service d’une transformation responsable et consciente. Comme le souligne Edgar Morin, dont la pensée est l’un des socles du projet, "Comment songer à améliorer durablement les relations sociales, humaines, au plan planétaire, si nous sommes incapables de le faire avec notre voisin. La réforme individuelle est quelque chose de nucléaire mais qui a à voir avec l’ensemble du contexte humain". Quant aux collectifs, ils ont la responsabilité de se questionner : " Qui sommes-nous, que faisons-nous là, pourquoi ne nous comprenons nous pas sur ce point ? Tout mouvement court à chaque instant le péril de sa désintégration par sectarisme. Ce questionnement doit être généralisé. C’est l’aventure de la vie, l’auto-régénération du mouvement par lui-même".
Les femmes sont plus à l’aise pour appréhender les relations entre l’individuel et le collectif
C’est un fait : notre projet rassemble plus de femmes que d’hommes. Elles s’y engagent d’une manière plus immédiate, plus passionnée. Pourquoi ? Certainement acceptent-elles plus facilement de se remettre en question. Elles semblent aussi moins individualistes, moins dans la compétition que dans la co-évolution. Ou, autre manière de le dire, elles agissent en gardant à l’esprit le sens de l’intérêt collectif. De même, elles sont plus naturellement dans la simplicité et la proximité à l’autre. De ce fait, elles font plus spontanément vivre la dynamique personne/collectif qui, c’est l’un des enseignements que nous avons dégagés, ne se propage pas au travers de long discours et théories, mais avant tout à travers des relations interindividuelles, de personnes à personnes, par la qualité des liens qui se tissent progressivement. Plus familiarisées à prendre en compte les dimensions subtiles d’elles-mêmes et des autres - émotions, sentiments, aspirations - elles intègrent plus facilement le ressenti à la raison dans les manières de "faire, dire et être ensemble". Leurs actions n’en sont pas moins efficaces. Au contraire, elles ont le souci de produire ensemble de l’utile, de l’opérationnel, sans trop s’encombrer de détours intellectuels pour justifier leurs choix. Elles relient plus qu’elles ne découpent les idées. Elles vont à l’essentiel en veillant à laisser émerger la créativité, tout en s’assurant du mieux-être individuel et collectif. ll y a une réalité que l’on oublie trop souvent : les femmes "sont" dans la vie, dans ses rythmes. C’est une réalité biologique qu’elles vivent dans leur corps. Elles savent ainsi de manière évidente qu’elles sont soumises aux lois de la nature, qu’elles lui sont reliées. Je pense que, même si au quotidien les femmes oublient cette réalité tellement elle devient une évidence - de manière régulière durant une longue période de leur vie et à chaque fois qu’elle donne naissance à un nouvel être -, cela conditionne la manière dont se structure leur cerveau. Cela influe sur leurs manières d’appréhender la réalité et les relations à elles-mêmes, aux autres et au monde. Elles savent qu’elles ne peuvent pas tout contrôler. Il est des domaines de la vie où il faut laisser faire, en s’inscrivant dans le mouvement naturel. Les hommes n’ont pas ce vécu. Ils peuvent penser que les constructions humaines (sociales, économiques, culturelles...) sont extérieures à eux. Les femmes sont plus ancrées dans le réel, elles ne peuvent oublier que la vie est intérieure et part de nous. Par ailleurs, dans nos sociétés occidentales, plus de femmes que d’hommes ont réalisé un travail sur elles-mêmes. Peut-être parce qu’elles avaient besoin de mieux se connaître dans nos sociétés où leur parole et leurs spécificités ont été fortement muselées par les valeurs masculines. Elles saisissent ainsi mieux que leurs compagnons que le fait d’accéder à sa propre complexité d’être humain est un des moyens les plus sûrs pour appréhender la complexité du monde et agir en conséquence.
Ce qu’il faut inventer ensemble, hommes et femmes
Ce que nous avons collectivement à inventer, c’est une nouvelle discipline transversale que l’on peut nommer l’écologie humaine et sociale. Pour rendre le débat et la complexité sociale féconds, il appartient à chacun de se former au minimum de grammaire relationnelle basée tout particulièrement sur l’écoute réellement authentique de l’autre. Les femmes ont une véritable contribution à apporter dans ce domaine. Il faut les inviter et qu’elles s’invitent elles-mêmes à occuper ce nouveau terrain d’expérimentation et d’expression. Elles portent en ce sens l’espérance et le rêve. Sont-elles l’avenir de l’homme ? Elles sont en tout cas des guides précieux sur les voies nouvelles que les sociétés humaines ont à explorer d’urgence. Mais il ne faudrait pas tomber dans une dualité hommes-femmes stérile. Que nous soyons hommes ou femmes, c’est notre féminin qui est sollicité et qui doit, comme le dit à nouveau Edgar Morin, "trouver son plein emploi".
Laurence Baranski
laurencebaranski@yahoo.fr
Interactions TP-TS, 17 rue du Faubourg
Montmartre, 75009 Paris

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