Vladimir Poutine et les sorcières des Pussy Riot
Selon l'article 14 de sa
Constitution, la Russie est un Etat laïque. Selon son code pénal, le blasphème
n'existe pas dans ce pays. Selon les apparences, la justice y est indépendante.
Qu'importe, un tribunal
russe, comme au bon temps du communisme, vient de condamner pour "vandalisme
motivé par la haine religieuse" trois jeunes femmes du groupe
punk Pussy Riot qui, en février, avaient chanté un couplet hostile à Vladimir
Poutine dans la cathédrale du Christ-Sauveur à Moscou. Emprisonnées depuis,
Nadejda Tolokonnikova, Ekaterina Samoutsevitch et Maria Aliokhina seront
envoyées deux ans en colonie pénitentiaire pour trente secondes de provocation
contre le président russe.
Leurs actes étaient "sacrilèges, blasphématoires et ont violé les
règles de l'Eglise", a conclu la juge qui les a condamnées,
tandis que les témoins de l'accusation évoquaient des "forces maléfiques" et les "mouvements diaboliques de jambes"
exécutés par les jeunes femmes lors de leur prestation de février 2012. En 1692, dans le Massachusetts, les
sorcières de Salem avaient été jugées (et exécutées) pour des motifs aussi
surréalistes. Et en 1901 Tolstoï était excommunié par cette même église. Au
XXIe siècle, la Russie de Poutine renoue avec l'Inquisition.
Pour le maître du Kremlin
et son "élite en épaulettes" issue du KGB - la police politique
soviétique, occupée, en son temps, à persécuter dissidents et croyants
orthodoxes -, l'intention est claire : réveiller les instincts conservateurs et
anti-occidentaux de la Russie profonde, qui leur est acquise, pensent-ils. Et
faire taire la voix de l'autre Russie, celle de la classe moyenne, prompte à
contester les fraudes massives aux élections de l'hiver 2011-2012 et le
despotisme mal éclairé du tsar Poutine.
La condamnation des trois
punkettes, étudiantes brillantes et mères de famille, se voulait une
démonstration de force du Kremlin, adossé à une justice aux ordres et à une
Eglise orthodoxe plus que complaisante. Mais à l'heure d'Internet et du village
global, elle résonne comme un singulier aveu de faiblesse, autant que de
stupidité : elle donne un nouveau souffle à l'opposition, qui en manquait
cruellement ces derniers temps. Une fois de plus, le Kremlin vient de se tirer
une balle dans le pied.
En outre, à l'énoncé du
verdict, vendredi 17 août, un détail révèle la vision paranoïaque du pouvoir
russe : la juge a noté que le mari de l'une des accusées était détenteur d'un
passeport canadien, sous-entendant l'existence d'un complot mondial contre la
Russie.
Elections falsifiées,
persécution des opposants, résurgence du mythe de la "forteresse assiégée" : à
l'évidence, la Russie s'éloigne à grands pas des valeurs occidentales
auxquelles elle a pourtant souscrit en adhérant en 1998 à la Convention
européenne des droits de l'homme...
Plus que jamais, depuis le
début de son troisième mandat, Vladimir Poutine entend imposer sa poigne : sur
la scène intérieure, comme en témoigne ce procès ; sur la scène internationale,
avec le soutien aveugle au régime de Damas. Cela le conduira à un isolement croissant.
Cela mérite une condamnation sans appel.
Retour des procès staliniens ou l'absurde jugements
de trois chanteuses des Pussy Riot…
Il y a quelque chose de
familier dans la salle du tribunal de Moscou où sont jugées, depuis lundi 30
juillet, les trois chanteuses du groupe punk Pussy Riot : c'est dans la même
salle, devant le même tribunal, que l'ex-millionnaire du pétrole Mikhaïl
Khordokovski a été condamné pour la deuxième fois en 2010, à l'issue d'un
procès largement considéré comme politique et truqué.
Il
ne fait pas l'ombre d'un doute que les raisons pour lesquelles les trois jeunes
femmes sont détenues depuis février et passibles aujourd'hui de sept ans
d'emprisonnement sont tout aussi politiques. Maria Alekhina, 24 ans, Ekaterina
Samoutsevitch, 29 ans, et Nadejda Tolokonnikova, 22 ans, ont été arrêtées dans
la cathédrale orthodoxe du Christ-Sauveur, où elles venaient de formuler à leur
manière une "prière
anti-Poutine". Chanté et dansé devant, dans une période où le
mouvement de protestation populaire contre celui qui n'était encore que premier
ministre faisait campagne dans les rues de Moscou. Le morceau implorait la
Vierge Marie de "chasser
Poutine". Cette performance avait choqué des croyants et
provoqué la colère du patriarche Cyrille, allié officieux du Kremlin.
Les trois chanteuses sont
accusées « d'actes de vandalisme motivés par la haine religieuse »
alors que provocations et radicalité seraient plus adaptées.
Arrivées menottées au
tribunal, où elles ont pris place dans une cage transparente munie de barreaux
(ceinture et bretelles, on sait jamais…), les jeunes femmes ont affirmé que
leur cible n'était ni l'Eglise orthodoxe ni la religion chrétienne, mais le
régime autoritaire de Vladimir Poutine, élu président le 4 mars. "Je pensais que l'Eglise aimait tous ses
enfants, mais il semble qu'elle n'aime que ceux qui aiment Poutine",
a déclaré Maria Alekhina par l'intermédiaire de son avocat. Ekaterina
Samoutsevitch a, pour sa part, dénoncé "les
mesures répressives visant à instaurer la peur chez les citoyens politiquement
actifs".
La manière dont les choses
évoluent à Moscou depuis le retour de M. Poutine au Kremlin leur donne
malheureusement raison. En moins de trois mois, l'ancien colonel du KGB, et
toujours stalinien, a fait adopter par le Parlement une série de lois destinées
à museler l'opposition. L'une d'elles qualifie d' « agents de l'étranger » et place sous
surveillance renforcée les ONG qui bénéficient de financements étrangers.
D'autres condamnent à de très lourdes amendes les organisateurs de
manifestations non autorisées, visent à réglementer l'activité des sites
Internet et repénalisent la diffamation.
Alexei Navalny, l'une des
principales figures des manifestations massives lancées en décembre, a été
convoqué lundi pour une série d'interrogatoires, au lendemain de révélations
sur la corruption officielle dénoncée sur
son blog. Personne n'a vu là une coïncidence : il est clair que, sur le front
intérieur comme en politique extérieure, Vladimir Poutine, qui n'a jamais
compris ni accepté le mouvement de protestation des classes moyennes et
urbaines russes, est dans une logique de durcissement.
M. Poutine se trompe de
stratégie. Chez lui et à l'étranger, elle est totalement contre-productive,
comme l'est le procès ridicule des trois chanteuses punkettes de Pussy Riot.
Alors qu'elle allait être
condamnée à 2 ans de prison pour avoir chanté dans une église une chanson
critiquant Poutine, une membre de Pussy
Riot s’est adressée au Tribunal en conclusion de sa comparution: "Même si
nous sommes présentes ici physiquement, nous
sommes plus libres que toutes les personnes assises en face de nous... Nous
pouvons dire ce que nous voulons..."
Albert Idelon
26420 La Chapelle
en Vercors
Pour MCD-APL
Nadejda Tolokonnikova, 22 ans, Ekaterina
Samoutsevitch, 30 ans, et Maria Alekhina, 24 ans, ont été condamnées à deux ans
de camp chacune pour "vandalisme"
et "incitation à la haine
religieuse" pour avoir chanté en février une "prière punk" dans la
cathédrale du Christ-Sauveur à Moscou, demandant à la Sainte Vierge de "chasser Poutine" du pouvoir.
Signez la pétition et envoyez-la à vos contacts: http://www.avaaz.org/fr/free_pussy_riot_in_fr/?bkkVgab&v=17289
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