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jeudi 21 janvier 2010

Climat : les citoyens ne lâcheront pas

Copenhague : La fin des haricots?
La dette écologique du Nord envers le Sud s'est avérée ineffaçable à Copenhague. Là où on attendait la mise en question d'un système qui met en péril l'habitabilité du monde, la COP 15 a été un sommet de ressentiment qui inaugure une ère de compétition sans fard et sans entraves entre les grands prédateurs planétaires.
Faut-il se féliciter de la fin du protocole de Kyoto, comme le fait le directeur de l'Institut Goddard d'études spatiales de la NASA, James Hansen, qui ne s'est pas déplacé à Copenhague parce qu'il n'en attendait rien ? Pour ce climatologue américain, ''avant le protocole de Kyoto, les émissions globales de dioxyde de carbone augmentaient de 1,5% par an. Après cet accord, elles sont passées à 3% par an. Cette approche n'a pas fonctionné. En fait, je suis assez content de ce qui s'est passé à Copenhague, parce que nous nous retrouvons face à une page blanche. La Chine et les Etats-Unis se parlent, ce qui est absolument essentiel. Ces pays sont les deux gros acteurs du problème, c'est à eux de se mettre d'accord''. Et cet accord devrait, selon lui, porter sur le prix des énergies fossiles, qui, tant qu'elles restent les énergies les moins chères de toutes, seront consommées sans limites. Le fait que Copenhague n'ait pas touché aux énergies fossiles revient à donner la victoire à l'OPEP et aux compagnies pétrolières. L'or noir et le charbon vont demeurer des valeurs sûres pour les spéculateurs, et les carburants majeurs d'une croissance devenue gage de survie politique au Nord, face à la récession qui s'installe, et, ailleurs, moteur d'un développement légitime, mais tragiquement mimétique.
Avec ses marchés carbone truffés de compensations (offsets) et d'échappatoires légalisés, le protocole de Kyoto, trois ans avant son échéance de 2012, affiche un bilan mitigé : les émissions mondiales auront augmenté d'un tiers depuis 1990. Ses mécanismes de flexibilité auront permis aux pays industrialisés d'effectuer des réductions arithmétiques de leurs émissions grâce à des investissements à bon marché dans les pays émergents en échange de crédits carbone. Quelle image peut avoir la Chine d'un pays comme le Danemark, hôte de la COP 15 ? Ce petit royaume septentrional, aussi peuplé qu'un quartier de Shanghai, se classe parmi les quinze premiers consommateurs mondiaux de charbon per capita, charbon importé de Pologne et d'Afrique du Sud. Longtemps, les Danois ont consommé plus de charbon par habitant que les Chinois. En 2008, les émissions de gaz à effet de serre du pays n'ont diminué que de 7,2% par rapport à 1990, alors que l'objectif assigné par Kyoto au Danemark était de – 21%. Du coup, le gouvernement danois a souscrit à des investissements de compensation via le mécanisme de développement propre, notamment dans des technologies de capture du gaz à effet de serre HFC 23 dégagé par deux usines en Chine, productrices de gaz HFC 22, par ailleurs interdit par le protocole de Montréal sur la couche d'ozone. Ces offsets un peu sales devraient permettre au Danemark de compenser par des crédits carbone les deux tiers de ses excédents d'émissions. Plus que la planète, c'est la Chine qui en tirera directement un bénéfice financier et le Danemark continuera à exporter de l'électricité à base de charbon. Ce manque d'exemplarité n'a sans doute pas rendu plus légitime aux yeux du monde M. Lars Lokke Rasmussen, premier ministre du Danemark, que Mme Connie Hedegaard, qui présida les dix premiers jours de la COP 15 avant son limogeage sans préavis. Inaudibles, l'un après l'autre ont été écartés de la conduite de la négociation, qui ne pouvait être légitimement menée que par un pays ayant honoré ses engagements de Kyoto.
Vue depuis le Sud et les pays dits émergents, la compensation de la dette écologique du Nord est un préalable à tout dialogue. La Chine en maîtrise parfaitement le vocabulaire. Dans une note diffusée à la COP 15, l'Institut de recherche de Pékin sur l'énergie, l'environnement et l'économie, souligne qu'il ne suffit pas de poser le principe d'une convergence per capita des émissions. Seul le principe d'une convergence des émissions cumulées per capita serait de nature à prendre en considération la responsabilité des pollueurs historiques que sont les Occidentaux. Mais si l'allocation de carbone prenait acte de cette règle de la dette cumulée per capita dans le temps, cela mettrait les pollueurs historiques devant une réalité intenable : ils ont, de fait et définitivement, déjà entièrement consommé leur allocation de carbone. C'est pourquoi la seule posture crédible, aux yeux d'un pays tel que la Chine, était, pour l'Occident, d'annoncer une inflexion substantielle de ses émissions à Copenhague, et de reconnaître formellement l'ampleur de sa dette écologique. Ce dernier point a cruellement manqué dans la plupart des discours tenus par les dirigeants des pays du Nord.
Aussi attendu que décevant, le discours de Barack Obama a fait l'impasse sur ce point sensible : à aucun moment le Président n'a reconnu que les Etats-Unis sont les principaux responsables historiques du changement climatique planétaire. Comme si les pays industrialisés, qui, dans un passé récent, ont prospéré sur des terres volées à d'autres et fondé leur richesse sur les ressources importées des colonies, pouvaient naturellement continuer à s'arroger le droit d'utiliser en priorité les énergies fossiles du monde. Le sommet de Copenhague a mobilisé quelque 40 000 personnes, venues dans le froid se presser aux portes du Bella Center, parce que celles-ci voulaient que quelque chose s'y passe, une rupture par rapport à des postures intenables, un révélateur de crise, une catharsis fatidique et salutaire. Or la reconnaissance de cette violence et de cette dette, qui a permis aux émetteurs majeurs d'édifier leur confort et leurs démocraties, a été totalement absente du sommet. Inconsciemment, les dirigeants des pays industriels ont cru pouvoir s'exonérer de leur responsabilité historique, grâce à une opération inouïe de greenwashing global où les ardoises du passé devaient être solubles dans les miraculeux objectifs de long terme mis en avant pour 2050 dans le texte LCA (Long Term Cooperative Action), désormais tombé dans les brouillons de l'histoire.
Prédations convergentes
Selon des témoins de la négociation finale menée à huis clos et dans une opacité totale le vendredi 18 décembre par 27 chefs d'Etat et de gouvernement, la Chine se serait même opposée à ce que les pays de l'annexe I (les émetteurs historiques) fassent figurer leur propre objectif de long terme de réduction de 80% de leurs émissions d'ici à 2050. Au grand dam d'une Angela Merkel ou d'un Gordon Brown : comment ? la Chine nous empêcherait de réaffirmer nos objectifs de long terme ?! C'est que la Chine sait calculer et n'entend pas, elle, mettre l'ardoise à zéro ni amnistier les responsables dans une addition de pourcentages factices. Elle sait que la proposition de réduire à long terme de 80% les émissions des pays industrialisés revient, pour ceux-ci, à passer de 18,3 gigatonnes de CO2 équivalent à 3,6 gigatonnes de CO2 équivalent. Cette proposition implique arithmétiquement que les pays en développement devraient faire le reste de l'effort, c'est-à-dire réduire de 20% leurs émissions. Compte tenu de l'évolution démographique des pays en développement, dont la population devrait doubler d'ici à 2050, cela reviendrait à une réduction de 60% de leurs émissions per capita. Et même si les pays développés devaient réduire de 100% leurs émissions entre 1990 et 2050, les pays en développement devraient réaliser une réduction de 52% per capita. Au bout du compte, ce n'est que si les pays développés réduisaient de 213% leurs émissions d'ici à 2050 que les pays en développement pourraient maintenir leur niveau d'émission per capita. Autant dire que cette ardoise est ineffaçable. Entre 1800 et 2008, les pays développés ont accumulé une dette carbonique de 159 gigatonnes de carbone. Et si le scénario d'une division par deux des émissions globales et de -80% de réduction par les pays industrialisés d'ici à 2050 était mis en œuvre, ces derniers émettraient encore 85 gigatonnes de carbone entre 2009 et 2050. Leurs émissions cumulées per capita entre 2005 et 2050 s'élèveraient encore à 266 tonnes de CO2, soit plus de deux fois plus que celles de chaque habitant des pays en développement.
La question de Copenhague était : comment effacer l'ardoise du passé et repartir tous ensemble vers un horizon décarboné ? La solution aurait pu être financière. On efface une ardoise en payant les pots cassés et en reconnaissant ses erreurs. Le prix du pardon a été estimé par une étude des Nations Unies(1) : 500 milliards de dollars par an, soit un pour cent du PIB mondial, auraient dû être mobilisés à Copenhague pour financer ce qui s'apparente à rien moins que l'équivalent d'un Plan Marshall de transformation du système énergétique mondial. La commisération affichée par les gouvernements des pays du Nord et l'aumône de 30 milliards de dollars accordée du bout des lèvres pour 2010-2012 dans la déclaration finale, ont été reçues comme autant d'insultes par le G 77. La prédation des ressources se déroulera désormais à nu. C'est la meilleure nouvelle de Copenhague : le saccage de la planète ne s'embarrassera plus de greenwashing. Et plus personne ne croit désormais à l'indignation des donneurs de leçons de nos démocraties fatiguées.
Ecologie au Quotidien
DIE, Rhône-Alpes, France
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Site : http://ecologieauquotidien.blogspot.com/
1/ Etude sur la situation économique et sociale dans le monde 2009
2/ Cf. notre article Un Plan Marshall pour sauver la planète du 9 septembre 2009

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