Marx, contre l’état des choses existant
Depuis quelques temps, Marx fait son grand retour. Le journal Le Monde, qui n’a rien d’un brûlot communiste, lui consacre un hors série. En le lisant, sans chercher la démonstration sous-jacente que l’on pourrait entrevoir par le choix des contributions, qui sont à la fois des textes de Marx et sur Marx, je me suis tout simplement régalée.
Commençons par le dernier, car il recèle sans doute la clé du retour de cet immense intellectuel au parti pris révolutionnaire. C’est l’économiste François Chesnais qui rappelle combien Marx avait pressenti la crise du capitalisme financier que nous traversons. Lui qui dénonçait le « capital fictif », le « fétichisme de l’argent », le pouvoir de la Bourse et des banques. Plus l’accumulation financière s’accroît et plus les propriétaires et les gestionnaires de titres se situent en extériorité à la production, avant de se situer en surplomb de la société toute entière, explique avec Marx François Chesnais qui nous dit : « c’est un capital bercé par cette illusion qui est aux commandes aujourd’hui ». On le sait, Marx pense que le capitalisme mourra de ses contradictions. Ecoutez cet extrait du Livre III du capital : « La véritable barrière de la production capitaliste, c’est le capital lui-même. Voici en quoi elle consiste : le capital et son expansion apparaissent comme le point de départ et le terme, comme le mobile et le but de la production ; la production est uniquement production pour le capital, au lieu que les instruments de production soient des moyens pour un épanouissement toujours plus intense du processus de la vie pour la société des producteurs ».
Commençons par le dernier, car il recèle sans doute la clé du retour de cet immense intellectuel au parti pris révolutionnaire. C’est l’économiste François Chesnais qui rappelle combien Marx avait pressenti la crise du capitalisme financier que nous traversons. Lui qui dénonçait le « capital fictif », le « fétichisme de l’argent », le pouvoir de la Bourse et des banques. Plus l’accumulation financière s’accroît et plus les propriétaires et les gestionnaires de titres se situent en extériorité à la production, avant de se situer en surplomb de la société toute entière, explique avec Marx François Chesnais qui nous dit : « c’est un capital bercé par cette illusion qui est aux commandes aujourd’hui ». On le sait, Marx pense que le capitalisme mourra de ses contradictions. Ecoutez cet extrait du Livre III du capital : « La véritable barrière de la production capitaliste, c’est le capital lui-même. Voici en quoi elle consiste : le capital et son expansion apparaissent comme le point de départ et le terme, comme le mobile et le but de la production ; la production est uniquement production pour le capital, au lieu que les instruments de production soient des moyens pour un épanouissement toujours plus intense du processus de la vie pour la société des producteurs ».
Dans un extrait de son discours de 1848 sur le libre échange, Marx nous met en garde : « ne vous en laissez pas imposer par le mot abstrait de liberté. Liberté de qui ? Ce n’est pas la liberté d’un simple individu, en présence d’un autre individu. C’est la liberté qu’a le capital d’écraser le travailleur ».
On retrouvera dans ce hors série du Monde la controverse un peu poussiéreuse sur le rôle de Marx dans les expériences de type soviétique. Pour Claude Lefort, Marx serait passé à côté des droits de l’Homme. C’est curieusement Raymond Aron qui rapporte ici une lecture plus fidèle de Marx. « Quiconque dit que Marx penserait aujourd’hui ceci ou cela, émet une hypothèse plus révélatrice de lui-même que de Marx », écrit Aron. Et il poursuit : « les planificateurs soviétiques d’aujourd’hui, bien qu’ils citent toujours Marx, peuvent difficilement être considérés comme ses héritiers ».
Une autre controverse, plus stimulante, est mise en lumière. Un texte de 1901 de Jean Jaurès, que j’ai découvert, pose une critique acerbe : « Marx avait besoin d’un prolétariat infiniment appauvri et dénué (…) nul des socialistes aujourd’hui n’accepte la théorie de la paupérisation absolue du prolétariat. (…) Il n’est plus permis de répéter après Marx et Engels que le système capitaliste périra parce qu’il n’assure même pas à ceux qu’il exploite le minimum nécessaire à la vie. » Voire. Le socialiste du XXIe siècle, Vincent Peillon, conclut plus promptement à la page suivante que « le socialisme français ne se construit pas sur la lutte des classes mais au contraire sur la collaboration des classes ». Seul l’affrontement peut-il faire advenir la société sans classes ? C’est le parti pris de Marx. Pour l’heure, disons que le compromis social-démocrate n’a pas fait la démonstration que la collaboration de classes changeait substantiellement la vie du plus grand nombre. Le débat, complexe et plus subtil qu’il n’y paraît, se pose en des termes nouveaux, notamment parce que l’opposition classique et binaire entre réformes et révolution a vécu et que le prolétariat s’est reconfiguré. Il faut s’interroger de façon neuve sur le sujet de l’émancipation (qui est moteur de l’histoire ?) et la reconfiguration des antagonismes sociaux. Faisons-le avec Marx, tout contre lui.
On retrouvera dans ce hors série du Monde la controverse un peu poussiéreuse sur le rôle de Marx dans les expériences de type soviétique. Pour Claude Lefort, Marx serait passé à côté des droits de l’Homme. C’est curieusement Raymond Aron qui rapporte ici une lecture plus fidèle de Marx. « Quiconque dit que Marx penserait aujourd’hui ceci ou cela, émet une hypothèse plus révélatrice de lui-même que de Marx », écrit Aron. Et il poursuit : « les planificateurs soviétiques d’aujourd’hui, bien qu’ils citent toujours Marx, peuvent difficilement être considérés comme ses héritiers ».
Une autre controverse, plus stimulante, est mise en lumière. Un texte de 1901 de Jean Jaurès, que j’ai découvert, pose une critique acerbe : « Marx avait besoin d’un prolétariat infiniment appauvri et dénué (…) nul des socialistes aujourd’hui n’accepte la théorie de la paupérisation absolue du prolétariat. (…) Il n’est plus permis de répéter après Marx et Engels que le système capitaliste périra parce qu’il n’assure même pas à ceux qu’il exploite le minimum nécessaire à la vie. » Voire. Le socialiste du XXIe siècle, Vincent Peillon, conclut plus promptement à la page suivante que « le socialisme français ne se construit pas sur la lutte des classes mais au contraire sur la collaboration des classes ». Seul l’affrontement peut-il faire advenir la société sans classes ? C’est le parti pris de Marx. Pour l’heure, disons que le compromis social-démocrate n’a pas fait la démonstration que la collaboration de classes changeait substantiellement la vie du plus grand nombre. Le débat, complexe et plus subtil qu’il n’y paraît, se pose en des termes nouveaux, notamment parce que l’opposition classique et binaire entre réformes et révolution a vécu et que le prolétariat s’est reconfiguré. Il faut s’interroger de façon neuve sur le sujet de l’émancipation (qui est moteur de l’histoire ?) et la reconfiguration des antagonismes sociaux. Faisons-le avec Marx, tout contre lui.
Clémentine Autain
J’ai 38 ans et je co-dirige, avec Roger Martelli, le mensuel Regards. Militante depuis près de quinze ans pour l’unité et le mélange des cultures politiques de la gauche radicale, je suis aujourd’hui membre de la Fédération pour alternative sociale et écologique. Tous les jeudis (8h45 !), je tiens une chronique dans l’émission “Les Matins” de France Culture.
Fille d’un père chanteur et d’une mère comédienne, j’ai grandi à Paris, essentiellement dans le quartier des Batignolles dans le 17e. J’ai soutenu, à l’université Paris VIII-Vincennes-Saint-Denis, une maîtrise d’histoire consacrée à l’Algérie coloniale et un DEA sur le MLF. Etudiante, j’étais adhérente à l’UNEF et à l’UEC.
En 1997, j’ai co-fondé avec Thomas Lancelot-Viannais (et bien d’autres !) une association mixte en faveur de l’égalité entre les sexes, Mix-Cité. Dans le même temps, je me suis investie activement dans la Fondation Copernic, espace de construction d’alternatives au libéralisme économique.
Entre 2001 et 2007, j’ai été élue apparentée communiste du 17e arrondissement, face à Françoise de Panafieu, et adjointe au Maire de Paris Bertrand Delanoë, chargée de la jeunesse.
En 2005, je me suis engagée pleinement dans la campagne référendaire sur le projet de Constitution européenne pour y défendre le “non” de gauche. La dynamique unitaire et la victoire ont débouché sur la constitution de collectifs antilibéraux auxquels j’ai participé. Le 10 septembre 2006, je me suis déclarée candidate à la candidature de ces collectifs pour porter les couleurs de la gauche antilibérale à l’élection présidentielle. Le rassemblement de toutes les composantes a échoué, cette candidature unitaire n’a pas vu le jour.
En 2007, j’ai déménagé à Montreuil. Et je suis devenue maman d’un petit garçon ! Qui a aujourd’hui une petite soeur…
En 2007, j’ai déménagé à Montreuil. Et je suis devenue maman d’un petit garçon ! Qui a aujourd’hui une petite soeur…
Enfin, j’ai écrit Alter Egaux (Robert Laffont, 2001), Les droits des femmes (Essentiels Milan, 2003) et Les machos expliqués à mon frère (Le Seuil, 2008). J’ai également introduit l’ouvrage collectif Banlieue, lendemains de révolte (La Dispute-Regards, 2006) et co-rédigé Salauds de jeunes (Robert Laffont, 2006) avec Mikaël Garnier-Lavalley. En 2009, j’ai publié Transformer à gauche (Le Seuil) et dirigé avec l’équipe de Regards un ouvrage collectif intitulé Postcapitalisme. Imaginer l’après (Au Diable Vauvert).
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