Inquiétudes sur l’avenir des permanences médicales de nuit en milieu rural isolé
Dans le cadre d’une
réorganisation nationale de la PDSA (Permanence Des Soins Ambulatoire,
c'est-à-dire l’organisation territoriale des soins médicaux aux heures
de fermeture des cabinets libéraux), l’Agence Régionale de la Santé
Rhône-Alpes (ARS R-A) a décidé de supprimer les permanences « en nuit
profonde » (de 00h00 à 08h00) dans les 7 secteurs ruraux drômois qui en
bénéficiaient encore. A savoir: La Chapelle en Vercors, le Haut Diois,
Saillans, Bourdeaux, La Motte Chalancon, Séderon et Buis les Baronnies.
Cette suppression, qui n’a pas d’autre objectif qu’économique, entrera
en vigueur à compter du 31 mai 2013 et suscite déjà de très nombreuses
inquiétudes chez les élus et responsables de santé de ces territoires.
Des solutions de substitutions irréalistes
Dans une conférence de presse donnée
vendredi dernier 11 janvier à l’hôtel de ville de Buis avec le maire
Jean Pierre Buix, le docteur Claude Derail, médecin généraliste installé
au Buis depuis 36 ans, conseiller ordinal, président de la CME de
l’hôpital local et membre du comité directeur du syndicat des médecins
généralistes de la Drôme « MG-26 », souligne le risque que cette mesure
ferait courir au corps médical de ces zones.« Les astreintes de
nuit, de week-end et jours fériés que les médecins ruraux organisent
entre eux, à la satisfaction de tous, sont indemnisées par la CPAM
depuis mars 2002. Il est évident que la suppression de ces indemnités de
permanence mettra en difficultés les médecins déjà installés par une
perte importante de revenus et ira à l’encontre des mesures visant à
inciter l’installation de jeunes médecins en milieu rural », explique le praticien.
« D’autre part, pour pallier la
disparition de cette PDSA, il est prévu la mise en place des 3 moyens de
substitution suivants : l’augmentation des plages horaires de
régulation (le samedi matin seulement), la création d’un corps de
« médecins mobiles sur de vastes territoires » (dont on ne sait pas
encore comment ils seront recrutés et rémunérés ni sur quelle étendue de
territoire ils devront intervenir), la création d’un corps de
« médecins correspondants SAMU » (dont on ne sait pas encore, là non
plus, comment ils seront recrutés et rémunérés, les médecins déjà
installés n’étant pas volontaires, dans leur grande majorité).
Des conséquences lourdes pour les administrés
Et le docteur Derail d’ajouter :
Etant donné la lourdeur et les lenteurs de l’administration d’un coté,
l’ampleur de la tache à accomplir de l’autre, il parait irréaliste de
penser que la nouvelle organisation des permanences de nuit profonde en
milieu rural isolé pourra être mise en place avant le 31 mai
prochain…Les conséquences pour les administrés peuvent être très
lourdes… De plus, il n’est absolument pas démontré que cette nouvelle
organisation fera faire des économies à la sécurité sociale, bien au
contraire… »
En attendant, l’inquiétude est vive dans
les zones rurales les plus isolées de la Drôme et notamment dans le
Séderonnais où le docteur Christian Beaume fait, depuis quelques temps,
circuler une pétition pour s’opposer à ce projet.
Quand les élus s'en mèlent...
Dans une lettre adressée à Madame
Marisol TOURAINE, Ministre des Affaires Sociales et de la Santé en date
du 9 janvier 2013, les Sénateurs Jean Besson et Pierre Bernard Reymond,
la députée Karine Berger, les conseillers régionaux Michel Grégoire et
Christine Nivou, les conseillers généraux Hervé Rasclard, Gérard Szostak
et Gérard Tenous, s'inquiètent eux aussi des conséquences de ces
nouveaux aménagements:
"Il nous semblerait pour le moins
paradoxal, Madame la Ministre, que cette nouvelle organisation amène
moins de service et moins de sécurité dans les zones les plus reculées
et que cette même nouvelle organisation augmente les coûts pour les
prises en charge nocturne. Sur ce dernier point, il est important de
souligner que les médecins libéraux du territoire sont volontaires pour
continuer à assumer cette permanence des soins en nuit profonde. Par
ailleurs, nous vous informons que l’ensemble des conseils municipaux du
territoire ont pris la décision de délibérer sur une motion qui vous
sera transmise dans les semaines qui viennent. Nous vous
serions particulièrement reconnaissants, Madame la Ministre, de bien
vouloir porter une attention particulière sur ces décisions annoncées
des Agences Régionales de Santé qui nous semblent à la fois inadaptées
et surtout contradictoires avec les principes que vous avez édicté
et auxquels nous adhérons avec conviction pour le devenir des habitants
de nos territoires..."
Le maire de Buis Jean Pierre Buix de son
coté s’est saisi du dossier et souhaite organiser une mobilisation
importante de tous les acteurs concernés. « Plutôt que de se battre
chacun dans son coin, il faut que les élus et les professionnels de
santé des différents secteurs ruraux du département concernés par cette
mesure se réunissent pour organiser des actions de protestation et faire
triompher le bon sens… »
ATTENTION : Il
est rappelé qu’en tout état de cause, et quelque soit l’issu de la
réorganisation de ces permanences, c’est toujours le 15 qu’il faut
appeler pour obtenir des soins médicaux en dehors des heures d’ouverture
des cabinets libéraux.Alain Bosmans
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