Energie et Environnement
Le coût d'un accident nucléaire en France ?
Plus de 400 milliards d'euros
L'Institut de
sûreté nucléaire a évalué l'impact d'un accident nucléaire « grave »
ou « majeur » en France. Son coût irait jusqu'à 430 milliards
d'euros. Un montant sans commune mesure avec l'explosion de l'usine AZF ou le
naufrage de l'Erika, évalués autour de 2 milliards d'euros.
Un accident nucléaire
grave pourrait coûter de 120 milliards à 430 milliards d'euros à la France. Des
coûts sans commune mesure avec l'explosion de l'usine AZF ou le naufrage de
l'Erika, évalués autour de 2 milliards d'euros - Reuters
L'Autorité de sûreté
nucléaire le répète souvent pour appuyer sa doctrine : « l'accident nucléaire est possible en
France ». Presque deux ans après la tragédie de Fukushima,
l'Institut de radioprotection et de sûreté nucléaire (IRSN), qui joue un rôle
d'expert public sur les risques nucléaires, a présenté ce mercredi au centre de
recherche de Cadarache (Bouches-du-Rhône) ses travaux sur « le coût d'un accident nucléaire ».
Ceux-ci s'appuient sur une étude présentée en novembre lors du forum Eurosafe à
Bruxelles (voir ci-dessous).
Cette étude évalue
l'impact économique pour la France d'un accident grave (niveau 6 sur l'échelle
Ines) à 120 milliards d'euros et celui d'un accident majeur (niveau 7, comme
Tchernobyl ou Fukushima) à 430 milliards d'euros. Des coûts sans commune mesure
avec l'explosion de l'usine AZF ou le naufrage de l'Erika, évalués autour de 2
milliards d'euros. Un tel accident serait de fait inédit en France : le plus
grave, intervenu à Saint-Laurent-des-Eaux (Loir-et-Cher) en 1980, a été classé
au niveau 4.
Un coût global équivalent
à « trois à six années de croissance »
Un accident de niveau 6
correspondrait à une fusion du coeur du réacteur, suivie de rejets radioactifs « contrôlés ». Sur les 120
milliards d'euros, le premier poste serait, paradoxalement, un « coût d'image » (47
milliards d'euros), lié à une chute du tourisme et des exportations
agro-alimentaires. Le second (44 milliards d'euros) correspondrait à une forme
de transition énergétique accélérée : un accident réduirait la durée
d'exploitation des centrales de dix ans, estiment l'étude.
Le coût global, qui représenterait
6 % du PIB soit « trois à six années
de croissance » serait ainsi plus national que local. Alors
que les associations anti-nucléaires rappellent que la centrale de
Nogent-sur-Seine (Aube) n'est qu'à 100 kilomètres de Paris à vol d'oiseau, « les écarts de coût en fonction de la
localisation existent mais ne sont pas majeurs », note
l'étude.
Dans ce type d'accident,
le nombre de « réfugiés
radiologiques » serait limité à 3.500 personnes, ce qui
constitue la grande différence avec un accident de niveau 7. Des rejets
radioactifs « massifs »
impliquerait par contre le départ de 100.000 personnes de la zone contaminée,
avec un nombre « élevé »
de cancers. Ainsi, alors qu'un accident de niveau 6 serait « un désastre national (...) néanmoins
gérable », un accident de niveau 7 deviendrait « une catastrophe européenne
ingérable », notamment parce que les conséquences économiques
pour les populations touchées serait massif (110 milliards d'euros) .
Avec un impact global
dépassant 400 milliards d'euros, la seule référence comparable citée par les
auteurs serait celle d'« une guerre
régionale ». En novembre, l'opérateur de la centrale de
Fukushima, Tepco, a indiqué que les seuls chantiers de décontamination et le
dédommagement des populations touchées pourrait coûter 100 milliards d'euros.
La publication de ces
recherches, destinées aux « gestionnaires
de crise et aux autorités de sûreté », intéresse aussi les
anti-nucléaires, qui estiment que le nucléaire entraîne une forme de
concurrence déloyale en n'intégrant pas le coût d'une assurance contre son
risque.
Veronique Le
Billon
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