.«Je suis fier
d’être un patron qui délocalise. La perte d’emploi, la déstabilisation
industrielle, c’est normal, c’est l’évolution». Ces propos de
Guillaume Sarkozy montrent à quel point nous sommes loin des libéraux qui nous
vendaient la chastement nommée concurrence libre et non faussée, les équilibres
de la main invisible du marché. Ils nous vantent aujourd’hui un modèle où les
salariés ne sont que des dommages collatéraux et la crise écologique un détail.
Le libre-échange a
entraîné un double effet dépressif, l’un sur les salaires et les conditions
sociales dans leur ensemble et l’autre sur la qualité de l’environnement humain
par les pollutions et la prédation des ressources naturelles. Les kilomètres parcourus
par les marchandises ont explosé depuis les années 1970 faisant augmenter les
émissions de gaz à effet de serre et les pollutions locales.
Être contre le
libre-échange aujourd’hui signifierait refuser la libre possibilité de faire
circuler des marchandises mais aussi la libre circulation des personnes. Bref,
nous serions contre la liberté tout court. Osez prononcer le mot de
protectionnisme et vous êtes alors immédiatement le suppôt de la dictature la
plus réactionnaire. Face aux crises écologiques et sociales, relocaliser
l’économie est devenue une nécessité qui impose de renverser complètement la
table du commerce international en désobéissant aux règles de l’Europe
libérale, en rétablissant la coopération internationale et les mesures de
protection de l’économie et des salariés.
Relocaliser
l’économie
La production délocalisée
est aujourd’hui largement destinée à l’exportation vers les pays riches. Le
rattrapage des salaires des pays du Sud n’a pas eu lieu et les marchés
intérieurs des pays émergents ne consomment pas ce qu’ils produisent. Par
exemple, les produits de la pêche pris dans la mer du Nord sont décortiqués et
congelés dans les pays asiatiques pour êtres revendus en Europe. La Commission
européenne indique ainsi que ces dernières années, «les taux de croissance du transport de marchandise ont surpassé ceux
de l’économie en général et vont croître encore de 50% dans les vingt
prochaines années »,
preuve s’il en est qu’il est fortement décorrelé de la production réelle. Les
émissions de gaz à effet de serre et la consommation des ressources
énergétiques non-renouvelables vont de pair avec les délocalisations.
Les émissions de gaz à
effet de serre liées au transport représentent un quart des émissions totales
européennes et sont issues à 85% du transport routier. Le transport de
personnes est donc relativement marginal en termes d’impact environnemental. De
la même manière, l’Agence internationale de l’énergie a récemment pris acte du
fait que le pic de pétrole (c’est-à-dire la production maximale possible
annuellement) a été atteint en 2007.
Une relocalisation
immédiate de l’économie est impossible sans politique ambitieuse de
réorganisation du territoire. La spéculation foncière et la spécialisation des
territoires sont les grands responsables des absurdités écologiques et
sociales. Des logements de plus en plus chers et de plus en plus éloignés des
lieux de production, une offre de transport en perdition sous les coups des
directives européennes et, comble de l’iniquité, des mesures qui viennent taxer
directement les ménages dans leurs comportements contraints (taxe sur les
carburants, sur les déchets, sur la valeur ajoutée…)
Réouverture des services
publics de transports locaux (gares routières et rail, transport à la demande
etc.), blocage de la spéculation foncière et immobilière, retour de notre
souveraineté alimentaire sont autant d’éléments nécessaires à une
réorganisation en profondeur de notre territoire. Pour autant, ce sont des
mesures qui imposeront de désobéir aux traités européens et aux directives
libérales. C’est aussi l’Europe des régions qui doit être combattue en ce
qu’elle est une organisation du pays déterminée par les choix économiques
plutôt que citoyens et condamne au morcellement de la République contraire à la
souveraineté populaire.
La transition
écologique sera subie ou choisie
La relocalisation à elle
seule ne peut être l’unique mot d’ordre d’une politique socialiste et
écologiste. Toutes les entreprises anticipent déjà la raréfaction des
ressources naturelles. L’exemple de la grande distribution est à ce titre très
révélateur: jusqu’à aujourd’hui fer de lance de la fermeture des commerces de
proximité, de l’explosion spatiale et de l’hyperconsommation, ce modèle
économique du secteur sera totalement modifié par la seule augmentation
inévitable du prix du pétrole. Ce n’est donc pas un hasard si les enseignes des
hypermarchés rachètent les petites surfaces de proximité. Elles relocalisent
déjà leurs points de ventes. Une étude chiffre également que la seule
augmentation du prix du baril va supprimer pas moins de 170 000 emplois dans la filière automobile française
d’ici dix ans.
Mais, relocalisation de
l’économie rime pour nous nécessairement avec reconversion écologique. Il
s’agit de réinterroger collectivement l’utilité sociale, l’impact écologique de
la production, bref, transformer les rapports sociaux de production. Cela
signifie remettre les travailleurs et les citoyens au centre des décisions
industrielles qui sont prises en France et en Europe. Plus de pouvoir aux travailleurs
dans les entreprises (notamment au sein des conseils d’administration) et aux
citoyens, notamment via le débat national et les débats locaux qui précèdent
les plans pluriannuels tels que nous les proposons dans le cadre de la
planification écologique. Cela signifie libérer les travailleurs des décisions
capitalistiques. Contre la vision qui voudrait que les compétences n’existent
pas ou plus en France, il faut que nous reprenions en main nos choix collectifs
de production en permettant la reconversion des travailleurs en parallèle de
celle des secteurs industriels. La formation professionnelle doit être un
service public entièrement dédié à la réalisation de projets d’intérêt général.
Relocaliser c’est
réindustrialiser et protéger
Dire, comme le font
certains écologistes, que l’on va relocaliser l’économie sans se poser la
question de la politique industrielle du pays est au mieux une naïveté, au pire
un mensonge. En finir avec la division internationale du travail, inique
socialement et absurde écologiquement, revient à planifier le retour de la
production dans notre pays. Réindustrialiser le pays, c’est revenir à une
production locale pour une consommation locale. C’est lutter contre la double
logique d’une production à bas coûts qui fait du moins-disant écologique la
norme.
La planification
écologique est le levier qui permettra d’identifier les filières stratégiques
en termes d’intérêt général de manière démocratique, par des décisions
collectives et citoyennes. Mais ce n’est pas suffisant. Il faut oser prononcer
et revendiquer à nouveau le mot de protectionnisme, comme un mot décisif contre
l’idéologie dominante qui nous pousse à accepter avec fatalité la déflation
salariale au nom de la liberté de réaliser des profits.
En refusant de ratifier la
Charte de La Havane en 1948, le Sénat
américain a refusé la naissance d’une organisation internationale du commerce
basée sur la coopération et a imposé l’OMC telle que nous la connaissons
aujourd’hui. Elle n’a eu de cesse d’engendrer la déflation salariale, la
prédation des ressources naturelles et l’augmentation des inégalités. S’en
protéger n’est pas une mesure liberticide mais bien une condition nécessaire à
l’émancipation. Le protectionnisme écologique et social que nous proposons de
mettre en œuvre permettra de financer en partie la relocalisation de l’activité
ainsi que la reconversion écologique des secteurs. Nous pouvons également
imaginer qu’une partie des fonds récoltés par la taxation des marchandises
permette de financer des accords de coopération commerciale bilatéraux pour
établir de nouveaux rapports de force avec les tenants du libre-échange.
Relocaliser,
réindustrialiser et reconvertir est pour nous le triptyque indissociable d’une
politique cohérente. La relocalisation est donc une question éminemment
politique en ce qu’elle est l’outil qui réinterroge complètement et
collectivement les rapports sociaux de production actuels et ne pourra se
réaliser qu’avec la remise à plat complète de la production actuelle ou future
et en faisant de «l’humain» la logique ultime et essentielle des décisions.
Mathieu Agostini
http://ecosocialisme.com/2012/11/13/180/#more-180Ce
Manifeste des Assises pour l’écosocialisme s’inscrit dans la lignée du
Manifeste international de l’écosocialisme publié en 2002 ainsi que de la
déclaration écosocialiste de Belem de 2009, pour ouvrir la voie à un nouveau
projet politique. Il a été très largement soumis à débat dans le cadre des
Assises pour l’écosocialisme organisées par le Parti de Gauche le 1er décembre
2012. Depuis, 133 amendements de fond, émanant de plus une trentaine d’auteurs
d’horizons divers ont été reçus et traités. Cette synthèse est proposée à
toutes celles et ceux qui le souhaitent, organisations et individus, en France
et à l’international, qui se reconnaissent dans l’écosocialisme.
Corinne
Morel-Darleux
Extrait de son blog :
Je porte le constat que l'écologie est incompatible avec le capitalisme et que
nous devons rompre avec le productivisme, la société de consommation et la
logique de marchandisation de toutes les activités humaines. Si nous devons
mener la bataille au niveau des institutions et mener la « révolution par
les urnes » en nous présentant devant le suffrage populaire, nous devons
également soutenir les luttes, sur le terrain, contre toutes les formes
d'exploitation. Il faudra bien ça pour redonner aux citoyen-ne-s le goût de la
politique, la vraie. Celle qui croit encore qu'il est possible d'influer sur le
cours des choses, de réenchanter le monde et d'agir pour l'intérêt général.
Parce que les institutions actuelles, tant au niveau de l'Union européenne que
de la Ve république en France, sont incompatibles avec la bataille culturelle,
sociale et écologique, que nous devons mener, il nous faut engager un vaste
mouvement de renouvellement des pratiques politiques et gagner en démocratie
active et populaire.
C'est forte de ces
convictions que j'ai
été candidate aux dernières élections législatives en 2012 face au sortant UMP
Hervé Mariton, après un baptême du feu en 2009 aux européennes avec le Front de
Gauche dans le Sud Est et les élections régionales de 2010 avec la liste
"Ensemble pour des régions à gauche". Tout en militant activement
pour le revenu maximum, la défense des retraites, contre les plans d'austérité
et la confiscation de la souveraineté populaire, pour la transition énergétique
et la sobriété en lieu et place du nucléaire et des gaz de schiste, en faveur
de l'application du droit international en Palestine, de la régularisation des
sans papiers, de la réquisition des logements vides ou encore du non cumul des
mandats.
L'urgence est à la mise en
œuvre d'un projet radical de changement, le vrai. Intérêt général, dépassement
du système capitaliste et véritable politique de gauche, fraternelle et
solidaire, à tous les niveaux. Voilà ce que nous devons défendre de manière
forte, sincère et engagée. Pour un autre progrès humain, social et écologique,
au service de tous.
Militons en faveur de la convergence entre les combats écologiques, l’impératif de justice sociale et le respect de la souveraineté populaire!
Militons en faveur de la convergence entre les combats écologiques, l’impératif de justice sociale et le respect de la souveraineté populaire!
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