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mercredi 6 février 2013

Transition énergétique : le débat est lancé...

Interview de Laurence Tubiana «facilitatrice» du débat national sur la transition énergétique



...Ce n’est pas un débat pour les techniciens et les experts car c’est un débat sur les modes de vie: dans quelles villes on veut habiter dans 10 ans?  A quoi devront-elles ressembler? Comment aurons-nous envie de nous transporter, de nous nourrir, de passer nos loisirs: le débat sur l’énergie c’est ça!
Prochaine réunion chez Georges et Anna Roussel à Rourebel  (la BelleVie )  à Espenel-26
le mercredi 13 février 2013 à 18 heures. On casse la croute ensemble. Les Quatres asso organisent le Débat sur la Biovallée de la Drôme : Association Dioise  pour la Transition Énergétique, Écologie au Quotidien,  Énergie Citoyenne-Val de Drôme et Dryade.( Et les CLD Vallée de la Drôme et CLDD du Pays Diois sont invités, ainsi que les Groupes Transition du Val de Drôme)
Peut-on décentraliser la production d'énergie en France?
Une question centrale de ce débat et nouvelle pour la France. Encore une fois mon avis n’est pas le plus important mais en revanche c’est un sujet majeur: comment les collectivités utilisent les ressources locales - biomasse par exemple - déchets agricoles ménagers- comme la production par les renouvelables? Comment cette production se combine avec la production centralisée? J’espère qu’on pourra apprendre de toutes les expérimentations et innovations qui sont menées partout en France. Il ne faut pas oublier le rôle de toutes les technologies de l’information: elles vont révolutionner aussi nos usages et la manière de  s’organiser.
Pourriez-vous nous préciser les pistes qui sont explorées dans le cadre de la transition énergétique? 
On débutera les travaux sur le financement de la transition énergétique  à la fin du mois de février. La question de la fiscalité  est sur la table. Il n’y aura sûrement pas une seule solution débattue. Il faudra revenir aussi sur les problèmes rencontrés par la taxe carbone donc, on en reparle, mais dans quelques temps? 
Que pensez-vous de la tarification progressive de l'énergie?
Comme facilitatrice mon rôle n’est pas de donner mon avis et de défendre telle ou telle option. Je comprends l’idée de tarification progressive aussi comme un moyen d’inciter à la modération de la demande d’énergie dans les foyers. Et de lutter contre la précarité énergétique  Il faut maintenant voir comment la loi qui vient d’être votée va remplir ces objectifs.
Le photovoltaïque a-t-il encore un avenir en France?
Le débat devrait permettre de mettre tous ces éléments sur la table. On attend des experts qu’ils nous donnent ces éléments et cela pour les différentes générations des technologies. Après il faudra faire des choix entre les risques que l’on accepte ou qu’on refuse.
Que faire de tous ces logements chauffés avec les fameux «grille-pain», des convecteurs électriques très énergivores mais difficiles à remplacer par un autre système de chauffage sans investissements lourds? Le prix de l'électricité en France, un des plus bas d'Europe, n'est-il pas un frein à la généralisation d'un autre mode de chauffage plus efficace et quid des lobbies de l'électricité?
Le point d’entrée du débat est cette affaire de maîtrise de la demande. Cela passe par l’isolation des bâtiments comme par des solutions efficaces en matière de chauffage. Cela va représenter des investissements qui peuvent être rentables mais seulement dans la durée. Le gros sujet sera les systèmes de financement qui sont au cœur du débat de la transition énergétique. C’est le problème du financement qui bloque aujourd’hui les transformations et la question des prix fait partie de l’équation.
Ce débat pourra-t-il réellement infléchir les décisions du gouvernement concernant le nucléaire? Le sujet sera-t-il même débattu?
Aucun sujet tabou. Mais le gouvernement s’est fait élire sur une option, il lui appartient ensuite de maintenir ce choix et de le mettre en œuvre. Le débat va quand même bien au delà de la part du nucléaire dans la production électrique, l’essentiel de notre énergie en France vient des énergies fossiles, l’efficacité énergétique peut créer des emplois et réduire notre dépendance extérieure. Mais, pour vous rassurer, les scénarios avec beaucoup de nucléaire ou pas du tout de nucléaire seront étudiés et débattus.
Serions-nous complexés? Lorsqu'on voyage à travers le monde, on peut noter les différents choix politiques. La France a longtemps fait le choix du nucléaire. De nombreux autres pays, pas forcément plus riches, ont fait le choix du renouvelable. Que faire de nos centrales? Les maintenir bien sûr. La demande énergétique est sans cesse croissante, quid des économies d'énergie? Nous avons dix ans de retard sur le photovoltaïque par rapport a certains pays (Japon Italie), si l'état décide de promouvoir la filière, les prix s'envolent et augmentent de la valeur des aides gouvernementales attribuées. Prévoir un comité de surveillance? En résumé, je pense qu’il faut combler l'augmentation de la demande par les dispositifs moins énergivore et le renouvelable maîtrisé. Qu’en pensez-vous?
Je pense surtout qu’il faut s’attaquer à la maîtrise de la demande. On peut vivre mieux en consommant beaucoup moins d’énergie dans l'industrie comme dans les transports ou l'habitat. La consommation d’énergie en France stagne depuis plusieurs années et cela bien avant la crise. En Allemagne, au Danemark ou en Suède elle a décru pour certains secteurs. Donc priorité a cette maîtrise de la demande sur laquelle on est en retard et c’est le point d’entrée du débat. Pour le reste le débat permettra d’éclairer les choix: quelles sources, quelle production: centralisée ou décentralisée? 
Quelle est la place que doivent jouer les experts dans la transition énergétique?
Les experts doivent obliger le débat à s’appuyer sur des faits vérifiés et des chiffres cohérents. Ce n’est pas un débat d’ «opinions» mais un débat qui doit formuler des options sérieuses et qui partent de la réalité du système énergétique français. Ils doivent aussi nous faire réfléchir sur les expériences et les politiques menées ailleurs. En revanche, les experts ne sont pas là pour dire  ce qui est la meilleure option: ils doivent «éclairer» les choix pas les dicter.
L’Allemagne est souvent montrée en exemple en terme de transition énergétique avec plus de 10% de la production d'énergie renouvelable, cependant cette transition n'a été possible qu'en ayant recours aux centrales à charbon qui fait aujourd'hui de l'Allemagne le pays qui émet le plus de CO2 en Europe. Que pensez-vous de ce paradoxe écologique?
Il faut regarder la politique allemande dans la durée. La politique de l’énergie de ce pays est très différente de la nôtre. Elle s'appuie sur les collectivités locales, l’investissement privé «individuel» dans les  énergies renouvelables et sur des petites et moyennes entreprises qui ont fait de l'efficacité énergétique un métier. L’accent a été mis sur la maîtrise de la demande  seule condition de pouvoir réussir leur pari des renouvelables. Comme le rejet du nucléaire est ancien et profond il faut donc que l’Allemagne trouve d’autres solutions car leur engagement dans la réduction des GES est ambitieux aussi. Il est tôt pour savoir si l’Allemagne va réussir ou échouer mais il faut apprendre de leur effort de réduction de la demande et de développement industriel.
Pourriez-vous nous préciser votre rôle de «facilitatrice»? Quels sont les profils des membres qui travailleront sur ce débat?
Comme facilitatrice, je dois m’assurer que tout se déroule bien, qu’aucun sujet n’est écarté et que toutes les interventions sont écoutées. Je suis là aussi pour créer de la confiance et amener les différents participants à surmonter leurs divergences quand c’est possible et a comprendre leurs différences quand le consensus n’est pas possible. Les autres membres du comité de pilotage sont soit comme moi, plutôt venant de l’université, ou sinon du monde des acteurs économiques et aussi des spécialistes du débat public.
Est-il possible de nous présenter et expliquer en quoi consiste ce débat national sur la transition énergétique? Quelles différences avec le Grenelle de l'environnement de Sarkozy?
Bonjour. Comparé au Grenelle de l’environnement, ce débat est beaucoup plus large du point de vue de la thématique de l’énergie car il doit proposer des recommandations sur la maîtrise de l'énergie, sur l’offre  - d'où vient la production -  sur les activités économiques liées à l'énergie; Il est aussi plus large du point de vue des participants, toutes les régions participent mais aussi les citoyens directement. Le Grenelle c'était un débat entre les associations, les syndicats et les collectivités locales au niveau national.
La grande concertation nationale sur la transition énergétique est lancée: durant plusieurs mois, les citoyens sont appelés à participer à la définition des grands axes de la politique énergétique de la France. 
Promesse de campagne de François Hollande, ce grand débat sera piloté par un comité dont Laurence Tubiana, directrice de la chaire de développement durable à Sciences Po Paris, est membre. Elle y occupe notamment le poste de «facilitatrice» des échanges entre les nombreux comités et conseils qui plancheront sur le sujet.
Audrey Chauvet

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