C'est une victoire pour
la compagnie pétrolière américaine voyouE Schuepbach. Mercredi 26 juin, le rapporteur public du Conseil d'Etat,
Suzanne von Coester, a recommandé le renvoi au Conseil constitutionnel d'une
question prioritaire de constitutionnalité (QPC) déposée par l'entreprise
texane. Une Question Prioritaire Constitutionnelle explosive. Elle concerne la
loi du 13 juillet 2011 - dite loi Jacob puisque le président du groupe UMP à
l'assemblée nationale Christian Jacob en était à l'initiative - qui interdit
la fracturation hydraulique en France, seule technique aujourd'hui
disponible pour l'exploitation du gaz et du pétrole de schiste mais dont les
risques pour l'environnement ont été jugés trop élevés.
L'avis du rapporteur
public étant généralement suivi par ses pairs, il est fort probable que le
Conseil d'Etat décide d'ici une quinzaine de jours de saisir le Conseil
constitutionnel, qui aura trois mois pour indiquer si la loi Jacob est oui ou
non conforme à la constitution.
Comment et pourquoi la
société Schuepbach mène-t-elle cette bataille juridique antidémocratiquement ?
La société américaine se
bat contre l'abrogation, en octobre 2011, par le gouvernement Fillon de ses
deux permis exclusifs de recherche d'hydrocarbures liquides ou gazeux dans le
sud-est de la France, qui lui avaient été accordés un an plus tôt. La société
avait confirmé vouloir utiliser la fracturation hydraulique, devenue interdite
par la loi Jacob.
L'entreprise se tourne
alors vers le tribunal administratif de Cergy-Pontoise et le saisit en janvier
2013 d'une QPC sur la loi du 13 juillet 2011. Pour dissuader le président du
tribunal administratif de Cergy Pontoise de la transmettre au Conseil d'Etat,
les services de Delphine Batho, ministre de l'écologie, lui adressent un
argumentaire juridique ("un mémoire en défense"). Mais le
ministère ( la démocratie) perd cette
première bataille. Le recours de Schuepbach poursuit son chemin.
La société attaque la loi
du 13 juillet en s'appuyant sur deux arguments principaux.
Le premier est que le
texte porte atteinte aux conditions de mise en oeuvre du principe de précaution
inscrites dans la Charte de l'environnement. Comment? En ne prévoyant
"aucune procédure d'évaluation des risques" liés à la fracturation
hydraulique. Un comble…
Le second est que, selon
Schuepbach, la loi revêt un caractère discriminatoire dans la mesure où elle ne
concerne que les hydrocarbures liquides et gazeux et non la géothermie sans
pollution [pour laquelle la fracturation est, selon l'entreprise, également
utilisée].
Pourquoi le rapporteur
public du Conseil d'Etat a-t-il recommandé la transmission de la QPC au Conseil
constitutionnel ?
Si Madame von Coester
estime que le caractère discriminatoire de la loi n'est pas à retenir - puisque
selon ses conclusions, les modalités de fracturation pour la géothermie et pour
les huiles et gaz de schiste ne sont pas identiques - elle a jugé en revanche
que l'argument lié au principe de précaution est une question qui mérite d'être
posée au Conseil constitutionnel. D'autant - et c'est une condition majeure
pour que le Conseil d'Etat transmette une QPC au Conseil constitutionnel - que
cette demande n'a jamais été faite auparavant. Ce caractère nouveau de la
demande a beaucoup pesé dans la balance.
Que se passerait-t-il
si le conseil constitutionnel déclarait à la rentrée la loi Jacob non conforme
à la constitution?
Si la loi est recalée,
l'abrogation de tous les permis - ceux de Schupebach mais aussi ceux de Total
par exemple - au nom de l'utilisation de la fracturation hydraulique ne serait
plus justifiée. Les entreprises pourraient donc représenter leurs dossiers.
Vers une vraie
révolution populaire dans les campagnes…
Une hypothèse
invraisemblable selon la ministre de l'écologie Delphine Batho. "Le lobby
des gaz de schiste n'obtiendra pas par une guérilla juridique ce que la
mobilisation citoyenne a empêché", explique-t-elle, faisant référence aux
nombreuses manifestations lancées en 2010 dans le sud-est de la France et dans
la région parisienne. "S'il le faut, le gouvernement n'hésitera pas à
reproposer un texte à l'assemblée nationale, mais nous n'en sommes pas encore
là".
Mais le front du
gouvernement sera-t-il aussi unanime? Arnaud
Montebourg le ministre du productivisme exacerbé n'a jamais caché son
opposition à la loi du 13 juillet, soutenant les industriels, y compris les
voyous, désireux de pouvoir au moins
explorer le sous-sol français pour évaluer les réserves d'huile et de gaz de
schiste. La nouvelle loi, s'il devait en avoir une, interdirait-elle des
expérimentations? En période de crise économique, les arguments des compagnies
pétrolières sur les bienfaits d'une exploitation de ces hydrocarbures non
conventionnels susceptibles, selon eux, de réduire la facture énergétique
française, pourraient peser face à ceux des défenseurs de l'environnement et de
la grande majorité des habitants ( 70% les ruraux sont contre le destruction de
leur territoire par les trusts du pétrole). "La position du gouvernement
ne changera pas, affirme Madame Batho, y compris pour les campagnes
d'exploration".
Ecologie au Quotidien
Chastel
26150 Die
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