Le blé que nous consommons tous les jours et qui
est une source essentielle d'énergie aurait des effets néfastes pour la santé.
En effet, certains nutritionnistes estiment que le blé favoriserait l'obésité ! Mais qu'en
est-il réellement ? Le blé est la céréale la plus cultivée au monde. Près
de 95% de blé cultivé (triticum aestivum) est destiné à la fabrication de pain,
les 5% restants pour faire des pâtes. On distingue deux espèces de blé : le blé
tendre et le blé dur. Ils se différencient par la friabilité de l'amande, qui
est plus importante pour le blé tendre et permet la transformation en farine,
alors que le blé dur est plus apte à se transformer en semoule. Ainsi, le blé
tendre est utilisé pour la panification (le pain), la pâtisserie, la
biscuiterie. Alors que le blé dur est utilisé pour les pâtes alimentaires, les
semoules, les couscous. Le blé à pain est une espèce assez récente, apparue en
Turquie il y a approximativement 9 000 ans, d'un croisement probable entre une
forme cultivée de blé tétraploïde (dont les cellules contiennent quatre copies
de ses chromosomes plutôt que 1 comme c'est le cas chez les humains) et de
graminées sauvages connexes. Il n'est pas nécessaire d'enlever la « coque » du
blé à pâtes, blé qui est bien plus adapté à notre climat méditerranéen que le
blé à pain, ce qui lui donne une teneur en fibre bien plus élevée quand il est
consommé sous forme complète.
Le blé est-il mauvais pour la santé ?
Les hommes consomment du
blé depuis plusieurs millénaires et c'est même devenu, pour certaines
populations, une source principale d'énergie. En Turquie, lieu de naissance du
blé, par exemple, la consommation de blé est devenue une source d'énergie
indispensable qui ne cause ni embonpoint ni maladies chroniques notables.
Diverses études récentes [1] ont suggéré que l'ingestion de blé avait des
effets négatifs sur le corps humain, certains vont même jusqu'à accuser le blé
d'obésité, plutôt que d'accuser le mode de vie et l'alimentation de ceux
concernés. Afin d'en savoir plus, Fred J.P.H. Brouns et Vincent J. van Buul, du
département Biologie Humaine, Management de l'Innovation de la Nourriture
Saine, de l'Université de Maastricht, au Danemark, et Peter R. Shewry, de
l'Unité de recherche de Rothamsted, en Angleterre, ont épluché les études
scientifiques sur le sujet afin d'en tirer des conclusions objectives et
consensuelles. Leurs recherches montrent qu'il n'existe aucune étude
scientifique qui démontre que le blé ait des effets néfastes sur la santé.
Quels sont les effets du blé sur la santé ?
Bien sûr, certains
individus ont des prédispositions génétiques qui les exposent à des effets
négatifs, cependant, on ne doit pas généraliser ces cas, comme le démontrent
cinq études récentes sur l'impact de la consommation de céréales sur la santé.
Ces études ont conclu que la consommation de céréales complètes (dont le blé)
entraîne généralement des effets positifs sur la santé. Ces études recommandent
donc la présence de céréales dans les régimes alimentaires. Tant que la
consommation de blé n'est pas exagérée, elle présente de nombreux bénéfices sur
la santé : l'ingestion régulière de blé est liée avec des risques réduits de
diabète de type 2 et de maladies cardiovasculaires ainsi qu'à des régimes à
long termes plus favorables. Molenaar [2] a démontré que ceux qui mangeaient
les quantités recommandées de blé complet avaient le moins d'accumulation de
graisse viscérale/de tissu adipeux.
Quid des personnes intolérantes au gluten ?
Il y a bien sur des
individus qui ont des prédispositions génétiques et qui développent notamment
la maladie cœliaque [3] (intolérance au gluten). Ceux-ci privilégient donc un
régime alimentaire qui exclut le blé et autres céréales qui contiennent des
protéines similaires comme l'engrain, l'amidonnier, l'épeautre, le seigle ou
l'orge. Environ 1% de la population en Europe et aux Etats Unis, souffrent de
maladie cœliaque et 5 à 10% sont sensibles au gluten (cette intolérance est
assez difficile à diagnostiquer et la part de personnes concernées pourrait
être bien plus élevée). Ces populations, ont encore trop peu de choix
d'aliments nutritifs et les auteurs de l'étude soulignent le fait qu'il
faudrait diversifier les produits alimentaires de grande consommation, en
favorisant davantage de cutures qui ne contiennent pas de protéines reliées au
gluten, comme le teff ou tef, l'amarante, l'avoine, le quinoa ou le chia. Pour
ceux qui sont concernés par cette intolérance au gluten, sachez que les
développements dans ce domaine sont considérables, avec de nombreuses
stratégies pour réduire l'exposition au gluten, comme la réduction d'épitropes
immunogènes (coeliaque) dans les produits alimentaires ou les grains existants
qui contiennent du gluten, la production d'aliments salubres et sans gluten
garanti, ainsi que l'augmentation des cultures qui ne contiennent pas de
protéines liées au gluten. Enfin, les auteurs disent que les accusations
actuelles envers le blé génétiquement modifié ne sont pas justifiées, ce qui ne
veut pas dire qu'elles ne le seront pas un jour… Souvenez-vous, on ne
connaissait pas les effets néfastes du tabac sur la santé avant d'en avoir fait
le plus important commerce mondial.
Notes
1 - CBS, 2012. Modern wheat a "perfect, chronic poison," doctor says. In:
Farber, D.(Ed.), CBS News. CBS This Morning, New York. Jönsson, T., Ahrén, B.,
Pacini, G., Sundler, F., Wierup, N., Steen, S., Sjoberg, T., Ugander, M.,
Frostegard, J., Goransson Lindeberg, S., 2006. A paleolithic diet confers
higher insulin sensitivity, lower c-reactive protein and lower blood pressure
than a cereal-based diet in domestic pigs. Nutrition and Metabolism 3, 39.
Jönsson, T., Olsson, S., Ahrén, B., Bøg-Hansen, T.C., Dole, A., Lindeberg, S.,
2005. Agrarian diet and diseases of affluence--do evolutionary novel dietary
lectins cause leptin resistance? BMC Endocrine Disorders 5, 10. Rose, M., 2011.
#gluten, #depression and Brain/neuro Problems. TrulyGlutenFree, Manchester, UK.
Davis,W.R., 2011. Wheat Belly: Lose the Wheat, Lose theWeight, and Find Your Path
Back to Health. Rodale Books.
2- Molenaar, E.A., Massaro, J.M., Jacques, P.F., Pou, K.M., Ellison,
R.C., Hoffmann, U., Pencina, K., Shadwick, S.D., Vasan, R.S., O'Donnell, C.J.,
2009. Association of lifestyle factors with abdominal subcutaneous and visceral
adiposity the Framingham heart study. Diabetes Care 32, 505e510.
3- La maladie cœliaque est une affection auto-immune provoquée par une
intolérance au gluten, une protéine présente dans le blé, le seigle et l'orge.
Certaines personnes sont aussi sensibles à l'avoine. L'intolérance au gluten
induit une inflammation de l'intestin grêle entraînant une malabsorption des
nutriments, d'où le risque accru de carences, d'anémie et d'ostéoporose. Les
symptômes de cette maladie varient et peuvent engendrer des douleurs
digestives, un retard de croissance, des éruptions cutanées ou une infertilité.
- En savoir plus : augmentation des cas de maladie
cœliaque en Europe - EUFIC
- Référence Brouns FJPH, van Buul VJ & Shewry
PR. (2013). Does wheat make us fat and sick? Journal of Cereal Science 58(2) :
209215. doi: 10.1016/j.jcs.2013.06.002.
Elodie G.T.
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