C’est une crainte qui
n’est plus diffuse, mais qui pèse de plus en plus lourdement. La statistique
qui affole les dirigeants européens désormais n’est plus le spread de taux d’intérêt ou le niveau d’endettement des
pays du sud de l’Europe. C’est le taux de chômage des jeunes qui est qualifié,
même par les officiels allemands et français, d’extrêmement dangereux. Les
jeunes grecs et espagnols sont parmi les plus touchés, mais de nouvelles
statistiques montrent à quel point les Belges et les Français notamment sont
également touchés. Los ninis, les « ninis » : c’est la nouvelle
appellation donnée à ces jeunes qui ne sont ni à l’école ni au travail. Ils
sont 24 % en Espagne dans la classe d’âge allant de 15 à 29 ans, mais
ils sont aussi 13,0 % en Belgique. Seule la France dans les pays voisins
fait « mieux » que nous, avec un taux officiel de 16,9 %.
Ce taux de chômage des jeunes est tel aujourd’hui
qu’il fait craindre une grande agitation, voire carrément une explosion. Lorsque les dirigeants socialistes réunis hier
pour lancer des pistes d’action évoquent la mise en danger potentielle de nos
démocraties, ils ne sont pas loin de la vérité. Une jeunesse sans travail,
c’est une génération perdue, et une génération perdue est, outre un échec
terrible pour une démocratie, une bombe à retardement pour toute société. Les
dirigeants aux commandes de l’Europe aujourd’hui ont également – finalement,
diront certains – compris le message, et ont fait de ce point crucial l’un des
éléments clés du sommet qui s’ouvre en cette fin de semaine. Le ministre
allemand des Finances, Wolfgang Schäuble, présenté comme le personnage le plus
craint et le plus puissant de la zone euro, a lui même à plusieurs reprises ces
derniers temps évoqué le risque social que faisait peser cette proportion
« inacceptable » de chômage chez les jeunes.
Mais c’est une course
contre la montre qui s’est engagée. Il ne faut en effet pas donner seulement
des raisons d’espérer, mais du travail aux jeunes européens. C’est beaucoup
plus compliqué. Le temps presse, tant socialement – le risque de manifestations
ou de mouvements brutaux devient réel – que politiquement –, le vote massif
pour les partis extrémistes lors des élections de mai prochain est désormais
fortement redouté. La nouvelle bombe européenne a de 15 à 29 ans. Le modèle
social européen ne conservera sa validité et sa pérennité que s’il arrive à la
désamorcer.
Béatrice Delvaux
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