Tribune De nombreuses associations environnementales, d'urbanistes, de
cyclistes ont lancé une Initiative citoyenne européenne pour la généralisation
d'une vitesse à 30 km/h sur la voirie urbaine. Eclairage par les représentants
des principales organisations françaises qui soutiennent le projet.
La rue
n’est pas seulement un espace de circulation, c’est aussi un espace de vie.
L’automobile a un rôle à jouer en ville mais il faut remettre cette
«centenaire» à sa juste place : la rue n’est pas la route. Pour cette
raison, de nombreuses associations françaises soutiennent l’Initiative
citoyenne européenne pour la généralisation du 30 km/h comme vitesse
de référence en ville (www.ville30.org). Les objectifs sont
multiples : assurer une meilleure sécurité des usagers de la rue (dans un
choc à 30 km/h, la probabilité pour un piéton d’être tué est
de 15% ; à 50 km/h, elle passe à 60%) ; réduire le
bruit et la pollution de l’air dus au trafic urbain ; inciter les citadins
à privilégier la marche et le vélo pour les déplacements de proximité ;
plus généralement, pacifier la ville et la rendre plus conviviale. Cette
initiative suscite cependant diverses incompréhensions et objections.
Aujourd’hui,
la vitesse est limitée à 50 km/h en ville, sauf dans les
zones 30 et les zones de rencontre (20 km/h). Il ne s’agit pas
d’abaisser uniformément la vitesse à 30 km/h dans toute la ville,
mais d’inverser la règle et l’exception : la vitesse de 30 km/h est
la mieux adaptée sur 80 % de la voirie urbaine (zones résidentielles, rues
commerçantes, voisinage des écoles). Elle facilite aussi un usage tranquille du
vélo sans aménagements spécifiques. Le 50 km/h restera autorisé sur les
axes de liaison entre quartiers, les rues empruntées par les bus des lignes
structurantes et les boulevards dédiés au trafic de transit. Le maintien d’une
vitesse à 50 km/h en zone urbaine ne permet pas le plein exercice du
principe de prudence : à 50 km/h un choc frontal est le plus
souvent mortel.
En ville,
un automobiliste ne roule pas à vitesse constante mais effectue une succession
d’accélérations et de freinages. L’évitement de pointes de vitesse et la
réduction des arrêts, grâce à la suppression de certains feux ou stops devenus
inutiles, permet une conduite moins saccadée et moins génératrice de pollution.
Par ailleurs une limite de vitesse à 30 km/h permet une réduction du
bruit d’environ 3 dB(A) [dB(A) est utilisé pour mesurer les bruits
environnementaux, 0 dB(A) étant le seuil d'audibilité pour l'oreille humaine,
ndlr] par rapport à une limite à 50 km/h, ce qui est
équivalent à une réduction de moitié du volume du trafic. Et, c’est le
développement des déplacements à pied et à vélo, rendu possible par
l’apaisement des vitesses, qui entraînera la plus forte réduction des
nuisances.
Contrairement
à une autre idée reçue, une limitation à 30 ne crée pas de bouchons et ne
fait perdre qu’un temps négligeable aux automobilistes. Un test sur un
itinéraire toulousain de 7,6 km a montré que le temps de parcours
moyen passe de vingt-quatre minutes avec une limite à 50 km/h
à vingt-sept minutes avec une limite à 30 km/h. Or, la
moitié des déplacements urbains se fait sur moins de 3 kilomètres. Une
seule vie épargnée vaut bien un effort collectif de réduction de la vitesse !
L’extension
de zones 30 à la quasi-totalité d’une ville est efficace sur le plan de la
sécurité et de la qualité de vie. Graz, deuxième ville autrichienne (250
000 habitants), a été la première ville en Europe à mettre en place,
en 1992, une zone 30 sur l’ensemble de son centre-ville et 80% de la
population approuve ce choix. Près de 15% des Britanniques vivent -
20% demain - dans des villes à 20 mph (32 km/h).
En
France, cette mesure est déjà en vigueur dans plus d’une quinzaine de
villes : Sceaux, Fontainebleau, Clamart, Lorient et les projets sont
nombreux (Angers, Rennes, Toulouse, Dijon, Paris…). Il n’y a pas
si longtemps, on disait : «Le tramway, c’est bon pour les
Suisses ; le vélo, pour les Néerlandais.» Mais le tramway a été
adopté dans une vingtaine de villes françaises et connaît un grand succès, et
la pratique du vélo ne se développe pas qu’à Strasbourg. Les innovations
volontaristes font toujours peur : zones piétonne et de rencontre, tramway,
aménagements cyclables, 30 km/h. Mais une fois en place, elles sont
plébiscitées !
Par JEAN SIVARDIÈRE
Président de la Fédération nationale des associations d’usagers des transports
(Fnaut), ANNE
FAURE Présidente de Rue de
l’avenir , GENEVIÈVE
LAFERRÈRE Présidente de la FUB
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