Mercredi 16 novembre 2011 à l’ancien évêché.
Il existe à Die une petite merveille à laquelle on ne peut accéder par hasard. Rendez-vous donc à l'Office du Tourisme et bénéficiez de la visite commentée de la Chapelle Saint Nicolas, anciennement chapelle privée des évêques, qui abrite la Mosaïque des quatre fleuves. En bel état de conservation, elle symbolise l'univers. Des fresques du moyen-âge et des papiers peints du XVIIIème siècle habillent les murs.
Cette mosaïque mêle symbolique de la création, de la géographie et du cosmos. Au centre, autour d'une étoile à huit branches, douze cercles évoquent les mois de l'année ou les signes du zodiaque. Un disque dans lequel sont inscrits les noms des quatre fleuves du jardin d'Eden englobe le tout. Le Ghéon et le Fison sont mythologiques et le Tigre et l'Euphrate sont réels. Ils trouvent leur source dans des têtes d'hommes barbues avec des oreilles d'animaux. Dans chacune de ces têtes, on peut voir l'un des quatre évangélistes reconnus par l'Eglise. Auprès des fleuves, figure la création, des plantes, des animaux et des êtres imaginaires. Les planètes ou les astres sont représenté par des rosaces ou des fleurs dans des cercles. Elle présente, sur une surface quadrangulaire, une synthèse entre l’idée de la Création et la symbolique géographique et cosmique du monde. Au centre, les douze boules symboliseraient les douze mois de l’année ou les signes du zodiaque. Puis, autour figurent les inscriptions des quatre fleuves – le Pishôn, le Gihôn, l’Euphrate et le Tigre – eux-mêmes personnifiés par des têtes d’hommes barbus avec des oreilles d’animaux. Ils crachent des flots en trois files et font naître une faune terrestre, des plantes, des volatiles en lutte et des êtres fabuleux. Sont également représentés des planètes ou astres, sous forme de rosaces ou fleurs stylisés dans un cercle. Les figurations des vents sont situées, comme sur la mosaïque de Saint-Sauveur de Turin ou les cartes géographiques, à l’extérieur de la mer circulaire qui entoure la terre.
Ce pavement se comprend dans le cadre des efforts encyclopédiques, que l’on constate au XIIe siècle pour figurer l’image du monde telle qu’elle nous apparaît sur la rose de Lausanne par exemple. A cette époque, la géographie s’est constituée une place particulière dans la littérature en intégrant récits de voyages, descriptions du monde et considérations philosophiques. La géographie arabe est notamment à son apogée, en témoigne la géographie d’al-Idrîsî qui pénètre en Occident par la Sicile. Au même moment, apparaissent des compilations qui traitent non seulement de géographie mais aussi de cosmologie, d’astrologie ou d’autres matières de cet ordre. Dans les églises médiévales, le pavement demeure le support idéal de cette idée cosmique et géographique, aussi bien en Orient qu’en Occident. Dans une description du XIIe siècle de Sainte-Sophie de Constantinople, on insiste sur le fait que le pavement est comme une mer, dans sa largeur comme dans sa forme. A Die, la mosaïque servait de tapis d’autel et avait un but didactique et symbolique, elle était très certainement partie intégrante de l’iconographie globale de la chapelle.
La mosaïque des quatre fleuves est une mosaïque romane, située dans la chapelle Saint-Nicolas de l'ancien palais épiscopal de Die, où elle servait de tapis d'autel. Elle est la représentation symbolique de l'univers.
Elle représente donc les quatre fleuves qui abreuveraient le jardin d'Eden mentionnés dans la Bible, dans le deuxième chapitre de la Génèse (Gn II,11 & 12). Ceux-ci sont figurés partant, du motif central circulaire, et dirigés vers les angles de la mosaïque. Ils sont nommés dans un cartouche circulaire, avec une orthographe approximative :
Geon (le Gihon dans la Bible)
Gihôn (en hébreu : גִּיחוֹן, Gi'hon) est un fleuve mentionné dans la Bible, dans le deuxième chapitre de la Génèse (Gn II,11 & 12). Gi'hôn pourrait signifier en hébreu impétueux, ou venir de GI EN en sumérien qui signifie « Les Grands Ancêtres », « Les Magnifiques Anciens ».
Selon la Génèse, le Gihon, qui traversait le pays de Koush , un nom lié à L’Ethiopie, était l'un des quatre fleuves qui abreuveraient le jardin d'Eden,
Fison (le Pishon dans la Bible)
Pishon est le nom d'un fleuve mythique mentionné dans le deuxième chapitre du livre biblique de la Génèse (Gn II,13). Il constitue une des quatre fleuves qui irriguent Eden. Pishon traverse le pays de Havilah "où on trouve de l'or du bdellium et la pierre d'Onyx".
Certains travaux de recherche avancent l'hypothèse que la rivière Pishon est le Tchorokhi moderne qui s'écoule dans la Mer Noire proche de Batum.
Tigris (le Tigre)
Le nom sumérien original du Tigre était Idigna (eau courante). Ce nom était utilisé par les Akkadiens, qui l'appelaient Idiqlat. Puis, avec l'aide d'un intermédiaire perse ou directement via un akkadiens). Un autre nom attesté pour le Tigre est Arvand Rud qui a été utilisé durant le temps de l'empire perse.
Eufrates (l'Euphrate)
L'Euphrate (nom traditionnel grec du fleuve, Եփրատ en arménien , Firat en kurde , Ufrat en persan, Prâth/Frot en araméen , Al-Furat الفرات en arabe, Fırat en turc et Pu-rat-tu en assyrien) est un fleuve d'Asie de 2 780 km de long. Il forme avec le Tigre dans sa partie basse la Mésopotamie (du grec μεσο « milieu » et ποταμός « fleuve »), l'un des berceaux de la civilisation.
A cette dimension géographique et cosmique du monde, se superpose une symbolique religieuse. Les quatre fleuves du Paradis (Genèse, 2, 10-14) irriguent l’univers et donnent naissance à la Création, tant sur terre, dans la mer que dans l’air. On est face à une vision chrétienne du monde, une géographie du sacrée avec l’eau qui marque les limites de l’univers et la représentation des vents qui symbolisent les points cardinaux. Le Moyen Age cherche à promouvoir une unité spirituelle et à donner une image harmonieuse du monde. Ce dernier est envisagé comme un ensemble organique, dans lequel chaque chose occupe la place qui lui revient.
Toutefois, la mosaïque de Die n’a pas encore livré tous ses secrets. La présence d’objets curieux comme un couteau, un compas, une clef, une escarboucle demeure encore énigmatique. H. Desaye associe ces instruments aux symboles des quatre vertu cardinales : l’escarboucle pour la Prudence, le couteau pour la Tempérance, les ciseaux pour la Force et la clef pour la Justice. Mais, cette interprétation manque encore de fondements. De même, on a voulu voir dans cette mosaïque diverses étapes d'exécution en se fondant sur des différences de style importantes. Toutefois Barral i Altet considère tout le pavement comme homogène, fait sur place au même moment, mais probablement par différents artistes ou équipes qui ont laissé leur empreinte personnelle.
Office de Tourisme de Die
04 75 22 03 03
(Sur rendez vous et réservation)
Bibliographie
- BARRAL I ALTET X., « Les débuts de la mosaïque de pavement romane dans le Sud de la France et en Catalogne », Cahiers de Saint-Michel de Cuxa, 3, 1972, p. 117-130.
- BARRAL I ALTET X.« Poésie et iconographie : un pavement du XIIe siècle décrit par Bandi de Bourgmeuil », Dumbarton Oaks Papers, 41, 1987, Honor Kitzinger, p. 41-54.
- BEER J., Die Rose der Kathedrale von Lausanne und der kosmologische Bilderkreis des Mittelalters, Bern, 1952.
- BALTRUŠAITIS J., « Cosmographie chrétienne dans l’art du Moyen Age », La Gazette des Beaux-Arts, 1939, 60p.
- BENCHEIKH J.E., « L’espace de l’inintelligible : un ouvrage de cosmographie arabe au XIIIe siècle », Comptes rendus des séances de l’année – Académie des inscriptions et belles-lettres, 1988, no 01-03, p. 149-161.
- DESAYE, « La mosaïque de l’évêché de Die », Bulletin de la Société d’archéologie de la Drôme, LXXV, 1962, p. 230-248.
- MANGO C., PARKER J., « A Twelfth-Century Description of St. Sophia », Dumbarton Oaks Papers, 15, 1960, p. 233-245.
- STERN Henri, « Notes sur quelques mosaïques de pavement romanes », Cahiers archéologiques, 16, 1966, p. 135-144.
- La géographie arabe : http://classes.bnf.fr/idrisi/repere/arabe.htm
- BARRAL I ALTET X.« Poésie et iconographie : un pavement du XIIe siècle décrit par Bandi de Bourgmeuil », Dumbarton Oaks Papers, 41, 1987, Honor Kitzinger, p. 41-54.
- BEER J., Die Rose der Kathedrale von Lausanne und der kosmologische Bilderkreis des Mittelalters, Bern, 1952.
- BALTRUŠAITIS J., « Cosmographie chrétienne dans l’art du Moyen Age », La Gazette des Beaux-Arts, 1939, 60p.
- BENCHEIKH J.E., « L’espace de l’inintelligible : un ouvrage de cosmographie arabe au XIIIe siècle », Comptes rendus des séances de l’année – Académie des inscriptions et belles-lettres, 1988, no 01-03, p. 149-161.
- DESAYE, « La mosaïque de l’évêché de Die », Bulletin de la Société d’archéologie de la Drôme, LXXV, 1962, p. 230-248.
- MANGO C., PARKER J., « A Twelfth-Century Description of St. Sophia », Dumbarton Oaks Papers, 15, 1960, p. 233-245.
- STERN Henri, « Notes sur quelques mosaïques de pavement romanes », Cahiers archéologiques, 16, 1966, p. 135-144.
- La géographie arabe : http://classes.bnf.fr/idrisi/repere/arabe.htm
APL
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