Le Japon annonce sa sortie du nucléaire avant 2040
Le gouvernement japonais a adopté, vendredi 14 septembre, un plan visant à fermer tous les réacteurs nucléaires du pays avant 2040. Le Japon devient ainsi, après l’Allemagne, la deuxième puissance économique majeure à choisir un avenir sans nucléaire.
« Tirant les leçons de l’accident (de Fukushima), le gouvernement a décidé de réexaminer entièrement la stratégie énergétique, lit-on dans un document cité par Associated Press. L’un
des piliers de la nouvelle stratégie est de construire aussi vite que
possible une société qui ne dépende pas de l’énergie nucléaire. »
Le premier ministre Yoshihiko Noda a indiqué que son parti, le PDJ (parti démocrate japonais), était favorable à une sortie dès 2030. Mais Noda fait face à une forte opposition politique, et a sans doute dû transiger. Le plan du gouvernement, dévoilé le 7 septembre par l’Agence Kyodo News, prévoit de réduire la part du nucléaire dans la production d’électricité à 15 % d’ici 2030. Elle était de 30 % juste avant l’accident de Fukushima, et les prévisions établies en 2010 visaient à la porter à 50 % en 2030.
La décision du gouvernement Noda représente donc un virage à 180° de la politique énergétique japonaise, même si la sortie du nucléaire est très progressive. Elle correspond, grosso modo, à fermer définitivement tout réacteur atteignant 40 années de vie et à ne construire aucune nouvelle centrale.
Sur les 54 réacteurs du parc nucléaire japonais, quatre sont aujourd’hui définitivement fermés (les unités 1 à 4 de Fukushima). Deux réacteurs de la centrale d’Ohi, exploitée par Kansai Electric, dans la préfecture de Fukui, sur la côte ouest du Japon, ont été remis en route en juillet. Les autres sont à l’arrêt, mais pourront en principe redémarrer dès qu’ils auront satisfait les exigences de sûreté. Dans les faits, la production japonaise d’électricité nucléaire est inexistante ou marginale depuis plus de six mois.
Si le Japon s’en tient à la décision de ne pas construire de nouvelles centrales nucléaires, d’ici 2030, il ne restera qu’une quinzaine de réacteurs n’ayant pas dépassé le seuil des 40 ans. Et il n’y en aura plus que cinq en 2040.
Même cette sortie du nucléaire relativement douce suppose un très important effort pour développer des sources d’énergies alternatives. Selon le Financial Times, le gouvernement juge nécessaire un investissement de l’ordre de 640 milliards de dollars (un peu moins de 500 milliards d’euros) pour développer les énergies renouvelables – solaire, éolien, géothermie ; et ce développement devra s’accompagner d’importations accrues de gaz naturel et d’autres combustibles fossiles.
Le choix d’un objectif de 15 % de nucléaire à l’horizon 2030, soit environ deux fois moins qu’avant la catastrophe de Fukushima, correspond à l’option qui était jugée la plus probable par les observateurs. Un scénario de sortie immédiate du nucléaire avait été envisagé en juin dernier, mais il supposait de faire passer la part des énergies renouvelables à 35 % d’ici 2030, option jugée trop coûteuse par un certain nombre d’experts. Selon une estimation, ce scénario sans nucléaire aurait entraîné une baisse du PNB de plus de 300 milliards d’euros par an (31 000 milliards de yens). Noda s’était appuyé sur cette estimation pour exiger le redémarrage de la centrale d’Ohi en juillet (voir notre article ici).
Même si la décision du gouvernement Noda était prévisible, elle a d’ores et déjà provoqué l’inquiétude des partenaires occidentaux du Japon, en particulier des États-Unis, de la France et de la Grande-Bretagne.
Le quotidien Asahi Shimbun révèle qu’un conseiller de Noda, Akihisa Nagashima, et un secrétaire parlementaire, Hiroshi Ogushi, se sont rendus à Washington pour rencontrer des représentants de la Maison Blanche et du Département de l’énergie. Les discussions auraient porté, notamment, sur la gestion du plutonium et le rôle futur du Japon dans le domaine de la non-prolifération et de l’énergie nucléaire.
Noda face aux pressions du « village nucléaire »
Le premier ministre Yoshihiko Noda a indiqué que son parti, le PDJ (parti démocrate japonais), était favorable à une sortie dès 2030. Mais Noda fait face à une forte opposition politique, et a sans doute dû transiger. Le plan du gouvernement, dévoilé le 7 septembre par l’Agence Kyodo News, prévoit de réduire la part du nucléaire dans la production d’électricité à 15 % d’ici 2030. Elle était de 30 % juste avant l’accident de Fukushima, et les prévisions établies en 2010 visaient à la porter à 50 % en 2030.
La décision du gouvernement Noda représente donc un virage à 180° de la politique énergétique japonaise, même si la sortie du nucléaire est très progressive. Elle correspond, grosso modo, à fermer définitivement tout réacteur atteignant 40 années de vie et à ne construire aucune nouvelle centrale.
Sur les 54 réacteurs du parc nucléaire japonais, quatre sont aujourd’hui définitivement fermés (les unités 1 à 4 de Fukushima). Deux réacteurs de la centrale d’Ohi, exploitée par Kansai Electric, dans la préfecture de Fukui, sur la côte ouest du Japon, ont été remis en route en juillet. Les autres sont à l’arrêt, mais pourront en principe redémarrer dès qu’ils auront satisfait les exigences de sûreté. Dans les faits, la production japonaise d’électricité nucléaire est inexistante ou marginale depuis plus de six mois.
Si le Japon s’en tient à la décision de ne pas construire de nouvelles centrales nucléaires, d’ici 2030, il ne restera qu’une quinzaine de réacteurs n’ayant pas dépassé le seuil des 40 ans. Et il n’y en aura plus que cinq en 2040.
Même cette sortie du nucléaire relativement douce suppose un très important effort pour développer des sources d’énergies alternatives. Selon le Financial Times, le gouvernement juge nécessaire un investissement de l’ordre de 640 milliards de dollars (un peu moins de 500 milliards d’euros) pour développer les énergies renouvelables – solaire, éolien, géothermie ; et ce développement devra s’accompagner d’importations accrues de gaz naturel et d’autres combustibles fossiles.
Le choix d’un objectif de 15 % de nucléaire à l’horizon 2030, soit environ deux fois moins qu’avant la catastrophe de Fukushima, correspond à l’option qui était jugée la plus probable par les observateurs. Un scénario de sortie immédiate du nucléaire avait été envisagé en juin dernier, mais il supposait de faire passer la part des énergies renouvelables à 35 % d’ici 2030, option jugée trop coûteuse par un certain nombre d’experts. Selon une estimation, ce scénario sans nucléaire aurait entraîné une baisse du PNB de plus de 300 milliards d’euros par an (31 000 milliards de yens). Noda s’était appuyé sur cette estimation pour exiger le redémarrage de la centrale d’Ohi en juillet (voir notre article ici).
Même si la décision du gouvernement Noda était prévisible, elle a d’ores et déjà provoqué l’inquiétude des partenaires occidentaux du Japon, en particulier des États-Unis, de la France et de la Grande-Bretagne.
Le quotidien Asahi Shimbun révèle qu’un conseiller de Noda, Akihisa Nagashima, et un secrétaire parlementaire, Hiroshi Ogushi, se sont rendus à Washington pour rencontrer des représentants de la Maison Blanche et du Département de l’énergie. Les discussions auraient porté, notamment, sur la gestion du plutonium et le rôle futur du Japon dans le domaine de la non-prolifération et de l’énergie nucléaire.
Noda face aux pressions du « village nucléaire »
Le Japon a un accord de coopération nucléaire avec les États-Unis
qui lui permet d’enrichir de l’uranium pour l’utiliser comme
combustible nucléaire et d’extraire du plutonium après retraitement du
combustible usé. Les États-Unis se sont appuyés sur cet accord pour
empêcher le Japon de construire des armes nucléaires et ils ont aussi
utilisé la technologie nucléaire japonaise.
Après l’accident de Three Mile Island en 1979, les États-Unis ont cessé de construire des réacteurs nucléaires. Il en est résulté une perte de compétence technologique, et certaines sociétés américaines ont fait appel au Japon. En 2006, Toshiba a acheté Westinghouse, et l’année suivante, Hitachi et General Electric ont fusionné leurs activités dans le secteur de l’énergie nucléaire.
Les trois pays leaders de la technologie nucléaire sont actuellement la France, les États-Unis et le Japon. Mais un recul progressif du Japon, suivant celui des États-Unis, aboutirait à une situation dans laquelle la France se retrouverait isolée face à la concurrence du nouveau venu, la Chine.
De fait, la France est, après les États-Unis, le premier pays touché par la nouvelle politique énergétique du Japon. Le groupe Areva gère le retraitement du combustible des centrales japonaises, et se trouve donc directement affecté par le déclin du nucléaire nippon.
Le groupe français, mais aussi la Grande-Bretagne, retraitent du combustible nucléaire japonais, et en extraient le plutonium pour fabriquer du mox, autre combustible nucléaire, qui est réexpédié au Japon. Ce processus entraîne la production de déchets hautement radioactifs, qui sont aussi expédiés au Japon, dans un site de stockage à Rokkasho, dans la préfecture d’Aomori.
Une usine de retraitement a été construite à Rokkasho, grâce à un transfert de technologie d’Areva. Elle n’est pas encore opérationnelle et est toujours en phase d’essai. Mais si le Japon abandonne progressivement le nucléaire, l’installation de Rokkasho perdra beaucoup de son intérêt. La préfecture d’Aomori se refuse à ce que Rokkasho devienne un site de stockage définitif, sans retraitement. Elle a fait savoir que si le programme de retraitement était abandonné, elle refuserait d’accueillir les déchets nucléaires de haute activité.
Selon Asahi Shimbun, la situation a justifié une visite de l’ambassadeur de France au Japon, Christian Masset, à Osamu Fujimura, secrétaire général du cabinet, le 13 septembre. L’ambassadeur aurait demandé des garanties pour que le Japon prenne en charge les déchets de haute activité. Une demande similaire aurait été faite par l’ambassadeur britannique le 11 septembre.
Pour l’instant, la question de Rokkasho n’est pas tranchée : le plan Noda précise qu’un consortium sera créé entre le gouvernement de la préfecture d’Aomoro, le gouvernement central et les régions les plus consommatrices d’énergie pour discuter de la gestion future du cycle du combustible nucléaire.
D’autre part, le parc nucléaire japonais comporte aussi un surgénérateur, à Monju, dans la préfecture de Fukui. Il est censé démarrer en 2013. Le plan gouvernemental prévoirait d’en faire un réacteur de recherche, et de le fermer à moyen terme. Ce que les partisans du nucléaire, qui considèrent la surgénération comme une voie d’avenir, ne voient certainement pas d’un bon œil.
Yoshihiko Noda et son gouvernement doivent logiquement s’attendre à de multiples pressions à la fois de l’extérieur et du « village nucléaire », le lobby japonais de l’atome. Il est douteux que l’industrie nucléaire mondiale se résigne aisément à perdre l’un de ses pays phare. À cela s’ajoute la situation politiquement fragile de Noda, à qui les analystes prédisent une défaite cuisante lors des prochaines élections législatives, prévues pour la fin 2012. Le retour au pouvoir du PLD (le parti libéral démocrate) pourrait s’accompagner d’un nouveau revirement quant à la politique nucléaire. Mais un tel retour en arrière serait très mal accepté par une société japonaise marquée par Fukushima et de moins en moins convaincue, à l’inverse de ce qu’affirment ses dirigeants, qu’elle ne peut pas vivre sans nucléaire.
Après l’accident de Three Mile Island en 1979, les États-Unis ont cessé de construire des réacteurs nucléaires. Il en est résulté une perte de compétence technologique, et certaines sociétés américaines ont fait appel au Japon. En 2006, Toshiba a acheté Westinghouse, et l’année suivante, Hitachi et General Electric ont fusionné leurs activités dans le secteur de l’énergie nucléaire.
Les trois pays leaders de la technologie nucléaire sont actuellement la France, les États-Unis et le Japon. Mais un recul progressif du Japon, suivant celui des États-Unis, aboutirait à une situation dans laquelle la France se retrouverait isolée face à la concurrence du nouveau venu, la Chine.
De fait, la France est, après les États-Unis, le premier pays touché par la nouvelle politique énergétique du Japon. Le groupe Areva gère le retraitement du combustible des centrales japonaises, et se trouve donc directement affecté par le déclin du nucléaire nippon.
Le groupe français, mais aussi la Grande-Bretagne, retraitent du combustible nucléaire japonais, et en extraient le plutonium pour fabriquer du mox, autre combustible nucléaire, qui est réexpédié au Japon. Ce processus entraîne la production de déchets hautement radioactifs, qui sont aussi expédiés au Japon, dans un site de stockage à Rokkasho, dans la préfecture d’Aomori.
Une usine de retraitement a été construite à Rokkasho, grâce à un transfert de technologie d’Areva. Elle n’est pas encore opérationnelle et est toujours en phase d’essai. Mais si le Japon abandonne progressivement le nucléaire, l’installation de Rokkasho perdra beaucoup de son intérêt. La préfecture d’Aomori se refuse à ce que Rokkasho devienne un site de stockage définitif, sans retraitement. Elle a fait savoir que si le programme de retraitement était abandonné, elle refuserait d’accueillir les déchets nucléaires de haute activité.
Selon Asahi Shimbun, la situation a justifié une visite de l’ambassadeur de France au Japon, Christian Masset, à Osamu Fujimura, secrétaire général du cabinet, le 13 septembre. L’ambassadeur aurait demandé des garanties pour que le Japon prenne en charge les déchets de haute activité. Une demande similaire aurait été faite par l’ambassadeur britannique le 11 septembre.
Pour l’instant, la question de Rokkasho n’est pas tranchée : le plan Noda précise qu’un consortium sera créé entre le gouvernement de la préfecture d’Aomoro, le gouvernement central et les régions les plus consommatrices d’énergie pour discuter de la gestion future du cycle du combustible nucléaire.
D’autre part, le parc nucléaire japonais comporte aussi un surgénérateur, à Monju, dans la préfecture de Fukui. Il est censé démarrer en 2013. Le plan gouvernemental prévoirait d’en faire un réacteur de recherche, et de le fermer à moyen terme. Ce que les partisans du nucléaire, qui considèrent la surgénération comme une voie d’avenir, ne voient certainement pas d’un bon œil.
Yoshihiko Noda et son gouvernement doivent logiquement s’attendre à de multiples pressions à la fois de l’extérieur et du « village nucléaire », le lobby japonais de l’atome. Il est douteux que l’industrie nucléaire mondiale se résigne aisément à perdre l’un de ses pays phare. À cela s’ajoute la situation politiquement fragile de Noda, à qui les analystes prédisent une défaite cuisante lors des prochaines élections législatives, prévues pour la fin 2012. Le retour au pouvoir du PLD (le parti libéral démocrate) pourrait s’accompagner d’un nouveau revirement quant à la politique nucléaire. Mais un tel retour en arrière serait très mal accepté par une société japonaise marquée par Fukushima et de moins en moins convaincue, à l’inverse de ce qu’affirment ses dirigeants, qu’elle ne peut pas vivre sans nucléaire.
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