Photo : Alex Chabot
Planifiant les récoltes des Jardins de la Grelinette, Maude-Hélène Desroches et
Jean-Martin Fortier s’échinent à faire connaître leur modèle de micro-ferme sur
un hectare. Les pelleteux de compost ont appris à compter. « Néanmoins, c’est
un métier extraordinaire qui se caractérise moins par la quantité d’heures
passées au travail et le salaire que par la qualité de vie qu’il procure. Peu
de gens peuvent l’imaginer, mais en dépit de l’intensité de notre travail, il
reste beaucoup de temps pour faire autre chose. Notre saison débute lentement
en mars pour se terminer en décembre. C’est tout de même neuf mois de travail
pour trois mois de temps libre. »
– Jean-Martin Fortier, Le jardinier-maraîcher
– Jean-Martin Fortier, Le jardinier-maraîcher
«Plus le sage donne aux
autres, plus il possède.» –Lao-Tseu
J’ai fait un peu exprès
pour me perdre dans ce coin de pays où j’ai laissé filer mon enfance à l’ombre
du mont Pinacle. C’était là, Les Jardins de la Grelinette, cachés sur le chemin
Guthrie, une fermette comme on n’en croise plus tellement après des kilomètres
de champs de maïs sous un soleil de plomb.
La grelinette est un
instrument aratoire, une longue fourche à plusieurs dents en forme de U,
emblème de la petite ferme bio de Jean-Martin Fortier et Maude-Hélène
Desroches, deux trentenaires établis à Saint-Armand, en Estrie. C’est ici
qu’ils ont pris racine en 2005 après deux ans à se salir les mains au
Nouveau-Mexique et avoir vécu deux autres années sous un tipi à Frelighsburg.
Ici aussi qu’ils sont devenus convaincus qu’on pouvait vivre d’une microferme
alors que se meurt le modèle des petites fermes familiales.
Depuis, ils élèvent leurs
deux enfants dans un ancien clapier transformé en maison. Ils subsistent grâce
à un métier qui ne dépend que des caprices de la météo, en faisant rimer
liberté avec fierté, cohérence avec persévérance.
Depuis 2005, il en a
poussé, de la mauvaise herbe, dans les champs, mais Jean-Martin a réussi à
prouver, chiffres à l’appui, que ce modèle d’économie sociale développé autour
de l’achat local et la culture biologique faisait ses preuves. Il a même reçu
le prix de la Financière agricole du Québec en 2008 - pas exactement des granos
- pour leur rendement économique.
De plus, forts de leurs
études à l’École de l’environnement de l’Université McGill, de leur séjour à
Santa Fe et de leur visite de fermes bios à Cuba, Jean-Martin et Maude-Hélène
étaient persuadés qu’on pouvait faire fonctionner une ferme sur un seul
hectare, sans tracteur, avec le moins de pétrole possible, même sans
subventions agricoles.
« Si j’avais étudié en
agronomie, on m’aurait enseigné que ce modèle n’est pas viable. Ça nous coûte
moins de 300 $ de « fioul » par saison pour les travaux de sol de la ferme,
m’indique Jean-Martin en montrant le rotoculteur du doigt. Et mon hectare de
légumes me rapporte 150 000 $ bruts par année contre 2500 $ l’hectare pour mes
voisins qui cultivent le maïs avec leurs gros tracteurs. »
On ne s’étonne pas que
l’animateur Gérald Fillion l’ait invité à venir partager son modèle d’affaires
à (ICI) RDI économie. À force, les pelleteux de compost parviendront peut-être
à nous faire revoir les vieux modèles productivistes qui font dérailler les
trains d’enfer.
Légumes bioniques
À la Grelinette, tout se fait
à la main, ou presque. La fermette fournit 150 familles en paniers de légumes,
du mois de mai à novembre, et deux marchés fermiers, à Saint-Lambert le jeudi
et à Lac-Brome le samedi. J’y étais samedi dernier : la cohue devant l’étal
chargé de betteraves, de carottes, de bette à carde, de coriandre, de basilic,
de tomates, de courgettes en disait long. En écoulant eux-mêmes leur
production, les fermiers de famille récupèrent les deux tiers de leurs profits.
Ma mère a cultivé un grand
jardin durant 25 ans - j’étais responsable des petits pois - mais je n’ai rien
vu d’aussi pétant de santé depuis. L’explication est simple : les produits sont
bios, moins gorgés d’eau, nourris dans le sol (pas au soluté hydroponique),
donc plus goûteux ; ils n’ont pas traversé un continent en camion, donc ils
sont plus frais. Oui, ça coûte cher. Cette agriculture sans OGM n’est pas
subventionnée. Mais leur mesclun à 4 $ (8 $ la livre) n’est pas déjà pourri
dans le sac de plastique ; sa fraîcheur est inimitable et il pollue moins.
D’une franchise peu
commune, le charismatique Jean-Martin avait été clair avec moi : « Ma blonde
n’aime pas les médias ; on ne cherche pas de nouveaux clients, on ne désire pas
vendre davantage, mais je veux faire connaître notre modèle et encourager des
jeunes qui seraient tentés de faire comme nous. »
D’ailleurs, ils le font
déjà en semant des vocations. La Grelinette prend sous son aile trois
stagiaires par été, non rémunérés, à raison de trois semaines ou plus à la
fois. Jean-Martin en a refusé 40 depuis le début de l’été. Ces jeunes dans la
vingtaine viennent récolter ici les rudiments d’une culture intensive
respectueuse de l’environnement. Chloé veut se lancer dans les fleurs,
Alexandre cherche une ferme pas trop chère et Yoan vit son rêve de Parisien
dans une cabane au Canada avec une formation en art-thérapie dans son baluchon.
Chaque stagiaire est
hébergé dans un des petits tipis en bois que Jean-Martin a construits dans la
forêt et a aussi accès à une ère commune. Les repas végétariens font partie de
ce troc pédagogique. « C’est important pour nous que nos stagiaires soient
heureux, bien nourris. Ce qu’ils reçoivent en amour, ils nous le redonnent »,
avance Jean-Martin. De 8 h à 17 h, on trime dur dans le champ, peu importe la
météo. Le dimanche est jour de congé pour tous.
Jean-Martin prépare le
repas collectif du midi devant moi avec l’assurance d’un chef : omelette aux
courgettes, tomates-cerises sautées à l’huile d’olive, concombres crus,
mesclun, brocoli vapeur. « Mon idole, c’est Josée Di Stasio. Elle a compris que
le succès d’un plat tient à la qualité des ingrédients. »
Semer des graines
Pour couronner le tout,
l’homme qui plantait des légumes a publié un livre l’automne dernier : Le
jardinier-maraîcher. Un franc succès : plus de 12 000 exemplaires vendus,
distribué à la FNAC à Paris. Car cet humble jardinier-maraîcher s’est baladé
dans l’Hexagone comme conférencier en mars dernier pour démontrer aux cousins
paysans que son modèle à petite échelle fonctionne et qu’on peut en vivre très
bien.
Son livre explique tout
dans le moindre détail ; un véritable manuel du débutant avec illustrations de
racines de mauvaises herbes et budget de départ, d’une transparence que
souligne avec à-propos l’éco-sociologue Laure Waridel dans sa préface. Nous sommes
loin des Monsanto de ce monde, dans une philosophie inverse. « Si j’avais écrit
ce livre il y a dix ans, ça n’aurait pas fonctionné, croit l’auteur. Les
marchés fermiers n’existaient pas, les paniers étaient peu connus. Les gens
sont prêts ! » Et le jardinage a le vent dans les voiles, même à la ville.
De fait, Jean-Martin nous
explique noir sur blanc que les consommateurs de bio sont prêts à débourser
deux fois plus pour une botte de carottes avec leurs fanes (qu’ils jetteront)
que pour les mêmes carottes en sac. En marketing, on a compris depuis longtemps
que l’authenticité s’avérait rentable. Jean-Martin et sa blonde, eux, n’ont eu
qu’à se respecter eux-mêmes pour parvenir à leurs fins. Y’a du monde de même.
Noté que Jean-Martin Fortier
donnait des formations de maraîchage en petites surfaces à Montréal et à Québec
en novembre prochain et que les grelinettes étaient désormais disponibles au
Canada.
Feuilleté Barbecue végétarien écrit par le king du barbecue, Steven Raichlen (éditions de l’Homme). Les livres végés qui associent la cuisson sur flamme nue et légumes n’abondent pas. En voici un qui s’adresse aux débutants et permet de profiter autant du maïs, des tomates, des aubergines et des poivrons que du tofu. Le livre n’est pas séduisant graphiquement ; l’approche se veut technique et on nous guide pas à pas. Fenouil à la sauce au miel et xérès, tomates grillées à la sauge et ail, tofu teriyaki à la tangerine, pizzas et sandwiches grillés, sauce barbecue hoisin, sels à frotter, salsas, beurres, tout y est pour tirer parti de l’abondance.
Feuilleté Barbecue végétarien écrit par le king du barbecue, Steven Raichlen (éditions de l’Homme). Les livres végés qui associent la cuisson sur flamme nue et légumes n’abondent pas. En voici un qui s’adresse aux débutants et permet de profiter autant du maïs, des tomates, des aubergines et des poivrons que du tofu. Le livre n’est pas séduisant graphiquement ; l’approche se veut technique et on nous guide pas à pas. Fenouil à la sauce au miel et xérès, tomates grillées à la sauge et ail, tofu teriyaki à la tangerine, pizzas et sandwiches grillés, sauce barbecue hoisin, sels à frotter, salsas, beurres, tout y est pour tirer parti de l’abondance.
Craqué devant Petit clown,
l’arbre de Jacques Duquennoy (l’auteur des Camille, la girafe, Albin Michel
jeunesse). Petit clown plante une graine qui devient un arbre et, sur chacune
des branches, une surprise. Un livre qui rend hommage à la nature. Les pages
sont plastifiées, résistantes à la terre et à l’eau. Pour les 3 ans et plus.
Josée Blanchette
Tempête de laine
C’est tout près, de l’autre côté du mamelon du Pinacle, à la croisée de la route 139 et de la rue des Églises, à Abercorn, le village de mon enfance. Ça vaut le détour, ce projet de tricot-graffiti, l’ancienne école du village revêtue de laine crochetée. Vous pouvez admirer l’extérieur ou profiter de l’ouverture, les samedis et dimanche de 13 h à 17 h, pour visiter les travaux d’aiguille des tricoteuses du village qui ont participé à ce projet de récupération. Les 33 tableaux assemblés de cette installation au charme bucolique émerveillent. Jusqu’au 2 septembre. Passez ensuite à la boulangerie du village faire le plein !
C’est tout près, de l’autre côté du mamelon du Pinacle, à la croisée de la route 139 et de la rue des Églises, à Abercorn, le village de mon enfance. Ça vaut le détour, ce projet de tricot-graffiti, l’ancienne école du village revêtue de laine crochetée. Vous pouvez admirer l’extérieur ou profiter de l’ouverture, les samedis et dimanche de 13 h à 17 h, pour visiter les travaux d’aiguille des tricoteuses du village qui ont participé à ce projet de récupération. Les 33 tableaux assemblés de cette installation au charme bucolique émerveillent. Jusqu’au 2 septembre. Passez ensuite à la boulangerie du village faire le plein !
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