Il ne fait pas bon dire la
vérité ces temps. Bradley Manning, source de WikiLeaks, durement incarcéré et
jugé par la justice militaire étasunienne, Edward Snowden, bloqué dans son
aéroport moscovite et traqué par des dizaines d’Etats, ou Julian Assange,
enfermé depuis un an dans une ambassade, peuvent en témoigner. L’un des droits
les plus fondamentaux en démocratie, à savoir le droit des citoyens à connaître
les informations présentant un intérêt public, est allègrement piétiné par les
Etats-Unis, pays qui pourtant s’en était fait le chantre. Un black-out – ultime
retournement – justifié au nom du droit de l’Etat à tout savoir sur nous…
Les alliés de Washington ne sont pas en reste. Coup sur coup, Londres, Paris, Berlin ont été accusés – documents à l’appui – de surveiller illégalement nos communications. Sans provoquer le moindre remous politique.
Côté répression, la France n’est pas en reste. L’un de ses plus remuants sites d’investigation, Mediapart, s’est vu intimer l’ordre, la semaine dernière, de faire disparaître de ses archives toute mention des fameux enregistrements de Liliane Bettencourt, au nom de la défense de sa sphère privée. Ces bandes, obtenues clandestinement par un employé de la riche héritière de L’Oréal, avaient montré les libertés prises par celle-ci avec le fisc français ainsi que ses relations privilégiées avec le responsable du Budget de l’époque, Eric Woerth.
Des révélations qui, en bout de chaîne, ont fait chuter cet important ministre et provoqué la mise en examen d’un ancien président, mais que la décision de la Cour de justice ravale au rang de simple émanation de la «vie privée»… Conséquence: ce sont près de 900 articles de Mediapart qui devraient être censurés, biffant un pan de l’histoire de France comme on effaçait naguère des photos de Staline ses anciens camarades tombés en disgrâce.
Le verdict, s’il devait être appliqué1, est un coup très dur pour le site indépendant fondé par Edwy Plenel, forcé de toiletter des milliers de posts et de verser plusieurs dizaines de milliers de francs à la plus grande fortune de France en guise de dédommagement. Des difficultés qui ne semblent pas émouvoir la classe politique au sein de laquelle, à gauche – avec le compte en Suisse du ministre Cahuzac – comme à droite – les fonds Kadhafi pour la campagne de l’UMP –, Mediapart s’est fait dernièrement beaucoup d’ennemis.
Face à cette attaque frontale contre le droit à l’information, Le Courrier apporte un soutien sans faille à son confrère. Avec d’autres médias, des syndicats et des associations, nous avons cosigné l’appel «Nous avons le droit de savoir» lancé jeudi par Mediapart et le reproduisons dans cette édition. Le cas échéant, MCD– avec d’autres – s’engage à tout faire pour empêcher la disparition de la sphère publique des informations censurées par la justice française.
Il va de soi que les lecteurs sont invités à adhérer individuellement à cette initiative, directement sur le site de Mediapart. Le droit de savoir n’est pas l’apanage des journaux, encore moins des Etats fouineurs; il appartient au citoyen.
Les alliés de Washington ne sont pas en reste. Coup sur coup, Londres, Paris, Berlin ont été accusés – documents à l’appui – de surveiller illégalement nos communications. Sans provoquer le moindre remous politique.
Côté répression, la France n’est pas en reste. L’un de ses plus remuants sites d’investigation, Mediapart, s’est vu intimer l’ordre, la semaine dernière, de faire disparaître de ses archives toute mention des fameux enregistrements de Liliane Bettencourt, au nom de la défense de sa sphère privée. Ces bandes, obtenues clandestinement par un employé de la riche héritière de L’Oréal, avaient montré les libertés prises par celle-ci avec le fisc français ainsi que ses relations privilégiées avec le responsable du Budget de l’époque, Eric Woerth.
Des révélations qui, en bout de chaîne, ont fait chuter cet important ministre et provoqué la mise en examen d’un ancien président, mais que la décision de la Cour de justice ravale au rang de simple émanation de la «vie privée»… Conséquence: ce sont près de 900 articles de Mediapart qui devraient être censurés, biffant un pan de l’histoire de France comme on effaçait naguère des photos de Staline ses anciens camarades tombés en disgrâce.
Le verdict, s’il devait être appliqué1, est un coup très dur pour le site indépendant fondé par Edwy Plenel, forcé de toiletter des milliers de posts et de verser plusieurs dizaines de milliers de francs à la plus grande fortune de France en guise de dédommagement. Des difficultés qui ne semblent pas émouvoir la classe politique au sein de laquelle, à gauche – avec le compte en Suisse du ministre Cahuzac – comme à droite – les fonds Kadhafi pour la campagne de l’UMP –, Mediapart s’est fait dernièrement beaucoup d’ennemis.
Face à cette attaque frontale contre le droit à l’information, Le Courrier apporte un soutien sans faille à son confrère. Avec d’autres médias, des syndicats et des associations, nous avons cosigné l’appel «Nous avons le droit de savoir» lancé jeudi par Mediapart et le reproduisons dans cette édition. Le cas échéant, MCD– avec d’autres – s’engage à tout faire pour empêcher la disparition de la sphère publique des informations censurées par la justice française.
Il va de soi que les lecteurs sont invités à adhérer individuellement à cette initiative, directement sur le site de Mediapart. Le droit de savoir n’est pas l’apanage des journaux, encore moins des Etats fouineurs; il appartient au citoyen.
Benito Perez
1.
Mediapart va se pourvoir en cassation et demande, d’ici là, que la mesure ne
soit pas exécutée.
«Nous avons le droit de savoir»
La Cour de justice de
Versailles a contraint deux titres français – le média électronique indépendant Mediapart et «Le Point» – à retirer de leurs sites toute citation des
enregistrements audio relatifs à l’affaire Bettencourt. Mediapart a lancé un
appel, signé par «Le Courrier»*, pour protéger la liberté d’informer. Le voici.
La liberté de
l’information n’est pas un privilège des journalistes mais un droit des
citoyens. Dans une démocratie vivante, le pouvoir du peuple souverain suppose
le savoir d’un public informé. Etre libre dans ses choix et autonome dans ses
décisions nécessite de connaître ce qui est d’intérêt public, c’est-à-dire tout
ce qui détermine et conditionne nos vies en société. S’agissant des affaires
publiques, la publicité doit donc être la règle et le secret l’exception.
Rendre public ce qui est d’intérêt public est toujours légitime, notamment
quand le secret protège indûment des injustices et des délits, des atteintes au
bien collectif ou aux droits humains. Ainsi la sécurité des Etats ne saurait
empêcher la révélation de violations des libertés individuelles, pas plus que
la vie privée ne saurait être l’alibi d’infractions aux lois communes. C’est
pourquoi il importe de défendre les journalistes professionnels, les sources
d’information et les lanceurs d’alerte ayant permis la révélation de faits
d’intérêt général qui, sans leur travail et leur audace, seraient restés
inconnus du public. Les soutenir, c’est protéger et étendre un droit de savoir
universel, garantie d’un renforcement de la démocratie mondiale à l’heure de la
révolution numérique. Pour toutes ces raisons, nous nous disons solidaires de
Mediapart après la récente condamnation lui imposant de censurer, trois ans
après leur révélation, ses informations sur le scandale Bettencourt. En signe
de protestation, nous faisons désormais nôtres toutes ces informations. Et nous
encourageons les médias, les associations, les élus, les citoyens à les
reprendre immédiatement et à les diffuser par tous les moyens démocratiques en
leur possession.
Plus de quarante titres de presse, associations de
défense des libertés et syndicats et plus d’une centaine de personnalités
politiques et de la société civile en faveur de la liberté de l’information se
mobilisent au côté de Mediapart. Hier,
ils avaient déjà été rejoints par plus de 13 000 signataires en ligne sur http://blogs.mediapart.fr/blog/la-redaction-de-mediapart/110713/signez-l...
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